Q: Après une période de contre-performance, les actions des marchés émergents (ME) ont commencé à surpasser les actions des marchés développés (MD). Cette amélioration du rendement peut-elle être maintenue ? Quels sont les principaux catalyseurs ?
Les actions des ME demeurent sous-pondérées et sous-évaluées, et nous prévoyons une période de volatilité dans la foulée des élections américaines. Toutefois, nos perspectives de rendement absolu et relatif sont positives pour les actions des ME pour les 12 prochains mois. Au cours des dernières années, de nombreux facteurs ont mené à la contre-performance des actions des ME par rapport à celles des MD, mais nous croyons que sommes maintenant à un tournant et que les difficultés se transforment en occasions. Vous trouverez ci-dessous les principaux vents favorables pour la catégorie d’actif. Malgré ces perspectives positives, les actions des ME se négocient actuellement à une décote historiquement importante par rapport à celles des MD.
Un dollar américain (USD) plus faible : Il existe une relation négative entre le rendement de l’USD et celui des actions des ME. À la suite des élections aux États-Unis, le dollar américain s’est raffermi, mais nous croyons que cette appréciation sera de courte durée. Plusieurs facteurs appuient sa dépréciation future. Plus précisément, soulignons le fléchissement de la croissance économique et la baisse des taux aux États-Unis, ainsi que les deux grands déficits du pays. Les valorisations sont également attrayantes, puisque le dollar américain semble surévalué par rapport à ses propres antécédents, à d’autres devises et aux données fondamentales de l’économie américaine. Parallèlement, les devises des ME se sont montrées résilientes au cours des dernières années, et nous croyons que cette amélioration du rendement peut se poursuivre, compte tenu des soldes budgétaires et des balances commerciales solides de nombreux ME.
« Le resserrement précoce de la politique monétaire de nombreuses banques centrales des ME a notamment fait culminer les taux d’intérêt, baisser l’inflation et offert aux investisseurs des rendements en revenu réel intéressants. »
Le rendement de la Chine s’améliore : Deuxièmement, la Chine, fortement pondérée au sein des indices de référence des actions des ME, a commencé à se redresser après plusieurs années de faiblesse. Malgré la récente reprise des actions chinoises, le positionnement des investisseurs et les valorisations boursières demeurent à des creux extrêmes. En outre, les épisodes antérieurs laissent croire que le marché pourrait connaître d’autres hausses. Les trois principaux rebonds alimentés par des mesures de relance depuis le lancement de l’indice CSI 300 de la Chine continentale en 2005 ont entraîné des gains de plus de 50 % à 100 % du creux au sommet1.
Perspectives de croissance favorables pour les pays émergents : La croissance économique des ME est de plus en plus étendue et moins dépendante de la Chine. À long terme, il existe une forte corrélation entre la croissance relative du PIB et le rendement relatif du marché boursier des ME et des MD. Après une période de resserrement, l’écart de croissance entre les ME et les MD a commencé à s’élargir et devrait se creuser davantage en 2025, grâce à la vigueur de la croissance économique dans de nombreux pays émergents et au ralentissement de la croissance aux États-Unis. Au cours des prochaines années, les pays émergents devraient représenter 70 % de la croissance du PIB mondial2.
Amélioration de la croissance des bénéfices des sociétés des ME : Des vents favorables soufflent aussi sur la croissance des bénéfices, un autre facteur important du rendement relatif des actions des ME et des MD. Au cours des dernières années, la croissance du bénéfice par action (BPA) a été plus faible dans les ME que dans les MD, dans l’ensemble. Le vent est cependant en train de tourner. Les actions des ME devraient connaître une croissance du BPA plus élevée que celles des MD en 2024 et en 2025, ce qui devrait favoriser l’appréciation des actions.
Les données fondamentales des pays émergents sont robustes : Les données fondamentales des ME se sont considérablement améliorées au cours des dernières années, grâce à des réformes économiques et à des politiques budgétaires et monétaires prudentes dans de nombreux pays. Il en résulte une situation budgétaire et un compte courant plus solides que par le passé et que les pays développés. Particulièrement, le déficit du compte courant américain avoisine son pire niveau par rapport aux ME depuis les deux dernières décennies, tandis que la situation budgétaire des États-Unis est aussi plus faible que celle des ME. Par conséquent, il y a eu une baisse structurelle des taux directeurs dans les ME et, pour la première fois de l’histoire, une pleine convergence avec les taux des MD. Cette situation place les ME dans une ère de détente monétaire, compte tenu des taux réels élevés et de l’inflation contenue.
La catégorie d’actif devient de plus en plus attrayante : L’univers des actions des ME devient de plus en plus attrayant, les pays y étant de plus en plus diversifiés et les actions, moins cycliques. La pondération des secteurs de croissance structurelle gagne en importance, notamment la consommation, la technologie et les infrastructures vertes, qui offrent un choix beaucoup plus vaste qu’auparavant de sociétés de grande qualité. Malgré cela, la catégorie d’actif se négocie souvent à des décotes records par rapport aux actions des MD.
Q: Le dollar américain a profité d’un marché haussier sans précédent sur le plan de la durée et de l’ampleur. Qu’est-ce qui pourrait faire fléchir la devise dans l’avenir ?
Il y a toujours eu une forte relation inverse entre le rendement de l’USD et celui des actions des ME. Les gains sans précédent du dollar américain au cours de la dernière décennie ont donc nui au rendement des actions des ME au cours de la période.
« Après plus d’une décennie de rendements élevés, le dollar américain semble surévalué et n’a pas atteint de niveau aussi élevé depuis 20 ans. »
Bien que nous nous attendions à de la volatilité dans la période qui suit immédiatement les élections aux États-Unis, nous croyons qu’il y a de solides arguments en faveur de la dépréciation du dollar américain.
À court terme, le ralentissement de la croissance économique et la baisse de l’inflation et des taux d’intérêt aux États-Unis devraient freiner la devise américaine.
À plus long terme, des facteurs relatifs comme les comptes courants, les ratios d’endettement et les positions budgétaires sont importants. Le déficit du compte courant américain avoisine son pire niveau par rapport aux ME depuis les deux dernières décennies, et la situation budgétaire des États-Unis est aussi plus faible que celle des ME, ce qui devrait soutenir les devises des ME.
Ce portrait des données fondamentales contraste avec les valorisations. Après plus d’une décennie de rendements élevés, le dollar américain semble surévalué et n’a pas atteint de niveau aussi élevé depuis 20 ans.
Un autre facteur important est que les échanges commerciaux des ME se dissocient du monde développé. Le commerce intérieur des ME continue de croître rapidement, 45 % de toutes leurs exportations étant maintenant destinées à d’autres pays émergents3. Cette situation offre des avantages aux économies des ME, car elle réduit leur corrélation avec le cycle économique des MD et les exigences de financement en USD, ce qui réduit leur vulnérabilité aux taux d’intérêt des États-Unis et à la vigueur de leur devise.
Q: Quelles sont les perspectives pour l’inflation et les taux dans les ME ? Quelle sera l’incidence sur les ME de l’amorce des baisses de taux par la Réserve fédérale américaine ?
Le cycle de détente monétaire des ME devrait s’accélérer et s’élargir en 2025, et de nombreuses banques centrales d’Asie et d’Amérique latine devraient emboîter le pas à celles qui ont déjà commencé à réduire leurs taux en 2024.
L’inflation a maintenant chuté de façon importante et se situe bien en deçà des fourchettes cibles des banques centrales dans tous les pays développés et dans la plupart des pays émergents. Il s’agit d’une condition préalable importante pour que les banques centrales des ME commencent à assouplir leurs politiques.
« En raison de la baisse de l’inflation conjuguée à l’assouplissement monétaire de la Fed aux États-Unis, on s’attend à ce que presque toutes les banques centrales des ME réduisent leurs taux en 2025. »
Malgré des taux réels élevés, de nombreuses banques centrales des ME se sont abstenues de baisser les taux avant la Réserve fédérale (Fed), car cela aurait pu faire pression sur leurs comptes de capital et leurs devises, et potentiellement empêcher l’inflation de descendre vers les fourchettes cibles.
En raison de la baisse de l’inflation conjuguée à l’assouplissement monétaire de la Fed aux États-Unis, on s’attend à ce que presque toutes les banques centrales des ME réduisent leurs taux en 2025. Ce que nous avons constaté par le passé, c’est qu’un contexte de politique monétaire accommodante va généralement de pair avec le rendement positif des actions des ME.
Q: Quelles sont vos perspectives concernant la Chine à la suite des dernières annonces de mesures de relance ? Est-ce suffisant pour soutenir la récente reprise des marchés boursiers ?
Après des mois de données économiques médiocres et de repli des marchés boursiers, les dirigeants chinois ont surpris les marchés en septembre 2024 en annonçant un nouveau plan de relance pour stimuler la croissance économique. Le président Xi Jinping a notamment présidé une réunion du Politburo pour la première fois en 12 ans, et le langage utilisé indiquait une approche plus compréhensive du ralentissement de la croissance et de la crise immobilière du pays. Bien que les mesures de relance précédentes aient été décevantes, les signes politiques ont cette fois-ci laissé croire à des efforts plus soutenus, ce qui a entraîné une forte reprise du marché boursier.
En novembre, nous avons également pris connaissance du détail d’un plan budgétaire très attendu. La principale nouvelle est que le gouvernement va émettre 6 000 milliards de RMB (835 milliards de dollars US) d’obligations pour rembourser la dette « cachée » hors bilan des gouvernements locaux afin de résoudre la crise des flux de trésorerie au sein des gouvernements locaux. Toutefois, ce plan de swap de dettes n’était accompagné d’aucune mesure de relance budgétaire importante, ce qui a déçu les investisseurs comme en témoigne la réaction du marché. Les décideurs ont plutôt réitéré que d’autres mesures seront mises en œuvre en 2025 et ont mentionné que le bilan du gouvernement central demeure solide et pourrait financer d’autres mesures de relance budgétaire.
Nous sommes d’avis que le virage notable du gouvernement chinois vers le soutien de l’économie est bienvenu après plusieurs années de réglementation accrue et de surveillance du secteur privé, ce qui a ultimement érodé la confiance et entraîné le repli du marché boursier.
Malgré la vigueur boursière initiale, les valorisations demeurent favorables par rapport aux antécédents et aux autres ME. À long terme, le marché a connu cinq grands redressements depuis le lancement de l’indice CSI 300 de la Chine continentale en 2005. De ce nombre, trois ont été alimentés par des gains de plus de 50 % à 100 % du creux au sommet. Si nous nous trouvons maintenant au début d’un autre redressement du genre, le potentiel de hausse pourrait s’avérer beaucoup plus important. Toute preuve de soutien budgétaire aux ménages et à la demande intérieure plutôt qu’à l’offre serait favorable à ce scénario.
« Nous continuons de mettre l’accent sur les sociétés chinoises de grande qualité qui exercent leurs activités dans des secteurs de croissance structurelle qui cadrent avec les thèmes de notre portefeuille et la politique gouvernementale. »
Ce qui est surprenant, c’est que malgré la faiblesse des données économiques, les sociétés chinoises continuent d’afficher une croissance robuste de leurs bénéfices et d’améliorer le rendement de leurs capitaux propres (RCP), ce qui laisse entrevoir une amélioration plus générale de la gouvernance d’entreprise et de l’affectation du capital sur le marché.
Bien que la Chine soit toujours confrontée à des défis structurels considérables à long terme, notamment une dette élevée, une démographie médiocre, une faible demande et la dissociation mondiale des chaînes logistiques, nous croyons que les valorisations et le soutien gouvernemental peuvent soutenir le marché en 2025. Au cours des deux dernières années, nous avons graduellement réduit notre sous-pondération structurelle en Chine, passant d’une sous-pondération maximale pendant la pandémie de COVID-19, lorsque les actions chinoises étaient extrêmement surévaluées, à une sous-pondération quasi neutre aujourd’hui.
Nous continuons de mettre l’accent sur les sociétés chinoises de grande qualité qui exercent leurs activités dans des secteurs de croissance structurelle qui cadrent avec les thèmes de notre portefeuille et la politique gouvernementale. Ces titres ont été vendus sans distinction au cours de la faiblesse des dernières années et sont devenus nettement sous-évalués, à notre avis, malgré des données fondamentales résilientes. Nous continuons d’éviter les secteurs cycliques de faible qualité, comme les entreprises d’État, où les possibilités de croissance rentable sont limitées.
Q: Compte tenu des valorisations boursières élevées, que pensez-vous de l’Inde à l’heure actuelle ?
L’Inde a été l’histoire à succès des ME des dernières années, stimulée par le programme de réforme du premier ministre Narendra Modi, qui a réussi à éliminer les entraves de longue date, à améliorer la facilité d’y faire des affaires et à propulser la position économique et politique de l’Inde sur la scène mondiale.
Nous continuons de considérer l’Inde comme l’une des occasions de croissance à long terme les plus attrayantes dans les ME, de nombreuses régions connaissant peu de pénétration, de faibles taux d’urbanisation, une vaste base de consommateurs et un éventail de sociétés de premier ordre. Toutefois, les deux dernières années de gains boursiers extraordinaires ont laissé les valorisations de certains segments du marché extrêmement tendues. En particulier, les rendements ont été concentrés au sein des sociétés à petite et à moyenne capitalisation et de certains secteurs axés sur les dépenses en immobilisations, notamment les produits industriels, l’immobilier et l’automobile.
Les investisseurs locaux ont alimenté les gains exceptionnels du marché, et plus de 2 milliards de dollars américains ont été affectés aux fonds communs de placement nationaux chaque mois4. À l’inverse, les investisseurs étrangers ont réduit leur participation au marché boursier indien et le sous-pondèrent dans l’ensemble à l’heure actuelle.
Globalement, nous croyons que le marché boursier indien devrait subir une correction, compte tenu des valorisations extrêmes dans certains segments où nous nous sommes montrés prudents. Nous continuons d’être optimistes à l’égard des facteurs structurels à long terme de l’Inde et croyons que sa pondération croissante au sein des indices boursiers de référence des ME est favorable à la catégorie d’actif.
À court terme, nous restons toutefois prudents à l’égard du pays en raison des valorisations. Plus récemment, nous avons commencé à voir la contre-performance du marché, en particulier dans les segments les plus chers que nous avons évités. Nous continuons de trouver de la valeur relative dans certains secteurs, notamment les sociétés à grande capitalisation et les services financiers, où nous avons modifié nos positions.
Q: Quelles sont vos perspectives à l’égard de l’Amérique latine, compte tenu de la faiblesse boursière récente et de l’incertitude politique ?
Nous sommes depuis longtemps d’avis que l’Amérique latine compte de nombreuses sociétés de grande qualité dotées d’équipes de direction solides. Les considérations descendantes y ont toujours été importantes et les risques liés à la politique méritent d’être surveillés en particulier.
L’année 2024 a été marquée par des tensions politiques. Malgré des taux réels parmi les plus élevés du monde, les pays d’Amérique latine sont parmi les moins performants des ME depuis le début de l’année, en grande partie en raison du risque politique au Brésil et au Mexique. La victoire électorale de M. Trump aux États-Unis a également des répercussions importantes pour la région. Le marché boursier brésilien a tendance à avoir une corrélation négative avec les taux obligataires américains. Il sera donc important de surveiller les politiques de la nouvelle administration américaine. De plus, même si à long terme, nous considérons que le Mexique est un bénéficiaire clé de la délocalisation à proximité et de la relocalisation des chaînes logistiques mondiales, tout changement éventuel des modalités commerciales entre le Mexique et les États-Unis risque de créer de la volatilité.
À la suite de la contre-performance de l’Amérique latine cette année, la valorisation de la région semble actuellement attrayante. À plus long terme, nous croyons que la région profite des changements apportés aux chaînes logistiques mondiales et du renforcement des marchandises.
L’un des principaux facteurs positifs que nous voyons à long terme pour le Brésil est la position dominante du pays sur le plan des matières tropicales. Le Brésil est le plus grand exportateur de nombreuses matières tropicales au monde, comme le soja, le maïs, le café, le sucre, le bœuf et le poulet5. Il est aussi l’un des plus grands exportateurs d’éthanol et de coton. Dans l’avenir, la solide position d’exportation du Brésil devrait profiter à sa position commerciale mondiale et à son compte courant.
Bien qu’il y ait un certain nombre de risques à court terme à surveiller au Mexique, nous croyons toujours que le scénario de délocalisation à proximité à long terme reste intact. Le Mexique a continué de gagner des parts du marché des importations américaines en provenance de Chine, plus que tout autre pays, et nous croyons toujours que cela pourrait se poursuivre, puisque la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine sera probablement le principal objet du nouveau gouvernement américain. Si la délocalisation à proximité se poursuit à long terme, elle pourrait considérablement accroître les investissements étrangers directs au Mexique et favoriser la croissance du PIB.
Q: Le Moyen-Orient gagne en importance au sein des indices boursiers de référence des ME. Que pensez-vous de la région ?
La pondération du Moyen-Orient au sein des indices boursiers de référence des ME a considérablement augmenté au cours des dernières années, atteignant près de 7 % de l’indice MSCI EM à l’heure actuelle, puisque les organismes de réglementation ont assoupli les règles et les sociétés ont assoupli les restrictions sur la propriété étrangère afin de favoriser les investissements.
Nous misons sur un scénario descendant particulièrement intéressant pour l’Arabie saoudite en raison des réformes structurelles et des investissements. Depuis son arrivée au pouvoir en 2015, le prince héritier Mohammed ben Salman (MBS) a mis en œuvre une série de réformes sous la bannière Vision 2030. Ces mesures transforment le royaume et sa trajectoire de croissance économique. Par le truchement de trois objectifs généraux (Nation ambitieuse, Économie prospère et Société dynamique), Vision 2030 vise à accélérer la croissance économique et à réduire la dépendance du royaume aux combustibles fossiles. Des progrès importants ont déjà été réalisés sur les plans économique et social. Par exemple, la part de l’économie non pétrolière a augmenté à plus de 50 % du PIB6, menée par le numérique, l’énergie verte, le perfectionnement des talents, l’accroissement de la population et le tourisme, tandis que sur le plan social, la participation des femmes au marché du travail a augmenté à 35 %7, dépassant déjà l’objectif de 30 % pour 2030. Parallèlement, l’Arabie saoudite devrait figurer parmi les pays alimentant le plus la croissance du PIB mondial dans les années à venir8.
Malgré ces facteurs positifs, l’Arabie saoudite continue de faire mauvaise figure en ce qui concerne les critères ESG et les droits de la personne, et de nombreux investisseurs aimeraient voir de nouveaux progrès dans ces domaines avant d’y accroître sensiblement leurs placements. À l’heure actuelle, le marché est en grande partie détenu au pays. Nous évaluons aussi les façons de saisir cette occasion de croissance structurelle attrayante. Cependant, la plupart des sociétés ne répondent pas encore entièrement à nos critères de qualité de la gestion et de robustesse des activités, ainsi que de divulgation d’information et de transparence, et de durabilité des pratiques commerciales. Le marché est également cher par rapport aux autres ME.
Q: Quelles sont vos perspectives pour le secteur de la technologie à la suite des rendements exceptionnels des actions liées à l’IA ? Ce solide rendement peut-il se poursuivre ?
Si la croissance structurelle offerte par le secteur de l’IA ne fait guère de doute, le rendement des actions liées à ce thème s’est considérablement élargi. En raison de leur vigueur cette année, nous avons graduellement réduit leur pondération, qui est passée d’une surpondération à une position quasi neutre à l’heure actuelle.
Étant donné que la demande liée à l’IA reste forte, tout comme les dépenses en immobilisations, et qu’il n’y a aucun signe de révision à la baisse des bénéfices, les investisseurs pourraient continuer à rechercher ces actions et les faire grimper. Toutefois, nous croyons que plusieurs facteurs méritent d’être surveillés :
Ampleur et rapidité des gains boursiers : Du début de 2023 jusqu’au moment de la rédaction du présent document, les actions taïwanaises ont progressé de 85 % sous l’impulsion de la hausse de 150 % du fabricant de puces Taiwan Semiconductor (TSMC). En Corée du Sud, SK Hynix, le principal fournisseur de mémoire pour les processeurs graphiques de Nvidia, a gagné 220 %. Aux États-Unis, le cours de l’action de Nvidia a augmenté de 800 % au cours de la même période9.
Valorisations : La plus grande partie de la chaîne logistique de l’IA se trouve à Taïwan, où les industries liées à la technologie représentent environ 85 % de la capitalisation boursière10. La valorisation de l’indice MSCI Taiwan semble très exagérée par rapport aux antécédents et au reste des ME.
Étendue : Dans les ME et les MD, nous avons constaté une domination extrêmement concentrée du marché, attribuable à une poignée d’actions technologiques. Cela entraîne également une concentration plus élevée au sein de l’indice de référence.
La monétisation de l’IA reste inconnue : Les dépenses en immobilisations des sociétés américaines considérées comme des fournisseurs à très grande échelle devraient plus que doubler, passant de 366 milliards de dollars américains au cours des quatre années jusqu’en 2021 à environ 750 milliards de dollars américains d’ici la fin de 202511. Cependant, de nombreuses questions demeurent, notamment en ce qui concerne le profil de marge prévu des nouvelles solutions d’IA générative, la répartition des investissements entre l’entraînement de modèles et l’inférence, et la réutilisation des investissements en formation pour la capacité d’inférence future. Cette situation risque de compromettre la poursuite du cycle actuel des bénéfices pour les actions du secteur de l’IA.
Si la technologie devait connaître d’autres reculs, les ME seraient selon nous relativement mieux positionnés que les MD. En ce qui concerne les valorisations du secteur des TI, les ME se négocient à un prix très avantageux par rapport aux MD.
Q: À votre avis, quelles seront les répercussions des résultats des élections aux États-Unis ?
Bien qu’il y ait plusieurs facteurs en jeu, nous croyons que les relations avec la Chine et le commerce mondial sont les principaux points que les investisseurs dans les ME devraient prendre en considération en ce qui a trait aux répercussions de l’élection de Donald Trump.
En ce qui concerne la Chine, nous avons toujours été d’avis que les relations avec les États-Unis demeureront tendues, peu importe le résultat des élections. Nous pensons cependant que M. Trump pourrait se révéler légèrement moins négatif pour la Chine que les démocrates. À notre avis, il se préoccupe davantage de la négociation d’accords et est beaucoup moins idéologique, de sorte que sa réglementation pourrait être plus simple à respecter pour la Chine que celle de l’administration Biden précédente, qui mettait l’accent sur les restrictions dans le secteur de la technologie. M. Trump a conclu un accord commercial avec la Chine en janvier 2020, on pourrait espérer qu’il sera de nouveau prêt à négocier.
En ce qui concerne le commerce mondial, M. Trump propose des tarifs de 10 % sur l’ensemble des importations aux États-Unis et de 60 % sur les produits chinois. Cependant, malgré la rhétorique, on ne sait pas s’il ira de l’avant avec de telles mesures. S’il le faisait, cela irait à l’encontre de l’objectif qu’il s’est fixé pour un dollar américain plus faible. De plus, la situation budgétaire précaire des États-Unis limitera la capacité de M. Trump à mettre en œuvre d’importantes réformes, étant donné que le déficit budgétaire et la dette du gouvernement représentent respectivement 7 % et 122 % du PIB de 202412.
Il convient également de noter que l’effet sur les exportations chinoises de l’imposition par les États-Unis de tarifs douaniers de 20 % sur certains produits chinois en 2018 a été limité dans l’ensemble, la Chine ayant augmenté ses exportations vers d’autres superpuissances, comme l’Inde et l’Arabie saoudite. De façon plus générale, nous avons constaté une hausse du commerce intérieur des ME, qui a réduit leur dépendance globale à la demande des pays développés, notamment des États-Unis. À l’heure actuelle, 45 % de toutes les exportations des ME sont destinées à d’autres pays émergents, proportion qui devrait continuer de croître à notre avis13. Toutefois, certains pays et certaines sociétés des ME seront plus vulnérables aux tarifs douaniers américains que d’autres ; la sélection demeure donc essentielle.
À plus long terme, nous constatons que des changements apportés aux chaînes logistiques mondiales profitent à de nombreux pays des ME. Nous continuons de considérer le Mexique comme l’un des principaux bénéficiaires du thème de la délocalisation à proximité des États-Unis, tandis que les économies de l’Inde et de l’Asie du Sud-Est, comme l’Indonésie et le Vietnam, attirent de plus en plus d’investissements étrangers alors que les sociétés cherchent à diversifier les risques liés aux chaînes logistiques.
Nous n’avons apporté aucun changement à nos portefeuilles par suite des élections aux États-Unis. L’augmentation des risques géopolitiques et l’incertitude soulignent l’importance d’investir dans des sociétés de grande qualité qui tirent parti des facteurs structurels de croissance intérieure. En ce qui a trait aux exportateurs dans lesquels nous investissons, nous nous concentrons sur les sociétés qui vendent des produits à d’autres pays émergents et celles qui offrent des produits et des services distincts à valeur ajoutée supérieure.