Les actions des marchés émergents ont progressé en janvier, mais reculé en février, et nous nous attendons à ce qu’elles demeurent volatiles. Les perspectives optimistes à l’égard des actions chinoises découlant du renouvellement de l’accent sur la croissance économique sont contrebalancées par les incertitudes entourant l’environnement macroéconomique mondial, notamment en ce qui concerne la probabilité d’une récession et l’ampleur de celle-ci. L’année 2022 ayant été difficile, il était attendu que les actions progressent, d’autant plus que l’inflation semblait diminuer après avoir atteint un niveau très élevé. Une résurgence de l’inflation pourrait toutefois entraîner une augmentation des taux d’intérêt, un ralentissement de la croissance mondiale et une nouvelle liquidation.
Les perspectives pour les actions des marchés émergents nous semblent meilleures que celles des marchés développés pour plusieurs raisons. Parmi elles figure l’opinion selon laquelle le pessimisme a atteint son paroxysme à la fin d’octobre l’an dernier, alors que les marchés financiers chinois étaient considérés comme largement à éviter. Le gouvernement chinois avait alors surpris les investisseurs en annonçant qu’il abandonnerait les restrictions liées à la COVID-19, provoquant une reprise vigoureuse des actions. À notre avis, les actions chinoises pourraient progresser davantage en raison de la consommation intérieure refoulée, et le marché immobilier national devrait se stabiliser maintenant que l’accent mis par le gouvernement sur la reprise économique est manifeste.
L’économie de la Chine pourrait obtenir un coup de pouce de l’épargne considérable de ses citoyens. L’épargne privée s’est accrue de 15 000 billions de yuans (2 billions de dollars US) au cours des dix premiers mois de 2022, dépassant les 10 billions mis de côté en 2020 et en 2021. Les taux d’épargne sont élevés en Chine en raison de l’absence de protection sociale comme les régimes de retraite et l’assurance maladie, mais nous restons d’avis qu’environ 3 billions de dollars US de ces fonds seront injectés dans l’économie au cours des prochaines années. Comme ce fut le cas lors du redémarrage de l’économie ailleurs dans le monde, de nombreux Chinois consacreront leurs dépenses aux voyages, que ce soit dans un but touristique ou pour rendre visite à leur famille dans d’autres provinces ou à l’étranger.
Les valorisations boursières attrayantes sont une autre raison justifiant un certain optimisme. Les actions chinoises se négocient à 1,4 fois leur valeur comptable, sous la médiane à long terme de 1,8. Les investisseurs étrangers ont relativement peu de placements en actions chinoises, et nous prévoyons que ces dernières attireront des flux plus élevés au cours des prochains mois. Un autre signe encourageant est la décision prise par les responsables, en décembre, d’élargir la portée de la passerelle boursière de Hong Kong pour inclure de grandes entreprises comme Alibaba, Baidu et Samsonite (Tencent et Meituan étaient déjà accessibles). L’expansion de la passerelle devrait permettre aux investisseurs de la Chine continentale d’acheter des titres de ces sociétés à la Bourse de Hong Kong d’ici la fin du premier trimestre de 2023, et stimuler davantage les placements en actions.
En raison de la volte-face de la Chine à l’égard de la COVID-19, l’opinion générale favorise les marchés émergents par rapport aux marchés développés en 2023. Les perspectives de croissance sont beaucoup mieux définies dans les pays émergents, les valorisations sont très intéressantes et la reprise de la Chine aidera l’économie mondiale, mais surtout la croissance des pays voisins de l’État chinois. Selon nos prévisions, l’écart de croissance entre les pays émergents et les pays développés se creusera, passant d’un niveau anticipé de 1,2 point de pourcentage en 2022 à 2,6 points cette année, soit l’écart le plus important depuis 2016. Les marchés émergents tendent à surclasser les marchés développés lorsque cet écart augmente.
Une autre tendance favorable aux actions des marchés émergents est la dépréciation prévue du dollar américain, un facteur étroitement associé à une meilleure tenue des pays émergents. Selon nous, le dollar américain a atteint un sommet après avoir connu un cycle haussier de 12 ans, et la surévaluation du billet vert commence à le rattraper.
Une nouvelle ère pour l’inflation commence également, après une douzaine d’années de contre-performance des marchés émergents. La période d’inflation jugulée, de prix des marchandises peu élevés et de faiblesse historique des taux d’intérêt est révolue. À notre avis, les marchés émergents sont mieux outillés pour faire face aux périodes de taux d’intérêt accrus étant donné leur longue expérience en la matière.
Pays
Au cours des prochains mois, les pays les mieux placés seront la Chine, la Corée du Sud, Taïwan et les Philippines, tandis que l’Inde, l’Arabie saoudite et l’Indonésie semblent peu attrayantes. Nous sommes prudents à l’égard de l’Amérique latine, principalement en raison de l’instabilité politique et de l’émergence de régimes populistes dans plusieurs pays. Nous notons que les valorisations sont intéressantes.
Secteurs
Nous pensons que le secteur de la technologie de l’information se redressera grâce à la croissance à long terme de la numérisation. Toutefois, cette croissance sera cyclique et le pire reste peut-être à venir pour le secteur. Les actions liées à la consommation discrétionnaire demeurent chères malgré les liquidations en 2021 et 2022. Les perspectives pour le commerce de détail sont particulièrement sombres, car ce secteur abrite les sociétés de commerce électronique, dont la croissance des bénéfices sera plus faible dans les prochaines années.
MSCI Marchés émergents : niveau d’équilibre
Valorisations et bénéfices normalisés
Les valorisations dans le secteur de l’immobilier remontent après avoir touché des creux, mais elles se situent toujours dans le 90e centile d’un point de vue historique. De nombreuses incertitudes persistent quant aux mesures que le gouvernement chinois prendra pour aider les promoteurs privés. Le secteur occupe une place modeste dans l’indice, mais il est crucial pour l’économie chinoise. Le traitement qui sera réservé aux promoteurs cotés donnera aux investisseurs une idée de la façon dont la Chine entend gérer les segments problématiques de l’économie.
Le secteur de la finance continue de présenter des valorisations attrayantes, et les sociétés qui le composent devraient être avantagées si les taux d’intérêt se stabilisent à des niveaux élevés. Les secteurs des produits industriels et des matières sont abordables et sont tous deux sensibles à la démondialisation et à la décarbonation. Nous nous attendons à ce que ces secteurs continuent de dégager des rendements supérieurs au cours des prochaines années.
Styles
Les actions de valeur devraient continuer à dominer compte tenu de leur contre-performance marquée depuis la crise financière de 2008-2009 et leurs valorisations bon marché. La composition de l’indice des marchés émergents a considérablement évolué depuis la fin de 2020 ; on y trouve désormais moins d’entreprises de la Chine et de la nouvelle économie, et une plus forte représentation des secteurs des matières et des produits industriels.
Les actions de qualité supérieure sont particulièrement sous-évaluées et les actions de qualité moyenne ont des valorisations similaires à celles des actions de qualité inférieure. Ces deux anomalies devraient se corriger, d’autant plus qu’en raison des taux d’intérêt plus élevés, les sociétés qui affichent de solides rendements et des bilans sains sont récompensées.
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