Eric Lascelles commente la résilience surprenante de l’activité économique et souligne que les probabilités d’un atterrissage en douceur sont bonnes.
La marge bénéficiaire du S&P 500 montre des signes de stabilisation, laissant présager une possible reprise.
L’activité manufacturière se redresse aux États-Unis, qui s’éloignent d’une récession.
Les taux obligataires ont reculé à la fin de 2023, mais ils augmentent maintenant sous l’effet de la vigueur des données économiques
M. Lascelles traite également de la baisse des niveaux d’éducation aux États-Unis, de la période très chargée à venir sur le plan politique et bien plus encore.
Durée : 33 minutes, 54 secondes
Transcription
Bonjour et bienvenue à notre webinaire économique mensuel. Je m'appelle Eric Lascelles, je suis l'économiste en chef chez RBC Gestion mondiale d'actifs et je suis très heureux de partager avec vous mes dernières réflexions sur l’économie.
Le titre de cette présentation, «un atterrissage en douceur sous les feux de la rampe», vous donne une bonne idée de la direction que nous allons prendre.
Nous répétons depuis un certain temps que les chances d'un atterrissage en douceur augmentent. Les chances d'une récession ont donc diminué dans une même mesure. Et je peux dire qu'à l'heure actuelle, nous pensons que l'atterrissage en douceur, ou un scénario dans lequel l'économie continue de croître, est en fait plus probable qu'improbable.
Nous lui avons attribué une probabilité de 60 %. C'est donc une bonne nouvelle.
Notre bulletin de notes : Entrons dans le vif du sujet. Comme nous le faisons toujours, commençons par le bilan et nous jetterons un coup d'œil sur les bonnes et les mauvaises choses qui se passent dans le monde, avant d'en parler plus longuement au cours de cette présentation.
Pour commencer, comme je viens de le mentionner, les chances d'un atterrissage en douceur augmentent. C'est désormais notre scénario le plus probable. Nous lui avons donné 60 % de chances. À l'inverse, nous attribuons 40 % de chances à une récession. C'était le scénario dominant depuis quelques années, et il s'est donc estompé dans une certaine mesure.
Il n'a pas disparu, mais la probabilité est moindre. Pour ce qui est des éléments positifs qui soutiennent ce point de vue, un facteur serait l'activité manufacturière qui semble se redresser après plus d'un an de contraction. En temps normal, il n'y a pas de rebond lorsque l'économie est en difficulté. D'autres signaux de récession se sont également inversés, ce que j'évoquerai dans un instant.
Le profil fiscal en 2024 aux États-Unis semble meilleur. L'hypothèse par défaut aurait dû être celle d'un ralentissement budgétaire. Mais entre une loi de réduction des impôts qui pourrait être adoptée, une certaine marge de manœuvre pour les décrets et des dépenses généreuses qui pourraient provenir des États et des collectivités locales, la situation budgétaire des États-Unis en 2024, du point de vue de la relance, voire du déficit et de la dette, pourrait être un peu plus favorable que l'hypothèse de base.
Il y a donc des aspects positifs. Du côté négatif, je viens de mentionner que la récession est toujours possible. Même si ce n'est plus le scénario de base, un risque de 40 % est bien réel. Vous l’aurez deviné, nous sommes proches d’une probabilité d’une fois sur deux. On ne peut pas l'écarter complètement, même si la probabilité s'est quelque peu réduite.
Les taux d'intérêt restent assez élevés. C'est toujours l'argument le plus fort en faveur d'une période de faiblesse économique significative.
Je peux dire que la tendance à l'inflation ne s'améliore pas aussi rapidement qu'au cours de la seconde moitié de 2022 et d'une grande partie de 2023. Ce taux d'amélioration ralentit. Il semble que nous fassions un peu de sur-place et cela représente un défi pour les banques centrales.
Mentionnons par exemple que la Réserve fédérale américaine se trouve en moins bonne position pour réduire ses taux au cours des prochains mois. Elle parle de l’été, et ne pense plus sérieusement au printemps. La situation est la même pour la Banque du Canada et d'autres banques centrales, tandis que l'inflation s'avère un peu tenace que prévu.
Les économies résistent un peu mieux qu'on ne l'avait imaginé. Ces deux éléments plaident en faveur d'un ralentissement de la trajectoire de réduction des taux.
J'ajouterai ici quelques points intéressants. Il y en a même plus que quelques-uns, pour dire vrai. L'un d'entre eux, le fait de mentionner que 2024 est une année politiquement chargée.
Une plus grande part de la population mondiale participera à des élections nationales cette année. Et cela est dû, notamment, au fait que l'Inde, la plus grande démocratie du monde, tiendra des élections. Les États-Unis et d'autres très grandes démocraties, également. Même chose pour l'Indonésie, le quatrième pays le plus peuplé du monde. Beaucoup de grands pays tiennent donc des élections.
C’est le cas pour d'autres pays importants également. Nous suivons cela de très près.
Les élections américaines, bien sûr, attirent une attention particulière et il semble qu'il s'agira d'un affrontement entre Biden et Trump.
D'un point de vue fiscal, je l'ai mentionné plus tôt, les États-Unis bénéficieront peut-être d'un peu d'aide fiscale en 2024. Mais à moyen terme, les pays continuent d'enregistrer des déficits très importants.
Nous avons aujourd'hui des niveaux d'endettement élevés et nous pensons qu'il va falloir faire preuve d'austérité, d'autant plus que les taux d'intérêt se sont envolés. Nous supposons donc qu'un certain ralentissement budgétaire se produira, peut-être pas cette année, mais dans les années à venir.
La Chine est encore sous les feux de la rampe. L'économie chinoise sous-performe. Nous allons parler de l'immobilier chinois dans un instant.
Mentionnons que la Chine souffre actuellement de déflation, ce dont je parlerai dans un instant, et qui reflète en grande partie la faiblesse de l'économie et une situation de récession au niveau du bilan.
La démographie chinoise est en effet très difficile à gérer. En fait, la population pourrait n'être guère plus qu'un tiers de sa taille actuelle d'ici la fin du siècle, si le taux de fécondité actuel se maintient à l'avenir.
Enfin, nous parlerons du niveau d'éducation aux États-Unis, qui est en train de baisser légèrement, ce qui n'est pas habituel. Nous parlerons des raisons de ce phénomène et de ce qu'il pourrait signifier pour l'économie américaine.
Comme vous le voyez, il y a beaucoup à dire. Pourquoi ne pas commencer par revoir les probabilités de croissance ou d'absence de croissance à l'avenir.
Probabilités actualisées pour le scénario global 2024 : En ce qui concerne les États-Unis, notre économie de référence, nous pensons qu'un atterrissage en douceur est désormais plus probable. Nous lui donnons 60 % de chances. Cette probabilité était de 40 % il y a un trimestre, si vous tenez les comptes. Et pour expliquer cela, je vous montre ces éléments sous forme de graphiques à court terme.
En un mot, l'économie refuse de ralentir. D’abord, nous continuons à bénéficier d'une croissance économique en hausse. Deuxièmement, elle dépasse régulièrement les prévisions, ce qui laisse penser qu'il existe une dynamique particulière indéniable. Lorsque les données surprennent encore et encore, il serait mal avisé de ne pas en tenir compte.
Nous avons vu certains signaux de récession s'inverser, et j'en parlerai dans un instant.
À titre d'exemple, l’achat de biens de valeur aux États-Unis a commencé à se redresser. Ce signal de récession a disparu. Quelque chose de similaire s’est produit pour plusieurs autres signaux.
L'inflation a baissé. Peut-être pas autant ces derniers mois, mais certainement depuis plus d'un an.
Il s’agit d’un point de friction en moins pour l'économie. Même si la Fed et les banques centrales en parlent avec un peu moins d'enthousiasme qu'il y a quelques mois, il est probable que l'année en cours sera marquée par des baisses de taux. Il s’agit d’une période où les banques centrales ont maintenant le luxe de ne pas penser uniquement à l'inflation, mais aussi de commencer à penser un peu à soutenir la croissance et à éviter les écueils économiques.
Cela augmente donc les chances d'un atterrissage en douceur, la banque centrale pouvant venir à la rescousse en cas de besoin.
Bien sûr, lorsque vous avez 60 % de chances pour un certain résultat, cela signifie qu'il y a 40 % de chances pour un autre. Nous pensons qu'un atterrissage brutal, une récession, représente encore 40 % de chances. Cette probabilité a diminué par rapport à ce qu'elle était auparavant.
Mais cela demeure un chiffre important. Nous sommes dans une situation où deux scénarios sont encore tout à fait viables quant à l'évolution de l'économie. Si le premier est devenu un peu moins convaincant ces derniers temps, il demeure très réel. Demandons-nous pourquoi le risque d'atterrissage brutal persiste malgré l'absence de récession, et ce depuis bien plus d'un an maintenant.
Eh bien, une partie de la réponse vient du fait que nous constatons une véritable faiblesse dans d'autres économies mondiales, y compris deux trimestres consécutifs de déclin au Royaume-Uni, en Allemagne et au Japon, ce que certains appelleraient une récession technique. Certaines régions du globe souffrent donc réellement.
Des taux plus élevés doivent nécessairement faire mal. Voilà une croyance qui n'est pas sans fondement. Aux États-Unis, quelques soutiens sont en train de s'estomper.
En d'autres termes, nous pensons que les dépenses de consommation pourraient être un peu moins soutenues cette année. Et même si la situation budgétaire se maintient, l'aide sera un peu moins importante que l'année dernière. Cela modifie donc l'équation dans une certaine mesure.
N'oublions pas que nous avons assisté à de nombreux resserrements monétaires et à des hausses de taux au cours des dernières années, ce qui entraîne un décalage important.
Certains signaux de récession sont inchangés. En effet, nos travaux sur les cycles économiques indiquent qu'il y a de fortes chances que nous soyons encore à un stade avancé d'un cycle économique, ce qui suggère qu'un ralentissement est à venir.
Si vous êtes un peu confus et que vous avez l'impression que je me contredis, vous n’avez pas tout à fait tort. Nous sommes dans une période où nous recevons beaucoup de données contradictoires.
Il ne s’agit pas d’une époque où l'on peut parler de l'avenir avec beaucoup de précision ou d'assurance. Mais il existe quelques résultats à envisager. Le mieux est de le dire clairement. Ce n'est pas le moment de prendre des risques d'investissement agressifs, compte tenu de la diversité des scénarios envisageables.
D'accord, passons à quelques graphiques qui soutiennent le côté optimiste de l'équation.
Rebond de l'industrie manufacturière : Voici, à titre d'exemple, l'indice ISM (Institut de gestion de l'offre) de l'industrie manufacturière aux États-Unis. Vous pouvez voir qu'il était très faible. Il s'approchait des niveaux de récession. Puis quelque chose d'intéressant a commencé à se produire au cours des derniers mois. Il a commencé à rebondir timidement et ce rebond a même pris un peu d'élan.
Si vous regardez la ligne dorée, qui est la sous-composante des nouvelles commandes de l'indice, elle s'est récemment envolée avec enthousiasme, jusqu'à devenir positive ou supérieure à 50. Cela indique que ce secteur recommence peut-être à croître. Si cet indice n’a jamais été un signal absolu de récession, il indiquait au moins une certaine faiblesse et ce n’est plus le cas maintenant.
Marge bénéficiaire du S&P : Historiquement, chaque fois qu'il y a eu une baisse importante de la marge bénéficiaire du S&P 500, il y a eu une récession. Les récessions sont ces zones grises et on peut constater qu'à chaque fois qu'une baisse significative s'est produite au cours des 40 dernières années, il y a bien eu une récession.
Nous avons donc constaté une baisse significative. Vous la voyez à l'extrême droite, cette baisse des marges bénéficiaires. Pourtant, nous n'avons pas connu de récession. On commence en fait à voir cette mesure augmenter un peu, même si c'est en dents de scie. L'argument de la récession commence donc au moins à s'affaiblir.
Il commence à vaciller. Une récession n’est plus aussi évidente. Ce signal a peut-être été brisé au cours de ce cycle.
Normes de prêt : Quelque chose de très similaire, voire de presque identique. Lorsque nous parlons de normes de prêt, il s'agit de la volonté des banques de prêter, dans ce cas, à des clients commerciaux aux États-Unis. Vous pouvez voir que chaque fois que les normes de prêt se sont fortement resserrées et chaque fois que cette ligne a augmenté de manière significative, nous avons eu droit à une récession.
Les zones grises sont entrées en jeu. Vous pouvez voir que nous avons connu récemment un pic assez important, bien que pas aussi important que lors des dernières récessions. Mais chaque fois que nous avons connu un tel pic au cours des trois dernières décennies et plus, il y a eu une récession.
Cette fois-ci, il n'y a pas eu de récession, du moins pas encore. Et nous commençons à voir les normes de prêt s'assouplir à nouveau.
Vous pouvez voir cette pente descendante, qui se produit normalement à la fin d'une récession ou au début d'une reprise. Ainsi, un certain nombre de ces signaux cessent de nous indiquer qu'une récession est imminente. Ce n'est pas normal dans la mesure où cela ne s'est jamais produit auparavant. En ce sens, il s’agit d’une situation un peu frustrante, mais c'est ce que ces signaux nous disent.
Il faut en tenir compte.
Livraisons de véhicules de plaisance aux États-Unis : Je peux vous donner un autre exemple, si vous en redemandez. Il s'agit des livraisons de véhicules récréatifs. Ce graphique est assez curieux. Les données y étaient annuelles, puis elles sont devenues mensuelles. Il est donc instable ces dernières années.
Quoi qu'il en soit, l’histoire veut que deux années de baisses de suite dans les livraisons de véhicules de plaisance aient toujours mené à une récession. Eh bien, nous avons eu nos deux années de déclin et nous n'avons pas eu de récession. Aujourd'hui, vous pouvez voir que la ligne bleu foncé est en train de remonter. Il semble donc que les livraisons de véhicules de plaisance soient de nouveau en croissance.
Et nous n'avons tout simplement pas eu la récession annoncée. On peut dire qu’à l’heure actuelle, beaucoup de signaux de récession semblent avoir failli à leur tâche.
Cycles de resserrement monétaire : Ce point demeure un peu vague. Je fais ici une transition vers des éléments un peu moins positifs. Voici un historique du taux des fonds fédéraux et des agissements de la banque centrale aux États-Unis au cours des 60 dernières années.
Historiquement, on constate que les banques centrales augmentent les taux d'intérêt et qu'il y a ensuite une récession. C'est un schéma assez récurrent. Il est arrivé qu’il y ait des cycles de resserrement des taux sans récession. De ce que je me souvienne, on peut y voir que 10 des 13 cycles de resserrement ont abouti à une récession. On peut affirmer qu’en général, il y a récession, mais ce n'est pas toujours le cas.
Cela signifie donc qu'il devrait y avoir une récession, même si nous ne l'avons pas encore vue. Mais je tiens à apporter une nuance à cela. Je ne veux pas parler des trois fois où cela ne s’est pas produit, mais plutôt du fait que pour les trois derniers cycles, ceux en bleu, les plus à droite, les récessions n’étaient pas clairement liées à un cycle de resserrement des taux.
On peut se demander, par exemple, si les banques centrales ont augmenté leurs taux pendant la récession pandémique. La réponse est oui mais cette récession n'était pas due à cela. Elle était due à la pandémie et au confinement, et il s’agissait plutôt d’une coïncidence.
Lors de la crise financière mondiale, les banques centrales avaient-elles relevé leurs taux? Oui et en fait, les taux plus élevés ont sans doute contribué à ce que la bulle immobilière éclate.
Je ne voudrais donc pas suggérer qu'il y a eu une déconnexion totale. Mais en fin de compte, il s'agissait d'une crise financière mondiale. Il y avait un fossé entre ceux qui possédaient les actifs et ceux qui prenaient les décisions. Les produits titrisés se sont avérés problématiques et les banques ont pris trop de risques. Plusieurs facteurs ont joué dans la balance. Les taux d'intérêt sont passés d'un niveau bas à un niveau modéré.
Il y a eu des châteaux de cartes dans l'économie qui se sont effondrés et les banques ont failli à cet égard. L’histoire ne se résume pas qu’à des taux qui ont augmenté.
De même, au début des années 2000, nous avons connu la récession «dotcom». La bulle technologique a éclaté, et les attentats du 11 septembre ont aggravé la situation économique plus tard en 2001.
La hausse des taux d'intérêt a certainement fait partie de l'équation globale. Ils étaient peut-être un symptôme du fait que l'économie était en croissance depuis longtemps, qu'elle vieillissait, qu'elle devenait fragile, mais ce ne sont pas vraiment les taux d'intérêt plus élevés qui ont provoqué la récession. Il faut en fait remonter au début des années 1990, voire plus tôt, pour trouver une récession dont le moteur était plus classique : les taux ont été augmentés pour lutter contre l'inflation, et ces taux élevés ont tué l'économie.
Cela fait longtemps que nous n'avons pas connu ce genre de récession. Ça ne veut pas dire que les choses ne fonctionnent plus de la même façon. Mais il est peut-être plus sage de voir comment l'économie a changé en 30 ans que de s’attarder aux changements depuis 2020, lors de la dernière récession.
Il est donc un peu moins évident que des taux plus élevés provoquent une récession, alors que cela fait un certain temps que cela n’a pas été le cas.
J'espère que je ne vous ai pas trop embrouillés sur ce point.
Les taux obligataires restent élevés : N'oublions pas que les taux d'intérêt et les rendements obligataires ont beaucoup augmenté.
Il y a eu une belle baisse à la fin de 2023 et au début de 2024. Nous avons commencé à inverser cette tendance. Le fait est que les rendements sont actuellement très élevés par rapport aux normes des dernières années et même par rapport aux normes des 16 dernières années environ. Il y a donc encore de la souffrance à cause de cela.
Et en théorie, cette douleur s'accompagne d'un ralentissement. Ainsi, même en cas d'atterrissage en douceur, nous budgétisons une croissance économique inférieure à la normale. Mais pas une récession. Quoi qu'il en soit, nous pensons que la hausse des taux d'intérêt peut être douloureuse.
Étrange déconnexion internationale : J’attire votre attention sur un autre graphique qui risque peut-être de semer la confusion plus qu'il n'instruit.
Mais la situation est vraie pour le Royaume-Uni. Elle est vraie pour le Japon. Pour l'Allemagne. Et dans une moindre mesure, pour le Canada. Il existe un réel décalage. Et ce décalage s’illustre par deux tendances.
D'une part, l'économie américaine demeure exceptionnelle. Elle ne cesse de s’élever.
D'autres pays, en revanche, ont souffert.
Ils ont ressenti une certaine faiblesse. Le Canada a connu deux trimestres de baisse au cours de l'année écoulée, sans que l'on puisse vraiment parler de récession. Au Royaume-Uni, que vous voyez ici, en Allemagne et au Japon, les économies se sont contractées au cours de chacun des deux derniers trimestres. C'est ce qu'indiquent ces barres bleues foncées descendantes.
Certains diront que deux trimestres de déclin signifient une récession technique.
Pour ma part, je dirais que c'est le contraire d'une récession technique. Je dirais qu'il s'agit d'une règle empirique ou d'une simplification de la récession. Pour moi, une récession technique signifie que l'économie se contracte de manière significative, pas de manière infime. Le marché du travail souffre et les bénéfices des entreprises chutent. Il y a alors un recul des marchés.
D'habitude, tous ces facteurs se produisent en même temps et ce n’est tout simplement pas le cas cette fois-ci. Au Royaume-Uni, le PIB a baissé pendant deux trimestres et la croissance n'a pas été très forte par rapport à l'année précédente.
Cette ligne bleu clair représente le taux de chômage, inversé, et converti en écart-type, au risque de vous embrouiller un peu.
Mais la raison pour laquelle je vous la montre est simplement pour illustrer que ce qui est élevé est positif et ce qui est bas est mauvais. Si le PIB est bas, c'est mauvais. Le marché du travail est actuellement élevé. Il s’agit donc d’un point positif. En fait, le taux de chômage aux États-Unis et au Royaume-Uni est inférieur à la normale d'un écart-type complet. En d'autres termes, il est exceptionnellement bon en ce moment.
Il serait donc bizarre d'avoir en même temps un marché du travail très bon et une économie très mauvaise. J'aimerais bien avoir une explication toute simple et vous dire que c'est dû à tel ou tel facteur. Techniquement, on pourrait dire que la productivité est en baisse. Étonnamment, davantage de travailleurs font moins de travail.
Et cela ne peut être une situation viable à long terme. C’est pourtant ce que nous voyons, mais on peut se poser la question de l'œuf ou de la poule. C'est un peu un mystère.
Dans l'état actuel des choses, nous constatons la faiblesse de l'économie, mais elle ne semble pas s’être répercutée sur le marché du travail, sur le marché boursier, sur les bénéfices des entreprises, etc.
On se retrouve avec ce mystère. Il se peut qu’on réalise que l'économie s'est contractée, mais qu'elle n'a pas tout à fait atteint le seuil d'une véritable récession et que nous aurions évité le pire, sans pourtant que l'économie ne s’en porte bien entre temps.
C'est assez curieux. C'est tout ce que je peux dire.
Bon, passons à autre chose. J'espère que j’aurai une meilleure explication pour le point suivant.
Indicateur avancé du Conference Board des États-Unis : Parmi tous les indicateurs économiques, nous nous intéressons aux indicateurs de récession. L’un de plus pertinents est celui-ci. Il s'agit du Conference Board des États-Unis, qui est un indicateur avancé. Chaque fois qu'il a chuté de manière significative, on a connu une récession.
Vous pouvez voir sur ce graphique que chaque fois que la ligne baisse de manière significative, on aboutit dans ces zones grises, c’est-à-dire les récessions. Vous pouvez voir très clairement à l'extrême droite que nous avons vu une baisse, que nous n'avons pas encore connu de récession, mais que la ligne continue de baisser. Ce signal de récession n’a pas encore été démenti ou annulé.
Cet indicateur continue donc de dire qu'il devrait y avoir une récession à un moment donné. Ce risque est toujours réel.
De même, si l'on regarde cette mesure, il s'agit du taux de chômage aux États-Unis sur une très longue période, qui remonte à la Seconde Guerre mondiale. On y voit une tendance très claire : le taux de chômage atteint son niveau le plus bas avant les récessions.
Il n'y a pas beaucoup d'autres périodes où le taux de chômage est stable, si ce n'est juste avant les récessions. Il commence généralement à augmenter un peu, puis il y a une récession.
Ce que nous avons vu l'année dernière, c'est que le taux de chômage a clairement atteint son niveau le plus bas. La tendance s’est maintenant inversée et il a légèrement augmenté.
Il oscille dans un sens ou dans l’autre, mais il est en hausse par rapport à son niveau le plus bas. Chaque fois qu’un tel phénomène s’est produit dans le passé, il y a eu une récession en bout de ligne. Nous ne la voyons toujours pas, mais ce signal est toujours présent.
Le chômage aux États-Unis : Je dirais que ce signal repose sur une meilleure base théorique que la plupart des autres. L'idée est que lorsque le marché du travail est tendu, les choses se compliquent.
Il est difficile de faire tourner l'économie lorsque les salaires augmentent rapidement et qu'il y a peu de chômeurs. Normalement, lorsqu’on atteint ce point, on commence inévitablement à glisser dans l'autre sens et une récession vous ramène à la case départ, puis le déclin progressif recommence. Cette étude indique donc toujours qu'il existe un risque élevé de récession.
Des signaux de récession contradictoires : Nous avons rassemblé plusieurs notions dans un même tableau. Il s'agit d'un véritable fourre-tout. En fin de compte, nous disposons, je pense, de 13 données différentes qui sont toutes des signaux de récession. Nous essayons d'évaluer ce qu'elles racontent, et l'histoire est plutôt mitigée pour l'instant.
Une fraction significative d'entre elles continue de prédire une récession. Les trois premières sont des variantes d'une courbe de rendement inversée. Il s’agit d’un indicateur classique.
Il y a bien un petit sous-ensemble en hausse qui dit «non». Les demandes d'allocations chômage étaient en hausse. Ce n'est plus le cas. Les normes de prêt s'étaient resserrées. Comme je l'ai dit, elles se sont assouplies. Les prix du pétrole avaient grimpé.
Cela remonte à deux ans. Et quand ils augmentent à ce point, il y aurait normalement dû y avoir une récession, et ce n’a pas été pas le cas. Les prix du pétrole sont redescendus et ont en quelque sorte annulé ce signal. Les données sont donc très mitigées. Par défaut, tous ces signaux devraient dire «non».
Le fait que la majorité dise autre chose que «non» indique qu'il s'agit d'un environnement à risque élevé de récession. Il n'en reste pas moins que ces indicateurs ont eu tendance à s'éloigner du «oui» pour se rapprocher du «peut-être» et du «non».
Le risque de récession a donc diminué dans une certaine mesure.
Mise à jour du cycle conjoncturel : Dans le cadre de notre travail sur le cycle conjoncturel, nous mettons à jour ce tableau de bord tous les trimestres. J'ai déjà mentionné que nous avions près de 100 variables. En fait, il y en a un peu plus de 60. Désolé pour l’exagération quant à la précision de ce modèle.
Mais plus de 60 variables entrent en ligne de compte et on leur demande de nous dire où en sommes-nous dans le cycle économique ? Est-il précoce ? Est-il en retard ? Quelque part entre les deux ?
Et il semble que toutes ces variables prennent plaisir à toutes se mettre en désaccord. Je suppose que cela fait partie du charme de la chose.
Quelques indicateurs permettent de penser qu'il s'agit d'un «début de cycle», même si ce n'est probablement pas vrai. Quoiqu’il en soit, il y a bien deux conclusions à tirer.
La plus pessimiste est que les trois interprétations les plus probables parlent d'un «cycle avancé». Que l’on parle d’un «cycle tardif», d'une «fin de cycle» ou d’un début d'une récession, la situation est assez avancée et donc plutôt vulnérable.
C'est la meilleure estimation de la carte de pointage du cycle économique. Pour ce qui est du risque élevé de récession, il est fascinant de constater que la composante «début de cycle» située à l'extrême gauche commence à se développer. Elle s'est développée subtilement pendant quelques trimestres, puis elle a fait un véritable bond en avant au cours du dernier trimestre. Elle a en quelque sorte doublé son allocation.
Et on se retrouve maintenant avec un argument presque aussi fort pour le «début du cycle» que n'importe lequel des trois autres points populaires du cycle. Cependant, j'insiste à nouveau sur le fait que si l’on fusionne ces trois points à droite, la meilleure hypothèse demeure le «tardif». Par conséquent, un ralentissement pourrait se produire.
Mais certains indicateurs disent que nous avons dépassé ce stade, que nous sommes dans le prochain cycle et qu’on peut repartir de là. Il s'agirait là d'un argument en faveur d'un atterrissage en douceur. Il s'agit donc d'un bilan mitigé.
Je ne pense pas que nous allons clore ce débat aujourd'hui. Passons à autre chose. En conclusion : un atterrissage en douceur qui est très probable; un atterrissage brutal qui n’est pas impossible.
L'inflation mensuelle : Passons maintenant à l'inflation. La tendance de l'inflation a été globalement positive. Voici un graphique très accidenté de la tendance mensuelle de l'IPC (indice des prix à la consommation) américain. Vous pouvez constater que les résultats mensuels ne sont pas aussi mauvais ou élevés qu'ils l'étaient au milieu de l'année 2022. Nous avons fait du chemin.
Il est toutefois un peu troublant de constater que les chiffres mensuels ont légèrement augmenté au cours des derniers mois. Ainsi, l'IPC global et l'IPC de base sont un peu plus élevés en ce début d'année 2024 qu'ils ne l'étaient, disons, au milieu de l'année 2023. Ce n'est pas idéal.
Une grande part de cela, près des trois quarts de l'augmentation des prix en janvier, est due aux coûts de logement. Nous savons que le logement est une variable retardée qui devrait se stabiliser. Nous pouvons voir que les coûts du logement aux États-Unis diminuent. Cette variable devrait donc commencer à coopérer un peu mieux.
Mais de la même manière, les services autres que le logement continuent d'évoluer rapidement. Nous avons une inflation qui est redescendue mais qui demeure bloquée à environ 3 %. Il n'est pas automatique de conclure que l'on va se frayer un chemin jusqu'à 2 %. Comme nous sommes passés d'un atterrissage brutal à un atterrissage en douceur, nous avons revu nos prévisions d'inflation à la hausse.
Le chemin vers une inflation de 2 % ou même de 2,5 % n'est pas aussi facile. Nous pensons que cela prendra plus de temps. Nous pensons que c'est un peu plus chaotique. Les chiffres en temps réel de février semblent un peu meilleurs. Il est donc possible que nous obtenions une légère amélioration qui permette au moins d'interrompre la tendance à la hausse qui se dessine.
Nous pouvons nous consoler en constatant que les prix du gaz naturel en Amérique du Nord ont chuté de plus de la moitié depuis la fin de l'automne dernier.
Il s’agit d’un bon coup de pouce, c'est certain. Certaines choses vont dans le bon sens. Mais la résilience des économies est telle qu'il est un peu plus difficile pour l'inflation de redescendre.
En fin de compte, nous pensons que l'inflation peut se stabiliser à partir d'ici. Nous pensons qu'il s'agit d'un périple de plusieurs années, mais nous pensons que l'inflation est plus susceptible de baisser que d'augmenter, malgré quelques récentes tendances indésirables.
Les banques centrales : Cela nous amène aux banques centrales. Je pense que nous vous avons déjà montré un graphique de ce type. C'est l'un de mes graphiques préférés. Il montre les banques centrales du monde et ce qu'elles font. Ces dernières années, les banques centrales ont procédé à de nombreuses augmentations de taux, mais cette tendance s'est pratiquement arrêtée, à quelques exceptions près.
C'est maintenant l'ère de la ligne bleue qui commence. Vous pouvez voir en bas à droite que les banques centrales sont de plus en plus nombreuses à réduire leurs taux, et de manière disproportionnée chez celles des pays émergents. Celles-ci ont ouvert la voie, et c'est tout à leur honneur. Nous devrions donc leur prêter attention.
La ligne bleu foncé représente la différence entre les deux tendances. Elle indique que nous sommes maintenant dans un monde où les taux sont réduits, et non dans un monde où on les augmente.
Cela dit, il semble que cela se fera de manière prudente, du moins dans les pays développés. Les prévisions de baisses de taux pour le printemps sont devenues des prévisions de baisses de taux pour l'été. Avec une inflation qui s’avère un peu plus tenace et des économies un peu plus fortes, l'argument n'est pas aussi convaincant. Mais je crois toujours que ces baisses auront lieu.
Beaucoup de choses dépendent de l'évolution de l'économie. Si l'atterrissage se fait en douceur, il y aura probablement des baisses de taux, mais moins. Peut-être deux à quatre au maximum.
En cas d'atterrissage brutal, si la récession se produit, quatre baisses seront le minimum. Il pourrait y en avoir huit, voire davantage, selon la vitesse à laquelle on les effectue.
Il y a donc une série de résultats possibles. Pour l'instant, nous pensons qu'il pourrait s'agir d'une baisse des taux assez modeste, mais suffisante pour contribuer à la diminution des taux à court terme, à la diminution progressive des taux hypothécaires et à une légère diminution des rendements à long terme.
L'économie chinoise : Parlons de la Chine. J'ai quelques diapositives sur la Chine, alors allons-y.
Pour commencer, voici l'économie chinoise dans son ensemble, avec quelques éléments clés. Je tiens à souligner que l'économie chinoise est toujours en croissance. Le secteur manufacturier chinois se porte bien. Les exportations chinoises augmentent raisonnablement bien. S’il leur est de plus en plus difficile de vendre aux États-Unis et aux pays développés, la Chine est active dans ce que l'on appelle le commerce Sud-Sud.
Ils commercent avec d'autres pays émergents, notamment l'Amérique latine, l'Afrique et certainement l'Asie. La Chine est encore en pleine croissance, et certains pans de son économie semblent normaux.
Les ventes au détail augmentent. La croissance des ventes au détail n'est pas tout à fait normale dans la mesure où les consommateurs ont une grande partie de leur patrimoine immobilisé et où le secteur du logement est faible.
Ils ne dépensent donc pas avec leur enthousiasme habituel. Mais les ventes au détail augmentent malgré cela et malgré la diminution de la population.
Le véritable frein, cependant, comme on peut le voir ici, c'est le marché du logement. Les ventes de biens immobiliers se sont effondrées et les prix des logements chutent dans une certaine mesure. Les constructeurs en Chine sont pratiquement tous insolvables et indument endettés.
Il faudra du temps pour remédier à cette situation. Il n’existe pas de solution rapide. Il s'agit d'une sorte de récession du bilan dont il faut du temps pour sortir. L'histoire nous a appris qu’il faut à tout prix reconnaître ces pertes le plus rapidement possible et rendre les marchés liquides. C'est la leçon que le monde occidental a tirée de la crise financière mondiale.
Et c’est l'erreur qu'a sans doute commise le Japon dans les années 1990 lorsqu'il a été confronté à un problème similaire. Nous verrons ce que fera la Chine.
Pour l’instant elle semble adopter la même voie que le Japon, ce qui est assez préoccupant. D'autres parallèles entre la Chine et le Japon existent déjà, en termes de démographie, de déflation, de bulles immobilières, etc.
Mais je ne suis pas aussi pessimiste pour la Chine. Je crois en sa capacité de résoudre le problème, mais il est probable que le marché de l'immobilier restera assez modeste pendant un certain temps. Et il faut s’inquiéter de ce que le gouvernement chinois demeure sceptique à l'égard du secteur privé, lequel est normalement responsable des gains de productivité et de la richesse.
En ce qui concerne l'économie chinoise, nous prévoyons une croissance cette année. Nous pensons qu'elle sera de l'ordre de 4,5 %. Par rapport aux normes d'avant la pandémie, ce n’est pas terrible mais n'est pas si mal selon les normes actuelles. Et cette croissance est due à des mesures de relance budgétaire, dont certaines doivent encore être annoncées en mars. Au-delà de ça, nous pensons que la croissance de la Chine sera plutôt de l'ordre de 3 à 4 % par an.
La Chine n’est donc plus le moteur de croissance qu'elle a été.
La déflation chinoise : L'inflation chinoise est inexistante. Tout d'abord, la Chine a évité la flambée de l'inflation comme on l’a vu dans le reste du monde. Elle n’a pas pris de mesures de relance monétaire ou budgétaire, ni commis d'autres excès auxquels d'autres pays ont succombé et qui ont contribué à l'excès d'inflation.
En fait, dans une certaine mesure, la Chine a le problème inverse, puisqu'elle est tombée dans une légère déflation. Les prix y sont en baisse. Et les gens se demandent si cela pourrait nuire au reste du monde. Je ne pense pas que ce soit le cas. Pour moi, ce n’est pas le principal défi à relever. Simplement, cela reflète la faiblesse économique chinoise et le fait que la Chine a peut-être une offre excédentaire et une demande insuffisante.
C'est ainsi que l'on arrive à la déflation. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un phénomène permanent. La Chine peut réduire ses taux. Elle peut prendre des mesures de relance budgétaire. Certaines solutions peuvent être envisagées.
La Chine peut choisir d’importer une partie de l'inflation mondiale d'ailleurs. La monnaie peut s'assouplir et créer de l'inflation supplémentaire tout en améliorant la compétitivité du pays.
Je ne suis donc pas convaincu que cela persiste longtemps, mais je dirai que la Chine est sur une trajectoire d'inflation lente et que cette situation va durer encore un peu.
La population chinoise : Un autre point fascinant à propos de la Chine. Nous savons que la population chinoise en âge de travailler diminue depuis des années. La population globale de la Chine a commencé à diminuer l'année dernière. C’est donc assez récent.
On peut spéculer quant à ce qu’en sera la démographie chinoise à partir de maintenant. L’ONU a cherché à le faire. Elle propose plusieurs scénarios, plusieurs variantes, comme elle dit. Dans la variante du taux de fécondité constant, on peut voir que même si le taux de fécondité se maintenait aux niveaux récents, la population chinoise chuterait de 1,4 milliard à moins de 600 millions d'ici la fin du siècle, ce qui est tout à fait étonnant.
Il s'agit d'un effondrement de plus de la moitié de la population. Je pense même que cela sous-estime l'ampleur de cette baisse de la population. On n’a qu’à regarder le niveau du taux de fertilité depuis que les Nations Unies ont établi ce rapport. Ils le font tous les deux ans, et cela fera bientôt deux ans. Et le taux de fécondité s'est complètement effondré depuis.
Il est tombé à 1,0. Chaque génération est moins de la moitié de la taille de la précédente. Il faut en tenir compte. C'est la ligne beige au bas du graphique. Je ne serais pas surpris que cela s'avère prémonitoire.
Dans ce scénario, la population chinoise ne serait que de 488 millions d'habitants à la fin du siècle.
Une chute extraordinaire. Mentionnons que la Chine ne pratique pas l'immigration, et il n'y a donc pas de soupape de sécurité. Le pays est si grand qu'il serait impossible d'importer suffisamment de personnes pour faire bouger les choses sur ce front.
Il est fascinant de comparer la Chine aux États-Unis. Non pas que les États-Unis soient une grande puissance d'un point de vue démographique, mais la population américaine approchera probablement les 400 millions d'habitants d'ici la fin du siècle. C'est donc une population presque équivalente à celle de la Chine, ce qui n'est évidemment pas du tout le cas aujourd'hui.
La Chine est plus de quatre fois supérieure aux États-Unis à l'heure actuelle. L'Inde aussi. Mais ça, c’est une autre histoire. C'est donc un véritable défi.
Impossible de surestimer l'effet de cette situation sur l'économie. Il est évident qu'il est important. Je ferai remarquer qu'historiquement, lorsque la Chine connaissait une croissance de 6, 8 et 10 % par an, elle tirait 1 à 2 % de sa croissance de la démographie.
Elle tirait les autres 4, 6 et 8% de la croissance de sa productivité. Même avec une main-d'œuvre qui diminue, la Chine pourrait bénéficier d'une croissance rapide si sa productivité continuait d’être forte.
Cela dit, la Chine s'enrichit. Mais dans une certaine mesure, la Chine a tourné le dos au secteur privé et il est donc difficile d'imaginer que la productivité puisse sauver la situation.
Sur ce plan aussi, la Chine avance beaucoup plus lentement qu'auparavant. D'un point de vue géopolitique, on peut également se demander si la population est révélatrice de la puissance militaire et de l'appétit pour les ressources, et donc du besoin de contrôler d'autres États. Cela donne à la Chine une image quelque peu amoindrie. Très bien.
Le déclin du capital humain aux États-Unis : Terminons par un sujet différent. Un point qui pourrait jeter un peu d'ombre sur les États-Unis, et qui est quelque peu préoccupant. On peut dire que le capital humain américain commence à s'effriter.
On imagine mal l’ampleur. Le capital humain est un capital physique; il s'agit de la capacité qui existe en chacun de nous.
Le niveau d'éducation des Américains est en train de baisser légèrement. On peut l'observer de différentes manières, mais ce graphique l'illustre assez bien. Le pourcentage d'Américains qui vont directement à l'université après le lycée a sensiblement baissé. Il est passé de 70 % à 62 % en l'espace d'environ huit ans.
D'autres mesures montrent qu'il ne s'agit pas seulement de personnes qui prennent une année sabbatique ou quelque technicalité de ce genre. Il semble que ce déclin est bien réel. Les niveaux d'éducation baissent, et le capital humain baisse aussi en théorie.
Pour ce qui est des raisons de ce phénomène, nous pensons que la pandémie est en partie responsable du fait que les gens ne veulent tout simplement pas payer pour une éducation en mode virtuel.
Et comme le marché du travail s’est avéré si dynamique après la pandémie, il était peut-être moins judicieux de rester à l'école. Certains ont pu gagner un bon revenu dès la fin de leurs études secondaires.
Nous pensons qu'une partie de ce phénomène s'estompera avec le temps. Mais ce n'est probablement pas le cas de la plupart d'entre eux. Vous pouvez constater que cette tendance a commencé avant la pandémie et qu'elle s'est poursuivie après.
Et aux États-Unis, au moins, il semble que cette tendance soit en partie due au fait que les frais de scolarité sont très élevés à l'heure actuelle. Peut-être qu’ils changeront de cap et modifieront la façon dont les frais de scolarité sont facturés ou dont l'éducation est payée, et peut-être que l'équation en sera changée. Mais en attendant, cela représente un frein à la productivité et à l'économie américaines.
Les États-Unis ont toujours été exceptionnels en attirant certains des plus brillants candidats, des lauréats du prix Nobel, des entrepreneurs, des PDG, etc. Cette superclasse de capital humain peut peut-être continuer à faire progresser l'ensemble de l'économie, mais cette tendance est moindre que celle de l'Américain moyen qui est de moins en moins éduqué.
Bon, je termine sur une note un peu amère, mais c'est ainsi. Voilà ce que j’avais à dire aujourd’hui. Je vous remercie pour le temps que vous m'avez accordé. Si vous avez trouvé cela intéressant, n'hésitez pas à nous suivre en ligne sur Twitter, aujourd'hui X, ou sur LinkedIn. Vous pouvez également vous rendre directement sur notre site Web, à l'adresse «rbcgam.com», et visiter l'onglet «perspectives».
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