Dans cette vidéo, Dan Chornous, chef des placements, RBC Gestion mondiale d’actifs Inc. discute de l’amélioration de l’économie mondiale, de la baisse de l’inflation et de la diminution des risques de récession, ce qui incite les banques centrales à réduire leurs taux pour soutenir la croissance. Le marché obligataire américain a connu une certaine volatilité, mais on reste prudemment optimiste quant aux perspectives des titres à revenu fixe. Les actions, en particulier les titres de sociétés américaines à mégacapitalisation, se sont bien comportées en 2024, et l’avenir du marché boursier dépend de la croissance des bénéfices dans différents secteurs. Il souligne également l’importance d’une stratégie de composition de l’actif tactique et reconnaît que les risques géopolitiques et les répercussions des politiques de la deuxième administration de Donald Trump sont des menaces potentielles pour la stabilité économique.
Durée : 10 minutes, 20 secondes
Transcription
Quelles sont vos perspectives pour l’économie mondiale ?
Les perspectives de croissance mondiale sont vraiment en train de changer à l’approche de 2025. En 2023 et 2024, l’objectif principal était de réduire le choc de l’inflation et d’atteindre un taux de croissance de 2 %, 2,5 %, quelque chose comme une inflation de 2 %, 2,5 %. C’est en grande partie ce qui a été accompli. Ainsi, l’intense pression exercée par la hausse des taux d’intérêt à court terme, le ralentissement de la croissance intérieure et de la masse monétaire, semble être chose du passé.
Il y a environ six mois, les banques centrales ont changé de cap. Alors que l’inflation s’approchait d’un niveau plus acceptable, les baisses de taux ont commencé. Les États-Unis prennent maintenant activement part à ce mouvement, et cela donne un léger coup de pouce. Le risque maximal de récession est maintenant derrière nous. À un moment donné, la probabilité de récession était d’environ 75 %. Elle n’est plus que de 25 %. Il y a toujours un risque de chocs, bien sûr, au sein de l’économie.
Toutefois, l’ampleur des réductions de taux opérées devrait suffire à stabiliser la croissance. Les États-Unis devraient enregistrer une croissance d’environ 2,5 %. L’exceptionnalisme américain pose toujours problème, et ce pays devance le reste du monde ; le Canada est un peu à la traîne, et l’Europe plus loin encore. Mais il n’y aura pas de récession en 2025 et probablement pas en 2026.
Quels sont les principaux dangers pour la croissance économique ?
L’inflation a fléchi d’un mois à l’autre, presque partout dans le monde. C’est manifestement encore un risque très important. La surprise que nous avons observée en 2022 et 2023 au sortir de la pandémie a vraiment nui à la crédibilité des banques centrales. Elles ont travaillé fort pour la rétablir. Ce que nous voulons, c’est que cette tendance baissière vers 2 %, 2,5 % se poursuive en 2025 et au-delà.
Bien sûr, les tensions géopolitiques se sont vraiment intensifiées après la pandémie, et l’instabilité au Moyen-Orient est encore un facteur important qui divise le monde. De manière plus générale, de nombreux avantages de la fin de la guerre froide s’estompent, et cela entraînera des coûts et des inquiétudes pour les investisseurs.
Enfin, sur le plan intérieur, la deuxième administration Trump est délibérément une force perturbatrice, et cela a des conséquences. Nous ne savons pas de quelle ampleur elles seront, puisqu’il y a une part de rhétorique, une part de négociation. Toutefois, le monde sera différent en 2025 avec Donald Trump comme président. Les questions de l’immigration et du commerce sont clairement à l’avant-plan ; nous verrons jusqu’où cela ira.
Il est possible que ces facteurs influent sur la productivité et l’inflation. Avec un peu de chance, l’inflation sera un phénomène à très court terme. Nous espérons que le degré d’instabilité sera inférieur à ce que les gens craignent. Néanmoins, ce sont tous des facteurs auxquels nous devrons faire face à titre d’investisseurs au cours des 12 prochains mois.
Quelle est la réaction des banques centrales face au contexte économique actuel ?
Il y a environ six mois, les banques centrales ont fait volte-face, passant d’une focalisation sur l’inflation et les mesures pour la juguler rapidement, à une facilitation de la croissance future. Comme l’inflation a ralenti sans qu’une récession survienne, un atterrissage en douceur semble s’être produit. L’économie ne semble pas avoir besoin de l’effet puissant de taux d’intérêt élevés, et donc ces taux baissent partout dans le monde.
Cela dit, comme il y a suffisamment de forces susceptibles d’attiser l’inflation, les négociateurs ont modéré leurs perspectives quant au rythme et à l’ampleur des réductions de taux pour l’année à venir. Par exemple, le marché des contrats à terme prévoyait il y a trois ou quatre mois que les taux d’intérêt à court terme aux États-Unis, soit le taux des fonds fédéraux, s’établiraient à 2,75 % un an plus tard.
À présent, compte tenu de la nouvelle administration, de l’instabilité mondiale et de divers facteurs comme le commerce, la politique et l’immigration, le taux prévu n’est plus de 2,75 %, mais de 3,75 %. Cela dit, la hausse des taux à court terme ne semble pas suffisante pour freiner l’économie. La croissance devrait rester raisonnable partout dans le monde et l’inflation devrait continuer de se rapprocher de la cible.
Quelles sont vos perspectives pour les titres à revenu fixe ?
En 2022 et 2023, l’unique objectif consistait à relever les taux d’intérêt pour mieux rendre compte de deux choses. Premièrement, l’inflation était beaucoup plus élevée que prévu, et deuxièmement, il était nécessaire qu’à l’issue de la pandémie, les investisseurs obtiennent des taux d’intérêt réels positifs. Pendant la pandémie, les taux d’intérêt réels, ou après inflation, sont devenus nettement inférieurs à zéro. Une telle situation ne peut durer dans un monde en pleine croissance.
Les investisseurs doivent obtenir une rémunération pour avoir économisé plutôt que dépensé. Il y a donc deux très grandes forces qui vont à contre-courant du marché obligataire. À un moment donné à l’automne 2023, les taux d’intérêt ont brièvement dépassé 5 %, si l’on prend les obligations américaines comme point de référence. Mais ce niveau s’est avéré insoutenable pour deux raisons. D’abord, les craintes que l’inflation continue de grimper n’étaient pas fondées, puisque l’inflation a été maîtrisée.
Ensuite, le taux d’intérêt réel des obligations du Trésor avait déjà commencé à augmenter. Cela a engendré une reprise des obligations, dont le taux est passé de 5 % à 3,75 % au printemps 2024. Ce niveau tenait compte de beaucoup de bonnes nouvelles, et bien sûr, le taux est remonté vers 4,5 % plus tard à l’été 2024.
Depuis, nous avons évolué dans cette fourchette de 3,75 % à 4,5 %. Ces paramètres nous paraissent raisonnables d’après nos équations de valorisation. Si les taux restent dans cette fourchette, et nous pensons que ce sera le cas au cours de l’année à venir, nous obtiendrons un taux d’intérêt réel approprié. Disons 1 %, 1,5 %. Cela tient compte de l’inflation prévue.
Et c’est en fait le point d’équilibre des taux des obligations. Dans cette fourchette, vous obtiendrez à peu près la valeur du coupon, peut-être un peu plus. Le taux du coupon, ou taux d’intérêt nominal, est actuellement d’environ 4,4 %. Les obligations du Trésor américain pourraient offrir un rendement un peu supérieur à celui des autres obligations mondiales, mais nous sommes modérément optimistes à l’égard des obligations en 2025.
Quelles sont vos perspectives pour les actions ?
Certes, 2024 s’est avérée une année fabuleuse, et bien meilleure pour les actions que ne l’avaient prévu presque tous les prévisionnistes, y compris nous-mêmes. Cela dit, l’activité a été dominée en majeure partie par les plus grandes actions du marché boursier américain. Ce segment du marché, les mégacapitalisations, est une bonne option pour les investisseurs intéressés par l’intelligence artificielle.
En conséquence, nous observons deux réalités. D’une part, le marché boursier américain est très cher. D’autre part, le marché boursier mondial et le marché boursier canadien s’avèrent plutôt attrayants. Il suffit d’explorer le marché boursier américain pour découvrir qu’en dehors des sociétés à mégacapitalisation, les valorisations sont également assez attrayantes.
La perception selon laquelle il s’agit d’un marché haussier très cher et qui tire à sa fin est fortement influencée par ce qui s’est passé dans ce petit groupe que nous appelons les sept magnifiques. Le marché haussier pourrait se poursuivre dans ce contexte, mais pour ce faire, de très grands obstacles devront être franchis. D’après les prévisions générales actuelles, la croissance des bénéfices avoisinera 14 % en 2025 et peut-être 12 % en 2026.
Si vous appliquez un multiple élevé à ces chiffres, vous obtiendrez des gains inférieurs à 10 % sur le marché boursier. Si ces niveaux de bénéfices ne sont pas atteints, alors nous nous retrouverons probablement dans un marché boursier plus faible, peut-être même un marché baissier, parce que les attentes ne pourront tout simplement pas soutenir le niveau de valorisation. Bien sûr, il y a aussi une autre possibilité. Et je crois que c’est un scénario beaucoup plus attrayant, qui permettrait essentiellement de relancer le marché haussier. Dans ce scénario, la croissance des bénéfices commencerait enfin à s’accélérer en dehors des sociétés liées à l’IA.
Le marché américain des sociétés à petite et à moyenne capitalisation et les sociétés au Canada, en Europe et ailleurs n’ont pas enregistré une forte progression des bénéfices, car les sept magnifiques ont dominé les rendements. Cela explique pourquoi toute l’attention a été accordée à ce petit groupe d’actions.
L’économie se redressant, il est fort probable que les assises de la croissance des bénéfices s’élargissent et que les meneurs du marché migrent vers ces secteurs américains bien plus attrayants et les marchés hors des États-Unis. Je pense que c’est le scénario le plus favorable à un marché haussier renouvelé en 2025 et 2026. Cela témoigne aussi du grand risque qui existe si les bénéfices stagnent ou si seuls ceux des sept magnifiques restent positifs.
Comment positionnez-vous votre composition de l’actif dans ce contexte ?
En ce qui concerne les titres à revenu fixe, nous avons adopté une attitude beaucoup plus tactique que par le passé. Le marché a été très volatil. Il nous a offert de nombreuses occasions de profiter de la faiblesse des prix et de nous départir de certaines obligations à mesure que les prix devenaient plus élevés. Pour ce qui est des actions, nous avons été très préoccupés par la faiblesse de la prime de risque sur actions. C’est le rendement supplémentaire que vous obtenez en échange du risque que vous prenez de subir une perte sur actions et d’abandonner le marché des titres à revenu fixe, ou même les liquidités.
Nous pouvons voir comment ce marché haussier pourrait se maintenir. Toutefois, il faudra des preuves substantielles pour qu’il se poursuive. Dans ce contexte où nous prévoyons l’obtention d’un taux d’intérêt nominal légèrement supérieur à 5 % dans le volet à revenu fixe, et peut-être un peu plus du côté des actions, il est difficile de formuler un argument convaincant en faveur d’une catégorie d’actif plutôt que l’autre.
Par conséquent, nous sommes restés fidèles à notre composition neutre de l’actif à long terme, et nous recommandons aux clients de maintenir un minimum de liquidités, sans s’écarter toutefois de leur position neutre en obligations et en actions, quelle qu’elle soit.