Dagmara Fijalkowski, cheffe, Titres mondiaux à revenu fixe et devises, fait le point sur les prévisions de taux des obligations en fonction des différents scénarios d’inflation. Dan Mitchell, gestionnaire de portefeuille, nous indique si l’appréciation du dollar américain se poursuivra.
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Transcription
Selon vous, comment évolueront l’inflation, les taux d’intérêt et les taux obligataires en 2023 ?
La Réserve fédérale est en train de hausser les taux directeurs au rythme le plus rapide depuis les années 1970. Depuis mars, nous avons augmenté les taux de deux points de pourcentage et quart. La banque centrale des États-Unis a également commencé à réduire les achats d’actifs importants, les achats d’obligation. Les investisseurs en titres à revenu fixe se posent maintenant la question suivante : est-ce que le taux de rendement de 3,5 % atteint plus tôt cette année aux États-Unis est le sommet
C’est une question qui est étroitement liée à savoir si l’on a atteint le sommet de l’inflation. Il y a deux points de vue divergents sur la façon dont se déroule l’inflation. Cela se résume au rythme de la baisse de l’inflation. L’une des écoles de pensée, qui s’aligne sur les prix actuels du marché, est d’avis que l’inflation est proche de son sommet et que quelques hausses supplémentaires de la Réserve fédérale, menant à la chute de l’inflation, permettront d’équilibrer le tout.
Les taux seront donc supérieurs à l’inflation d’ici le milieu de 2023 et, par conséquent, les taux d’intérêt seront restrictifs pour les conditions économiques, mais pas trop restrictifs. Il en résultera une récession courte et mineure. L’opposition rétorque que l’inflation ne sera probablement pas être assez rapide et que les banques centrales devront hausser les taux d’intérêt davantage et de façon plus agressive que les prix actuels du marché avant que les taux n’atteignent des niveaux nettement supérieurs à l’inflation.
Ce groupe soutient que le taux des fonds fédéraux devra être au moins supérieur à 4,5 % avant que la baisse nécessaire de l’inflation ne se manifeste. Il faudra attendre assez longtemps avant de savoir qui a raison. Les effets négatifs d’une hausse des taux mettent généralement environ un an à se répercuter sur l’économie.
Entre-temps, les taux des obligations américaines à 10 ans sont susceptibles de se négocier dans une large fourchette de part et d’autre de 3 %, les données sur l’inflation étant le facteur déterminant. Nous nous demandons si les investisseurs accordent un peu trop d’importance aux arguments selon lesquels le pire de l’inflation est derrière nous. Dans un tel contexte, nous préférons suivre des stratégies de négociation souples dans leurs portefeuilles plutôt que de se baser sur un seul de ces deux points de vue.
La vigueur du dollar américain se poursuivra-t-elle ?
Le dollar américain s’est considérablement raffermi cette année. Il a augmenté de 2 % par rapport au dollar canadien, de 12 % par rapport à l’euro et de 20 % par rapport au yen, une hausse considérable. Cette force peut être attribuée en partie à l’accélération des hausses de taux d’intérêt par la Réserve fédérale américaine et, en général, à un niveau plus élevé de ces taux aux États-Unis comparativement à ses partenaires commerciaux.
Toutefois, la vigueur est également liée à la détérioration des conjonctures économiques à l’étranger. Nous avons été témoins d’un nouveau durcissement des restrictions liées à la COVID-19 en Chine, par exemple, et ces limites ont assombri ses perspectives économiques. Et nous avons vu une crise énergétique en Europe, qui a pesé à la fois sur les dépenses des entreprises et des ménages. Ce sont des problèmes qui peuvent persister pendant un certain temps. Il est donc possible que la force du dollar américain se maintienne au début de l’année prochaine.
Cependant, à long terme, cette hausse du dollar américain n’est certainement pas durable. Nous nous attendons à ce que, dans un an, le marché des changes soit caractérisé par une faiblesse de cette devise. Cette prévision s’explique par le fait que de nombreux éléments que nous examinons dans notre cadre sont à long terme. Et ces facteurs à long terme suggèrent que le marché haussier du dollar américain durant une décennie (depuis 2011) touche à sa fin ou en est très proche. De plus, le dollar américain est excessivement surévalué, et cette surévaluation constituera désormais un frein à ses gains futurs.
Par conséquent, nous pensons que le billet vert se dépréciera dans l’année à venir, et les devises des autres pays développés pourront ainsi s’apprécier. Parmi ces monnaies, nous sommes d’avis que le dollar canadien peut progresser le plus, car il est soutenu par le durcissement de ton de la Banque du Canada, par une forte immigration et par des flux de capitaux positifs dans la balance des paiements. Tous ces facteurs lui sont très favorables.
Nous prévoyons que le taux de change du dollar canadien atteindra 119 dans 12 mois, ce qui équivaut généralement à un gain de 9 % de cette devise.