Les actions des marchés émergents ont enregistré de bons résultats en 2024, affichant un rendement de 9,6 % entre janvier et août et de 5,9 % au cours du trimestre clos le 31 août. La Corée du Sud et Taïwan ont été soutenus par le secteur de la technologie de l’information, tandis que les marchés chinois et brésilien ont été freinés par les inquiétudes concernant le ralentissement de la croissance économique. Le secteur de la consommation de base a été le moins performant. Selon nous, les perspectives des actions des marchés émergents devraient être déterminées par quatre facteurs : le rendement des actions liées à l’intelligence artificielle (IA), les élections américaines de novembre, l’évolution du dollar américain et des taux d’intérêt, et la performance économique de la Chine. Les actions des marchés émergents sont soutenues à long terme par des valorisations attrayantes en dehors du segment des actions technologiques, et par une croissance économique plus rapide que celle généralement observée dans les marchés développés.
Le secteur de la technologie de l’information, en particulier les actions liées à l’IA, a eu le vent en poupe au cours des 18 derniers mois et a contribué de façon disproportionnée au rendement des actions des marchés émergents. Malgré un récent repli, l’ampleur des gains et les valorisations du secteur demeurent plutôt extrêmes. Depuis le début de 2023, les actions taïwanaises se sont fortement redressées, le fabricant de puces Taiwan Semiconductor Manufacturing menant le bal. En Corée du Sud, SK Hynix, principal fournisseur de puces mémoires pour les processeurs de Nvidia alimentant l’IA, a aussi connu une hausse marquée. Nvidia elle-même a vu son cours multiplié par neuf pendant la même période. Il va sans dire que les valorisations sont désormais élevées d’un point de vue historique. La majeure partie de la chaîne logistique de l’IA se trouve à Taïwan, où environ 80 % de la capitalisation boursière du marché est liée à la technologie. La figure 1 illustre le ratio cours/valeur comptable à long terme de l’indice MSCI Taiwan par rapport à l’indice général MSCI Emerging Markets, et montre à quel point les valorisations sont devenues élevées dans ce secteur.
Figure 1 : MSCI Taiwan c. MSCI Marchés émergents Ratio C/VC prévisionnel sur 12 mois
Nota : En date d’août 2024. Sources : RBC, Bloomberg
Marchés émergents – Pondérations sectorielles recommandées
Nota : Au 30 août 2024. Source : RBC GMA
Les élections américaines de 2024, qui auront lieu le 5 novembre, influeront presque certainement sur les actions des marchés émergents. D’après les sondages et les marchés des paris, la course est serrée entre le candidat républicain, l’ancien président Donald Trump, et la démocrate Kamala Harris, l’actuelle vice-présidente.
Quel que soit le candidat qui l’emportera, les relations entre les États-Unis et la Chine sont susceptibles de demeurer tendues, bien que pour des motifs politiques différents. Nous nous attendons à ce que M. Trump mette l’accent sur l’utilisation de tarifs douaniers pour réduire le déficit du compte courant des États-Unis, tandis que Mme Harris, à l’instar du président Joe Biden, intensifierait probablement les restrictions sur les transferts de technologie vers la Chine. Nous sommes d’avis que M. Trump est plus préoccupé par la négociation d’accords et moins par l’idéologie, et que son approche pourrait être moins perturbante pour la Chine. M. Trump ayant conclu un accord commercial avec la Chine en janvier 2020, on pourrait espérer qu’il soit prêt à négocier s’il est élu.
L’objectif d’une administration démocrate dirigée par Mme Harris serait de freiner le développement technologique de la Chine afin de protéger la supériorité militaire et économique des États-Unis. Par conséquent, nous pourrions nous attendre à davantage de restrictions sur la technologie pour éliminer les failles. Les restrictions pourraient être étendues à la génération précédente de processeurs graphiques de Nvidia ou, sur le plan géographique, aux pays d’Asie du Sud-Est où les sociétés Internet chinoises établissent des centres de données. En dehors de la Chine, toutefois, nous ne prévoyons pas de virage important par rapport à la position de l’administration actuelle. Compte tenu d’une politique plus prévisible, une victoire de Kamala Harris pourrait réduire le potentiel de volatilité du marché financier. Bien que les propositions de Donald Trump concernant des droits de douane généraux de 10 % et des droits de douane de 60 % sur les produits chinois paraissent sévères, il est loin d’être certain qu’il y donnerait suite vu les répercussions potentiellement négatives qu’elles pourraient avoir sur le commerce mondial. De plus, de telles restrictions iraient à l’encontre de son objectif d’affaiblir le dollar américain.
L’évolution du dollar américain demeure un facteur déterminant des rendements des marchés émergents. Même si la légère faiblesse du billet vert au cours des deux derniers mois a grugé une partie de ses gains depuis dix ans, la valorisation du dollar demeure élevée et les marchés émergents, dans leur ensemble, ont tendance à avoir une situation budgétaire et un compte courant plus sains. Selon nous, le dollar américain devrait s’affaiblir à long terme, ce qui est de bon augure pour les actions des marchés émergents.
Indice MSCI Marchés émergents : niveau d’équilibre Valorisations et bénéfices normalisés
Nota : Les estimations de la juste valeur sont présentées à titre indicatif seulement. Des corrections sont toujours possibles et les valorisations ne limiteront pas le risque de dommages résultant de chocs systémiques. Il est impossible d’investir directement dans un indice non géré. Source : RBC GMA
Les actions chinoises continuent de freiner le rendement des actions des marchés émergents, car l’économie du pays est morose. Nous croyons, toutefois, que cette tendance pourrait s’inverser. En effet, les bénéfices ont bien résisté et le pessimisme généralisé des investisseurs à l’égard de la Chine signifie que les investisseurs étrangers sont maintenant sous-représentés et que les valorisations sont donc attrayantes.
En outre, les dépenses publiques ont augmenté en 2024, ce qui a aidé à stabiliser l’économie et à jeter les bases d’une accélération de la croissance du PIB. Lors des récents rassemblements de haut niveau du Parti communiste, les responsables chinois ont renouvelé leur engagement à l’égard de la cible de croissance du PIB réel de 5 % en 2024, ce qui sous-entend une accélération de l’expansion économique au deuxième semestre de l’année. Les autorités ont fait de l’augmentation de la consommation une priorité pour le reste de l’année 2024 et ont, à cette fin, renforcé les programmes qui encouragent les consommateurs à acheter des automobiles et des électroménagers, tout en suscitant l’espoir de mesures appuyant le secteur des services. En somme, les actions chinoises pourraient rebondir si une reprise de la croissance économique se concrétise, compte tenu des valorisations exceptionnellement faibles et du positionnement des investisseurs.
Au cours des 35 dernières années, les rendements des actions des marchés émergents ont eu tendance à exceller en termes relatifs quand les bénéfices et le PIB ont crû plus rapidement que dans les marchés développés, et vice versa. Cette relation a pris fin en 2023, la croissance relativement rapide des marchés émergents n’ayant pas entraîné une meilleure tenue des marchés boursiers. Une raison probable de cette rupture réside dans le fait que l’influence des actions liées à l’IA dans les marchés développés, en particulier aux États-Unis, a eu un effet démesuré sur les rendements indiciels. Nous nous attendons à ce que la relation entre les actions des marchés émergents et développés se rétablisse dans les années à venir, alors que la composition des marchés reviendra à un état plus « normal ».