Les progrès réalisés dans la lutte contre l’inflation ont revigoré les obligations et les actions, un resserrement additionnel de la politique monétaire n’étant plus nécessaire. Comme les hausses de taux n’ont pas encore produit tous leurs effets, la menace d’une récession persiste pour le début de 2024. Néanmoins, le prochain cycle se profile à l’horizon. Nous croyons que les marchés des capitaux sont en train de prendre en compte un retour à une inflation optimale et un raffermissement de la croissance dans le courant de l’année prochaine, dans un contexte de valorisations généralement attrayantes.
L’économie a évité la récession en 2023, mais des défis restent à relever pour le premier semestre de 2024
Bien qu’une récession ait été évitée jusqu’à présent en 2023, l’économie ralentira probablement au cours du premier semestre de 2024, avant de se raffermir plus tard dans l’année. L’épargne accumulée pendant la pandémie s’épuise, les dépenses publiques s’orientent vers un ralentissement et les frictions géopolitiques sont intenses. Toutefois, le principal obstacle pour l’économie mondiale demeure la progression des taux d’intérêt à leur plus haut niveau en 16 ans au milieu de 2023. S’ils restent élevés, les coûts d’emprunt plus importants pourraient dissuader les entreprises et les consommateurs de dépenser, tout en nuisant au service de la dette. La pression exercée par la hausse des taux d’intérêt est désormais visible dans les données économiques. Le commerce mondial se contracte ; les attentes des entreprises sont modestes ; l’activité dans le secteur du logement a chuté et le marché du travail commence à s’essouffler, quoique progressivement. Les conditions demeurent favorables à un atterrissage en douceur de l’économie et la probabilité de ce scénario grandit à mesure que l’inflation ralentit. Cela dit, nous continuons de prévoir une légère contraction aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et dans la zone euro au premier semestre de 2024.
L’inflation devrait continuer de diminuer
L’inflation a fortement chuté par rapport à son niveau le plus élevé depuis plusieurs décennies, au milieu de 2022, et nous croyons que ce déclin se poursuivra. Les quatre principaux facteurs de la montée en flèche de l’inflation se sont inversés de façon marquée. Le choc des marchandises s’est estompé, les goulots d’étranglement des chaînes logistiques se sont résorbés, les banques centrales sont passées des mesures d’assouplissement massif à une politique restrictive, et les mesures de relance budgétaire sont sensiblement réduites. Au plus fort de la tempête, l’inflation élevée était généralisée et la plus grande partie du panier des dépenses augmentait à un rythme inhabituel, mais l’ampleur de ces phénomènes s’estompe rapidement. L’inflation des biens a disparu. L’inflation dans le secteur des services reste élevée, mais elle a aussi atteint son sommet, et une économie plus faible devrait apporter un répit supplémentaire. Les coûts du logement, qui demeurent le plus important facteur d’inflation, sont susceptibles de baisser, en partie en raison des prévisions de repli du prix des maisons, et en partie parce que la part du logement au sein de l’IPC affiche un retard, de sorte que l’indice devrait refléter la faiblesse au cours des prochains mois. Pour toutes ces raisons, nous croyons que l’inflation continuera de se rapprocher de la cible de 2 % de la banque centrale, même si ce niveau pourrait ne pas être atteint d’ici la fin de l’année prochaine. Nos prévisions concernant l’inflation sont légèrement inférieures aux prévisions générales.
Le dollar américain a fait preuve de résilience, mais les facteurs favorables se dissipent
Le dollar américain est resté élevé plus longtemps que prévu. Les éléments favorables au billet vert commencent toutefois à s’estomper et des signes indiquent que les préoccupations budgétaires et le ralentissement de l’économie ont commencé à peser sur la monnaie, qui se situe à plus de 20 % au-dessus de la juste valeur. Nous prévoyons donc que le dollar cédera du terrain aux principales devises comme l’euro et le yen. Nous sommes relativement plus prudents à l’égard des devises des marchés émergents à court terme, bien qu’elles soient susceptibles, collectivement, de profiter d’une baisse soutenue du dollar américain à long terme.
Les taux d’intérêt à court terme pourraient avoir atteint leur sommet
Les taux directeurs dans les marchés développés se sont stabilisés à un niveau élevé de l’ordre de 5 %, après un relèvement exceptionnellement prononcé en réponse au choc inflationniste. Il n’est pas impossible que de nouvelles hausses de taux soient décrétées si l’inflation devait se maintenir à des niveaux supérieurs à 3 %. Cela dit, les données soutiennent de plus en plus un abaissement des taux en 2024, probablement plus tôt que prévu, et le rythme des baisses de taux pourrait s’accélérer. Les taux directeurs sont maintenant restrictifs, et il est peu probable qu’ils soient maintenus à leurs niveaux actuels si l’économie entre en récession ou si l’inflation continue de progresser vers la cible de 2 %.
Les obligations d’État connaissent une remontée impressionnante, notamment en raison des valorisations attrayantes, car les investisseurs anticipent la fin du cycle de resserrement
La hausse des taux des dernières années fait en sorte que la plupart des ajustements nécessaires au rétablissement d’un niveau adéquat de rémunération des investisseurs en titres à revenu fixe ont généralement déjà eu lieu. La possibilité d’une baisse des taux obligataires est apparue à l’automne, dans la foulée de la hausse à près de 5 % des taux des obligations du Trésor à 10 ans, ouvrant pour les investisseurs en obligations l’un des points d’entrée les plus attrayants depuis longtemps. Les marchés obligataires se sont redressés en novembre, alors que les investisseurs anticipaient la fin éventuelle du cycle de resserrement et la possibilité d’un assouplissement l’an prochain. Le taux des obligations américaines à 10 ans a chuté à 4,33 % en novembre, puis a atteint 4,00 % en décembre, depuis un sommet de 5,02 % en octobre. Les obligations d’État du Canada et de l’Europe se sont raffermies à des degrés semblables. La reprise a commencé par une sous-évaluation générale des taux par rapport à nos modèles d’équilibre, situation qui n’a été observée qu’à quelques reprises au cours des 40 dernières années, notamment pendant la crise financière mondiale et lors d’une brève hausse des taux en 2013. Nos modèles indiquent maintenant que les taux des obligations du Trésor à 10 ans pourraient se situer entre 3,50 % et 4,00 %, voire plus bas à long terme, en supposant une prime d’inflation entre 2,0 % et 2,5 %, des taux réels entre 0 % et 1 % et une prime de terme d’environ 100 à 150 points de base. Le cas échéant, les investisseurs pourraient obtenir des rendements totaux de 5 % à 10 % au cours de l’année à venir, puisqu’ils obtiendront des revenus de coupons intéressants en sus des gains en capital, à mesure que les taux continueront de baisser.
Les valorisations boursières sont raisonnables en dehors des sociétés à mégacapitalisation américaines, mais la croissance des bénéfices sera essentielle pour soutenir la reprise
En 2023, la remontée du marché boursier s’est distinguée par le fait qu’elle a reposé sur un nombre restreint de titres, les investisseurs ayant tenu compte du contexte économique difficile pour la plupart des sociétés cotées en bourse. Dans ces conditions, les « sept magnifiques », c’est-à-dire les sept actions les plus importantes du S&P 500 selon la valeur marchande, aussi considérées comme des actions de croissance de haute qualité, avaient progressé de 76 % au 30 novembre, faisant grimper le Nasdaq, riche en titres technologiques, de 36 % et le S&P 500 de 18 %, les sept actions représentant à elles seules 29 % et 15 % des gains respectifs de ces indices. La plupart des actions ont produit des rendements nettement inférieurs à ceux de l’indice pondéré en fonction de la capitalisation boursière. L’indice S&P 500 équipondéré, qui reflète mieux le rendement moyen des actions, n’a progressé que de 5 % au cours de cette période, et plusieurs autres indices mondiaux, comme l’indice britannique FTSE 100, l’indice composé S&P/TSX du Canada, l’indice de référence des marchés émergents et même les indices de sociétés américaines à petite capitalisation, n’ont produit que des rendements inférieurs à 5 %. Par conséquent, outre le S&P 500 pondéré en fonction de la capitalisation boursière et dominé par les sept magnifiques, les actions mondiales sont plus abordables, plus particulièrement à l’extérieur des États-Unis, où elles se négocient à des escomptes substantiels par rapport à leur juste valeur. Étant donné que les valorisations sont généralement raisonnables, le plus grand risque pour le marché boursier est, à notre avis, la trajectoire à court terme des bénéfices des entreprises. Les analystes prévoient un rebond de la croissance des bénéfices de l’indice S&P 500 qui passerait de 2 % de cette année à 11 % en 2024. Nous sommes toutefois d’avis que ces attentes pourraient être ébranlées si une récession d’ampleur modérée ou de plus grande importance s’installait aux États-Unis et dans le reste du monde. Dans la mesure où un atterrissage en douceur pour les États-Unis et l’économie mondiale devient de plus en plus manifeste, il est probable que les actions poursuivent leur progression. Si les perspectives de croissance s’améliorent et que la menace de bénéfices moindres diminue, la reprise pourrait gagner en vigueur et les titres des régions hors États-Unis, les titres de valeur et les actions de sociétés à petite et à moyenne capitalisation pourraient prendre les devants dans un contexte d’augmentation généralisée des bénéfices des sociétés, au moment où les investisseurs seront attirés par les valorisations les plus attrayantes, après le premier semestre de 2024.
Répartition de l’actif : augmentation de la pondération en titres à revenu fixe au-dessus de la position neutre
Nous reconnaissons que l’incertitude persiste, car les resserrements antérieurs de la politique monétaire se répercutent sur l’économie mondiale. Selon notre scénario de base, les économies devraient tomber en récession au cours des prochains trimestres, mais nous reconnaissons qu’il existe également des hypothèses plus optimistes pour l’économie et les actifs à risque, et qu’il est de plus en plus probable que ces dernières se concrétisent. Comme l’inflation suit une trajectoire favorable, il est peu probable que les banques centrales augmentent davantage les taux, et des réductions des taux directeurs seront appropriées à un moment donné au cours de la prochaine année. Dans le cas des obligations d’État, le rapport risque-rendement est particulièrement intéressant, étant donné que, à des taux plus élevés, les actifs à revenu fixe jouent le rôle de valeurs refuges et peuvent offrir une protection contre un repli des actions tout en réduisant le risque de pertes importantes. Même si nous continuons de nous attendre à ce que les actions surpassent les obligations à long terme, la détention d’actions par rapport aux titres à revenu fixe est moins avantageuse qu’elle ne l’était aux étapes antérieures du cycle, et les investisseurs ne sont peut-être pas suffisamment rémunérés pour pallier le risque de repli de l’économie. Nous nous montrerions plus optimistes en ce qui a trait aux perspectives des actions si nous constations un agrandissement de l’ampleur du marché boursier, une amélioration des indicateurs économiques avancés ou un assouplissement des conditions monétaires. Compte tenu de l’équilibre à maintenir entre les risques et les occasions pour les placements à court et à long terme, nous avons rehaussé notre pondération en titres à revenu fixe au cours du dernier trimestre, ce qui a fait bondir la pondération des obligations au-dessus du point neutre pour la première fois en deux décennies. Nous avons utilisé des liquidités pour accroître notre pondération en titres à revenu fixe de 50 points de base, car les taux des obligations du Trésor à 10 ans ont grimpé à près de 5 %. Pour un portefeuille mondial équilibré, nous recommandons actuellement la répartition de l’actif suivante : 60 % en actions (position neutre stratégique : 60 %), 38,5 % en titres à revenu fixe (position neutre stratégique : 38 %) et le reste en liquidités. La répartition de l’actif des fonds ou des portefeuilles de clients peut différer en fonction des politiques de placement individuelles.
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