Cas de COVID-19
Les infections à la COVID-19 demeurent élevées dans les marchés développés (MD), mais elles ont en fait cessé d’augmenter au cours des dernières semaines (voir le graphique suivant). Dans les marchés émergents (ME), elles restent relativement faibles.
Cas de COVID-19 dans les marchés émergents et les marchés développés
Nota : Au 3 décembre 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien d’infections. Sources : OMS, Macrobond, RBC GMA
L’Europe est toujours l’épicentre de la vague du variant Delta. Toutefois, la courbe a récemment commencé à s’aplanir en Allemagne après une longue ascension (voir le graphique suivant).
Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 en Allemagne
Nota : Au 3 décembre 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : OMS, Macrobond, RBC GMA
À l’inverse, le nombre de cas continue d’augmenter au Canada et aux États-Unis, mais pas avec la même rapidité que celle observée jusqu’à récemment en Europe.
Variant Omicron
Un nouveau variant pourrait venir tout chambouler. Le variant Omicron présente un grand nombre de mutations, dont plus de 30 dans sa protéine de spicule seulement. Cette protéine influence considérablement la mesure dans laquelle le virus peut prendre le contrôle des cellules humaines, ainsi que sa réponse aux vaccins. Il est intéressant de noter qu’Omicron n’est pas dérivé du variant dominant Delta, mais a plutôt évolué à partir d’une souche antérieure.
Il est apparu pour la première fois au Botswana et se retrouve maintenant un peu partout en Afrique australe, plus particulièrement en Afrique du Sud, où l’on observe une hausse rapide des cas (voir le graphique suivant). L’Organisation mondiale de la Santé a déclaré que ce nouveau variant constituait un risque mondial « très élevé ».
Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 en Afrique du Sud
Nota : Au 3 décembre 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : OMS, Macrobond, RBC GMA
Questions clés
Il y a trois questions clés au sujet d’Omicron auxquelles il faut répondre pour bien comprendre la voie à suivre.
- Est-il plus contagieux ?
Il semblerait qu’Omicron soit plus contagieux que Delta, le précédent détenteur du record à cet égard. Non seulement Omicron est devenu le variant dominant en Afrique du Sud, mais il a réalisé cet exploit en quelques semaines à peine, soit plus rapidement que Delta. Des cas de contamination au variant Omicron sont maintenant signalés partout dans le monde, y compris au Canada et dans près du tiers des États américains.
Si l’on s’attendait à ce que les variants Bêta d’Afrique du Sud et Gamma du Brésil prennent le dessus à l’échelle mondiale après avoir conquis leur nation d’origine, cela ne s’est jamais produit. Par conséquent, il subsiste une mince possibilité qu’Omicron se révèle un peu moins puissant en dehors de l’Afrique australe. Cependant, d’après une analyse préliminaire de la nature de ses mutations, il est beaucoup plus probable qu’Omicron devienne le nouveau variant dominant sur la planète et que les infections mondiales augmentent à mesure qu’il gagne du terrain.
- Est-il plus résistant aux vaccins ?
Comme Omicron présente de nombreuses mutations de sa protéine de spicule, on craint que les vaccins soient beaucoup moins efficaces contre lui. Les experts de Moderna ont fait valoir qu’il y avait une forte probabilité de « baisse importante » de l’efficacité, tandis que ceux de Pfizer ont prédit que les vaccins existants devraient tout de même apporter une certaine protection. Ces déclarations ne sont pas contradictoires : les vaccins seront sans doute moins efficaces contre Omicron, mais pas entièrement inutiles. Un test effectué avec une protéine de spicule synthétique présentant des mutations similaires à celles d’Omicron a révélé que l’efficacité du vaccin chutait à des niveaux assez bas. Par ailleurs, Regeneron a indiqué que son cocktail d’anticorps est moins efficace contre Omicron.
Les fabricants de vaccins ont affirmé qu’ils pouvaient modifier leur produit pour contrer le nouveau variant en seulement deux mois, si nécessaire. Toutefois, cette nouvelle formule devra ensuite être testée, approuvée, fabriquée et distribuée. Ainsi, il faudrait attendre plusieurs trimestres avant de renouer avec le niveau d’immunité offert par la vaccination. Entre-temps, une distanciation sociale supplémentaire pourrait être requise.
Les résultats préliminaires suggèrent que le variant Omicron pourrait être jusqu’à trois fois plus susceptible de réinfecter les personnes qui ont déjà eu la COVID-19. Si cela est vrai, il risque de se propager plus rapidement. Dans le même ordre d’idées, il est possible qu’Omicron puissent mieux résister aux vaccins, puisque les anticorps développés naturellement agissent selon un principe similaire à celui des anticorps développés à la suite de la vaccination.
- Est-il moins mortel ?
Dans toute cette tourmente, il y a peut-être une bonne nouvelle : Omicron semble moins dangereux que les variants précédents.
Selon des informations anecdotiques en provenance d’Afrique du Sud, les hospitalisations n’augmentent que modestement, très peu de personnes ont besoin d’oxygène et les symptômes sont moins concentrés dans les poumons. Les symptômes ont aussi tendance à se manifester pendant une période plus courte, de quelques jours seulement.
Bien sûr, pour les souches antérieures, la plupart des cas étaient aussi légers, la population d’Afrique du Sud étant jeune et moins susceptible de souffrir de formes graves de la maladie que la moyenne. De plus, il faut des semaines pour que les infections donnent lieu à des hospitalisations et les hospitalisations, à des décès. Cela dit, à l’heure actuelle, les données sont encourageantes à cet égard. La première infection remonte au 9 novembre, ce qui laisse assez de temps pour commencer à faire des déductions cohérentes sur les hospitalisations et les décès.
Conséquences économiques
Nous présentons trois scénarios économiques liés au variant Omicron.
Scénario de base
Dans notre scénario de base (probabilité de 50 %), le variant serait un peu plus contagieux, un peu plus résistant aux vaccins, mais un peu moins dangereux. Selon toute vraisemblance, les gens feraient preuve d’une prudence accrue et les gouvernements imposeraient des restrictions supplémentaires pour éviter de submerger les hôpitaux. L’activité économique serait inférieure d’environ 1 % au premier semestre de 2022. S’ensuivrait un retour à la normalité au cours du deuxième semestre, à mesure que le variant perdrait de la vigueur et que des vaccins mieux ciblés seraient administrés. Il s’agirait d’un plus grand coup porté à l’activité que pour les variants Alpha et Delta, mais semblable à la baisse de l’automne 2020, et bien moins mauvais que la débâcle du printemps 2020.
Scénario pessimiste
Dans notre scénario pessimiste (probabilité de 20 %), le variant Omicron serait beaucoup plus contagieux, un peu plus résistant aux vaccins et pas moins dangereux que le variant Delta. Cela se traduirait par des restrictions plus strictes imposées par les gouvernements, puis par une baisse d’au moins de 2 % de la production économique au cours du premier semestre de 2022 et par un retour à la normalité dans la deuxième moitié de l’année.
Scénario optimiste
Le scénario optimiste, dont la probabilité est de 30 %, donne lieu à deux résultats possibles.
Le premier, c’est que le variant Omicron ne soit en fin de compte pas plus contagieux, ce qui signifie que la situation demeurera à peu près inchangée à l’échelle mondiale.
Le deuxième résultat optimiste, c’est que le variant Omicron soit plus contagieux, mais considérablement moins mortel. Il pourrait ainsi supplanter le variant Delta plus dangereux, ce qui permettrait d’atteindre rapidement l’immunité collective à l’échelle mondiale par des moyens naturels, sans devoir recourir à de nouvelles mesures de confinement. Une résolution rapide pourrait vraisemblablement améliorer les perspectives économiques, mais nous hésitons à adopter cette conclusion positive de façon trop hâtive. En effet, il faudrait alors que beaucoup de gens se mettent en quarantaine à la maison s’ils présentaient le moindre symptôme de la maladie ou s’ils y étaient exposés, ce qui réduirait temporairement la main-d’œuvre disponible.
Et qu’adviendrait-il si le variant Omicron était suffisamment différent des variants précédents pour pouvoir aisément réinfecter les gens ? Le variant Delta plus mortel pourrait-il à son tour être suffisamment différent du variant Omicron pour continuer d’infecter des gens en parallèle au lieu d’être supplanté ?
Le scénario optimiste comporte un autre risque : même si le variant Omicron s’avérait moins problématique que prévu, le seul fait que le virus ait réussi à muter à un tel point démontre que d’autres mutations majeures sont presque inévitables. Il y aura sans doute, tôt ou tard, un autre variant problématique.
Du point de vue des marchés
Il convient de noter que le variant Delta, bien qu’il s’agisse de la forme du virus la plus contagieuse et la plus dangereuse à ce jour, n’a pas réellement entravé les marchés financiers. Il est donc loin d’être certain que le variant Omicron sèmera la destruction sur son passage. Il serait toutefois logique que les marchés soient un peu moins constructifs si la croissance fait face à des difficultés modérées, comme c’est le cas dans notre scénario de base.
Autres éléments
Certains autres éléments concernant le variant Omicron pourraient s’avérer instructifs :
- D’un point de vue économique, la Chine pourrait être plus durement touchée que la plupart des autres pays du simple fait de sa politique de tolérance zéro. Pour maintenir cette position, elle pourrait devoir imposer des fermetures généralisées à répétition, ce qui pourrait, à son tour, exacerber les problèmes liés aux chaînes logistiques mondiales.
- D’un point de vue sectoriel, les activités liées aux voyages et aux services de premier ordre sont les plus menacées, comme elles l’ont été durant les vagues précédentes.
- Puisque le variant Omicron semble particulièrement habile à briser l’immunité naturelle acquise lors d’infections antérieures, les pays où le taux de vaccination est faible et le taux d’infection passé est élevé, comme les États-Unis, sont particulièrement vulnérables. De nombreux pays en développement se trouvent dans une situation similaire.
Augmentation des restrictions
Notre indice des mesures de rigueur dans le monde présente une légère augmentation des restrictions (voir le graphique suivant).
Indice de rigueur dans le monde
Nota : Au 5 décembre 2021. L’indice de rigueur dans le monde évalue la rigueur des mesures de confinement qui restreignent la mobilité dans les 50 plus grandes économies. Sources : Université d’Oxford, FMI, Macrobond, RBC GMA
Ce résultat est largement antérieur au variant Omicron. Au cours des derniers mois, les pays développés ont progressivement resserré leurs restrictions à mesure que le nombre de cas attribuables au variant Delta augmentait ; c’est notamment le cas en Europe, où plusieurs pays ont même mis en place des mesures de confinement pour les personnes non vaccinées.
Le Royaume-Uni a rétabli le port du masque obligatoire dans les magasins et les transports en commun. Il est également conseillé aux enfants de porter un masque dans les aires communes des écoles.
Il semble prudent de prévoir d’autres restrictions en raison de l’arrivée du variant Omicron. Le nombre de vols internationaux a déjà été réduit.
Données économiques
La plupart des indicateurs économiques ont été solides ces derniers temps, mais il convient de préciser qu’aucune de ces données ne prend encore en compte le variant Omicron.
L’indice économique hebdomadaire de la Réserve fédérale de New York laisse entrevoir une croissance robuste continue aux États-Unis (voir le graphique suivant).
Indice économique hebdomadaire de la Réserve fédérale de New York
Nota : Données pour la semaine se terminant le 27 novembre 2021. On obtient la variation par rapport à 2019 en comparant l’indice hebdomadaire économique de la semaine en cours à celui de la même période de l’an dernier. Sources : Réserve fédérale de New York, Macrobond, RBC GMA
Consommation et Action de grâce
Aux États-Unis, les données sur les ventes au détail de l’Action de grâce ont été contrastées. Selon RetailNext, l’achalandage en magasin a augmenté de 61 % par rapport à l’an dernier, mais demeure de 27 % inférieur aux niveaux enregistrés en 2019. Adobe estime pour sa part que si l’on tient compte des achats en ligne, les ventes durant la longue fin de semaine ont en réalité été légèrement inférieures à celles de l’an dernier. Cela est uniquement attribuable au fait que le Vendredi fou s’est progressivement transformé en Novembre fou : les soldes sont maintenant en vigueur pendant tout le mois dans de nombreux commerces, ce qui a contribué à devancer les ventes (on estime que les ventes enregistrées entre le début de novembre et l’Action de grâce ont surpassé de 13,6 % celles de la même période de l’an dernier). De plus, certains produits n’étaient pas disponibles en raison des perturbations de la chaîne logistique.
Le taux d’épargne des particuliers aux États-Unis est maintenant revenu à des niveaux historiquement normaux. Cela est tout à fait normal, mais laisse présager une marge de manœuvre réduite pour une importante accélération des dépenses personnelles à partir de maintenant – le processus de désépargne s’est déjà enclenché (voir le graphique suivant).
L’accélération du taux d’épargne des particuliers aux États-Unis s’essouffle
Nota : En date d’octobre 2021. La zone ombrée représente une récession. Sources : BEA, Macrobond, RBC GMA
Solidité de l’emploi
En principe, l’emploi a déçu aux États-Unis, l’enquête sur l’emploi révélant la création de « seulement » 210 000 nouveaux postes en novembre. Toutefois, le rapport était meilleur qu’il n’y paraissait. Des révisions ont permis de découvrir 82 000 emplois additionnels créés au cours des derniers mois. Le taux de chômage a continué de chuter, passant de 4,6 % à seulement 4,2 %.
Fait important, l’enquête menée auprès des ménages a montré que le marché du travail s’est enrichi de 1 909 000 nouveaux travailleurs en novembre, un gain impressionnant dont on a peu parlé et qui est neuf fois supérieur à la hausse officielle. L’enquête auprès des ménages tend à être la plus volatile des deux enquêtes, mais elle a tout de même une valeur informative. Renforçant l’interprétation optimiste de la situation, les demandes de prestations de chômage ont continué de fléchir, atteignant le niveau le plus bas en 52 ans (bien qu’en partie du fait de distorsions saisonnières). Chose sûre, l’emploi aux États-Unis continue de bien se porter.
Au Canada, l’interprétation des données a été plus simple et également optimiste. Le Canada a créé 154 000 emplois en novembre, soit cinq fois plus que prévu, ce qui a plus que compensé la déception causée par le rapport du mois précédent. Par conséquent, le taux de chômage est passé de 6,6 % à seulement 6,0 %, ce qui est excellent au regard des normes canadiennes. Tous ces résultats ont été les bienvenus, car l’économie canadienne avait trébuché auparavant. Bien sûr, elle vacillera de nouveau une fois que les effets des récentes inondations en Colombie-Britannique seront pris en compte.
La croissance des salaires au Canada, qui est depuis longtemps à la traîne, semble maintenant s’accélérer. La rémunération horaire des employés permanents a crû de 3,0 % sur 12 mois en novembre, comparativement à 2,1 % précédemment, et le taux annualisé de croissance des salaires au cours des derniers mois est plus près de 5 %.
Solidité des indices des directeurs d’achats
Les indices des directeurs d’achats (PMI) ont été solides dans plusieurs marchés développés. Aux États-Unis, les indices PMI ISM des secteurs de la fabrication et des services ont tous deux augmenté en novembre, celui des services établissant un autre record. Les indices PMI de la zone euro ont aussi progressé, et ceux du Royaume-Uni sont restés robustes.
En Chine, l’indice PMI officiel de l’industrie manufacturière a dépassé 50 pour la première fois depuis août, ce qui laisse entendre que l’économie chinoise a cessé de ralentir. On peut aussi en déduire que les problèmes touchant les chaînes logistiques commencent à être résolus.
Abaissement de nos prévisions de croissance
Nous publierons officiellement une mise à jour de nos prévisions de croissance et d’inflation dans notre prochain rapport trimestriel Regard sur les placements mondiaux. D’ici là, nous tenons à souligner que les perspectives de croissance pour 2022 ont légèrement diminué et que les perspectives d’inflation ont quelque peu augmenté.
La croissance moindre s’explique essentiellement par la prise en compte d’une vague liée au variant Omicron au cours de la première moitié de 2022, dont l’effet est partiellement compensé par une évaluation légèrement moins négative des problèmes liés aux chaînes logistiques pour l’année à venir. En fin de compte, les perspectives de croissance de plusieurs pays développés passent d’un peu moins de 4,0 % à environ 3,5 %. Ces prévisions sont inférieures à la moyenne, mais demeurent conformes à une reprise économique au cours de l’année à venir.
En ce qui concerne l’inflation, les répercussions du variant Omicron sont ambiguës, mais la tendance récente de l’inflation est demeurée supérieure aux prévisions générales. Nous revoyons donc nos prévisions à la hausse pour tenir compte de cette évolution. Nous maintenons des projections supérieures à la moyenne en ce qui a trait à l’inflation, tout en restant d’avis que l’inflation devrait être un peu moins vigoureuse en 2022.
Les consommateurs canadiens plus réservés dans leurs dépenses
Les ménages canadiens sont en bonne santé financière. Ils ont profité de la forte progression de l’emploi, accumulé d’énormes surplus d’épargne pendant la pandémie (voir le graphique suivant), et leurs difficultés financières sont au plus bas.
Les ménages ont accumulé un surplus d’épargne considérable par suite de la pandémie
Nota : Données en date de septembre 2021 pour les États-Unis ; du T3 2021 pour le Canada et l’Allemagne ; du T2 2021 pour le Japon et le Royaume-Uni. Surplus d’épargne accumulé depuis mars 2020 par rapport à la moyenne de 2019. Sources : Macrobond, RBC GMA
Cependant, les ménages canadiens disposent d’une marge de manœuvre un peu plus limitée que les ménages américains. Aux États-Unis, le ratio du service de la dette (qui représente la part du revenu consacrée au service de la dette) est environ un point de pourcentage plus bas qu’avant la pandémie, mais surtout près de deux points de pourcentage en dessous de la moyenne des 40 dernières années (voir le graphique suivant). Autrement dit, les Américains peuvent encore augmenter d’un ou deux points de pourcentage la part des revenus allouée aux dépenses, toutes choses égales par ailleurs.
La capacité des ménages américains à rembourser leurs dettes s’est améliorée pendant la pandémie
Nota : Au deuxième trimestre de 2021. Sources : Federal Reserve Board, Macrobond, RBC GMA
Le ratio du service de la dette s’est aussi amélioré pour les ménages canadiens pendant la pandémie, mais dans une bien moindre mesure (voir le graphique suivant). Les taux d’intérêt ont baissé, mais les ménages ont emprunté davantage. La flambée des prix du logement pendant la pandémie a neutralisé presque entièrement l’avantage lié aux taux d’intérêt. En outre, le ratio du service de la dette des ménages canadiens demeure proche de son niveau record et supérieur de plusieurs points de pourcentage à la moyenne des 30 dernières années.
Le fardeau du service de la dette des ménages canadiens a diminué pendant la pandémie
Nota : Au deuxième trimestre de 2021. Le ratio du service de la dette correspond uniquement au coût des versements d’intérêt sur la dette. Taux d’intérêt effectif moyen depuis 1995. Sources : Statistique Canada, Macrobond, RBC GMA
Il est important de noter que les taux d’intérêt augmenteront probablement au cours des prochaines années, étant donné que les banques centrales s’acheminent vers un resserrement de la politique. Cette transition alourdira les ratios du service de la dette.
Néanmoins, nous n’entrevoyons pas de catastrophe pour les ménages canadiens. Le chômage recule ; les ménages ont accumulé d’énormes surplus d’épargne ; une bonne partie de ceux qui renouvelleront leurs prêts hypothécaires au cours des prochaines années bénéficiera encore d’un taux plus avantageux qu’avant ; et les personnes qui ont récemment acheté une propriété ont été soumises à un test de résistance hypothécaire fondé sur des taux plus élevés. Cela dit, les Canadiens seront moins susceptibles que les Américains de provoquer un boom des dépenses de consommation au cours des prochaines années.
Le point sur la politique américaine
Voici cinq points intéressants relativement à l’évolution de la politique américaine.
En premier lieu, le Congrès a approuvé le projet de loi bipartisan sur l’infrastructure il y a trois semaines. Les investissements s’étendront sur la majeure partie des 10 prochaines années, de sorte qu’ils n’ont guère d’incidence sur les perspectives de croissance à court terme.
Deuxièmement, le projet de loi des démocrates sur les dépenses sociales, plus important, est au point mort, et son calendrier de mise en œuvre reste flou.
Troisièmement, une paralysie du gouvernement a été évitée de justesse début décembre ; les responsables politiques n’ont fait que repousser la date butoir au 18 février.
Quatrièmement, le problème du plafond de la dette n’a pas été résolu. Janet Yellen, secrétaire du Trésor américain, indique que le gouvernement pourrait se trouver à court de ressources financières dès le 16 décembre. Par conséquent, le jeu habituel qui consiste à prolonger le financement du gouvernement et à éliminer ou relever le plafond de la dette devrait reprendre très bientôt. Il y a peu de risque d’un dénouement malheureux, étant donné que les démocrates contrôlent les deux chambres du Congrès en plus de la Maison-Blanche.
Cinquièmement, la cote de popularité du président Biden a chuté de 53 % à son investiture à seulement 42,6 % aujourd’hui. C’est mieux que le président Trump au même stade de son mandat (37,3 %), mais pire que les 12 présidents précédents. Cette dégringolade conforte l’idée que les démocrates risquent de perdre du terrain lors des élections de mi-mandat prévues l’automne prochain et que les républicains pourraient bien remporter la majorité à la Chambre des représentants, voire au Sénat. Comme il est généralement plus difficile de faire approuver des lois bien avant les élections de mi-mandat, c’est maintenant ou jamais, durant son mandat de quatre ans, que le président Biden peut faire avancer la législation.
Réflexions sur l’inflation
L’inflation demeure élevée. Les dernières données proviennent de la zone euro, où l’indice des prix à la consommation (IPC) a bondi de 4,9 % sur 12 mois, un record depuis la mise en place de l’euro. À une exception près (qui sera discutée plus loin), les IPC des pays développés se situent généralement entre 4 % et 6 %, soit deux ou trois fois le niveau normal.
Inflation des services
Alors que l’inflation pourrait retomber dans le secteur des biens, en raison de la baisse des prix du pétrole et d’une éventuelle amélioration dans la chaîne logistique, l’inflation du secteur des services commence à peine à prendre sa vitesse de croisière. Non seulement les loyers ont-ils augmenté plus rapidement, comme nous l’avons exposé dans une édition précédente du MacroMemo, mais les coûts du câble, des loisirs et des services juridiques sont aussi en train de grimper. Cette tendance renforce la conviction que les tensions inflationnistes se généralisent, et qu’elles mettront du temps à s’apaiser même après la disparition des facteurs qui les ont fait naître.
Pressions salariales
Nous prévoyons toujours des pressions salariales l’année prochaine, même si l’inflation perdait un peu de sa vigueur. Les travailleurs en ont ressenti les effets sur le coût de la vie, mais grâce à la faiblesse du chômage et au nombre élevé de postes vacants, ils sont en position de force pour exiger une meilleure rémunération.
Les données relatives aux grèves viennent appuyer cette thèse. À la suite d’une récente grève, John Deere a augmenté les salaires de 10 % cette année. La société offre également une prime à la signature de 8 500 dollars et une augmentation de 5 % pour chacune des deux prochaines années, en plus de primes fondées sur les objectifs de production. Les données officielles ne disent pas clairement si les arrêts de travail sont en augmentation (car les chiffres fluctuent beaucoup), mais cela semble être le cas.
Pas d’inflation au Japon ?
Dans un monde aux prises avec une inflation élevée, le Japon fait figure d’exception. Dans ce pays, l’IPC global n’a avancé que de 0,1 % par rapport à l’an dernier, et la mesure de l’inflation de base a même baissé de 0,7 % sur 12 mois. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la situation est étrange. En théorie, la majeure partie des pressions inflationnistes qui pèsent sur les autres pays sont de nature mondiale : hausse des prix des marchandises, problèmes d’approvisionnement en biens fabriqués à l’étranger, etc.
Nos recherches font ressortir deux explications possibles.
D’abord, les entreprises japonaises se caractérisent par un style de gestion stable et une réticence à rajuster les prix de façon soudaine. Si c’est le cas, les sociétés japonaises devraient subir une réduction de leurs marges bénéficiaires en période de forte inflation et, par conséquent, leurs actions pourraient offrir une protection moins grande contre l’inflation, comparativement à celles d’autres pays.
Ensuite, et cela explique en grande partie par la première possibilité, les consommateurs japonais répugnent à payer des prix plus élevés après des décennies d’inflation quasiment nulle. Ils reportent leurs dépenses plutôt que de payer plus cher. On l’a vu lorsque le pays a relevé à deux reprises la taxe de vente au cours des dernières années : les dépenses ont bondi avant chaque hausse et se sont effondrées tout de suite après.
Cela dit, que les sociétés japonaises absorbent les hausses de coûts lorsque l’inflation est un peu plus forte que d’habitude est une chose, mais c’en est une toute autre quand l’inflation est très élevée comme en ce moment. Par conséquent, nous prévoyons une certaine hausse de l’inflation au Japon, bien qu’elle puisse être moins marquée qu’ailleurs.
Des nouvelles des banques centrales
Dans l’ensemble, les banques centrales poursuivent le resserrement de leur politique monétaire.
Aux États-Unis, une allocution récente de Jerome Powell, le président de la Réserve fédérale (Fed), a fourni des données importantes. La Fed a reconnu que l’inflation s’était généralisée et que le terme « transitoire » ne convenait plus pour décrire cet épisode d’inflation élevée et durable (elle ne croit toutefois pas que ces conditions soient permanentes). M. Powell a indiqué qu’à sa prochaine réunion, la Fed pourrait dévoiler un plan pour réduire ses achats d’obligations plus vite que prévu. Elle pourrait y mettre fin au printemps de 2022, plutôt qu’au milieu de l’année. Les marchés tablent désormais sur trois hausses de taux l’an prochain. Ce n’est pas impossible, mais nous croyons que cette prévision est légèrement exagérée, d’autant plus que les banques centrales n’ont pas encore tout à fait intégré le variant Omicron dans leurs prévisions.
La Banque du Canada (BdC) fera part de sa prochaine décision le 8 décembre. L’économie et l’inflation ont évolué plus ou moins comme l’avait prévu la BdC dans sa mise à jour d’octobre, bien que le taux de chômage soit actuellement légèrement inférieur à ses attentes. De façon générale, les banques centrales ont durci le ton. Par contre, la BdC pourrait adopter un ton plus neutre étant donné que les marchés anticipent déjà cinq hausses de taux en 2022 et que le variant Omicron pourrait réduire la nécessité d’un resserrement monétaire.
D’autres banques centrales, dont la Banque de Corée et la Banque de réserve de Nouvelle-Zélande, ont déjà relevé leur taux directeur.
À l’inverse, la Chine a abaissé le coefficient des réserves obligatoires des banques pour une deuxième fois cette année en raison du ralentissement de la croissance économique.
Le point sur les inondations en Colombie-Britannique
Par chance, les derniers épisodes de fortes précipitations n’ont pas fortement aggravé les dommages causés il y a quelques semaines par les inondations majeures et les coulées de boue dans le sud de la Colombie-Britannique.
Le 6 décembre, le pipeline Trans Mountain a été rouvert, rétablissant en grande partie l’approvisionnement en carburant dans la région. Les principales voies ferroviaires ont été remises en service le 23 novembre, mais peut-être pas au maximum de leur capacité. Plusieurs barrages routiers ont été levés, mais bon nombre d’entre eux sont encore en place et il faudra des mois pour réparer certains tronçons d’autoroutes.
La Colombie-Britannique a prolongé l’état d’urgence le 29 novembre, limitant les déplacements sur les autoroutes endommagées et les achats d’essence pour les véhicules non essentiels jusqu’au 14 décembre.
La reprise après sinistre se déroule de façon plutôt conforme à nos prévisions antérieures. L’économie canadienne devrait donc enregistrer une contraction en novembre. La croissance s’établira sans doute à quelques points de pourcentage sous la normale au dernier trimestre de 2021, avant de rebondir au premier trimestre de 2022.
– Avec la contribution de Vivien Lee et d’Aaron Ma
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