Eric Lascelles, économiste en chef, nous fait part de ses perspectives de récession pour 2024, discute de la reprise potentielle du marché canadien du logement et examine si les risques d’inflation ont diminué.
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Transcription
Quelles sont les perspectives de récession en 2024 ?
Pour ce qui concerne 2024, nous sommes toujours d’avis qu’un atterrissage brutal est à prévoir. Nous estimons qu’il est plus probable qu’improbable qu’une récession survienne. Et nous pensons que les risques qu’une telle récession survienne sont de 70 % en ce qui concerne l’Amérique du Nord et une grande partie du monde développé. Bien évidemment, sur un strict plan mathématique, cela signifie que les chances qu’un atterrissage en douceur se produise sont de 30 %.
Cette possibilité existe bel et bien. Nous sommes simplement d’avis qu’elle est moins probable. Et pour nous, la probabilité qu’une récession survienne est liée aux taux d’intérêt qui, malgré une récente reprise, sont beaucoup plus élevés qu’ils ne l’étaient il y a un an. Beaucoup plus élevés que les niveaux auxquels nous avons été habitués au cours de la dernière décennie, et d’un niveau tel qu’ils peuvent manifestement en eux-mêmes provoquer une contraction économique. Nous examinons très attentivement divers paramètres que nous utilisons pour mesurer le risque de récession, comme les courbes de rendement inversées et d’autres signaux traditionnels qui laissent également entrevoir une récession.
De la même façon, l’analyse que nous faisons du cycle économique montre que celui-ci est déjà largement entamé de telle sorte que se pose également à cet égard un risque de baisse. Nous sommes d’avis qu’il est plus probable qu’improbable qu’une récession survienne. Je devrais souligner, en guise de mise en garde, que nous pensons que cette récession sera relativement peu prononcée. Nous croyons qu’elle pourrait être relativement courte. Nous considérons que les conséquences sur le plan de l’emploi pourront être moins marquées que normalement puisque les entreprises s’emploieront à conserver leurs employés, après avoir eu du mal en matière de recrutement.
On pourrait par ailleurs avancer qu’il s’agit là de la récession la plus attendue de l’histoire, ce qui pourrait justement limiter l’ampleur des dégâts sur d’autres fronts. Cependant, en définitive, les récessions laissent toujours des traces. Elles sont douloureuses pour les économies. Elles sont également traditionnellement douloureuses pour les marchés. Nous nous préparons à connaître certaines difficultés en 2024.
Q2 – L’économie mondiale va-t-elle croître en 2024 ?
Chaque fois que nous parlons de l’économie mondiale, nous devons véritablement considérer celle-ci en la scindant entre le monde développé et les marchés émergents. Du côté du monde développé, nous nous attendons à ce que survienne une récession dans la majorité des pays développés. Je dirais qu’à l’exception des États-Unis, nous pensons qu’elle pourrait être un peu plus marquée.
Les États-Unis montrent un peu plus de résilience que le Canada, le Royaume-Uni et la zone euro, même si cette économie n’est probablement pas à l’abri. Dans une certaine mesure, ces économies connaissent déjà des difficultés et nous n’anticipons pas de croissance particulièrement fiable dans ces régions, même sur l’ensemble de 2023. Du reste, ces régions sont un peu plus sensibles aux taux d’intérêt de telle sorte qu’il s’agit là d’une conclusion logique.
Nous sommes d’avis que des difficultés sont à prévoir sur ces fronts. Et nous pouvons observer un ralentissement des attentes des entreprises. Par ailleurs, les dépenses de consommation commencent à s’atténuer tandis que les marchés du travail, s’ils se maintiennent encore, sont beaucoup moins robustes que jadis. Sur ce plan, nous prévoyons une certaine faiblesse. Si la situation des marchés émergents est similaire, elle est aussi différente.
Elle est similaire dans la mesure où, lorsqu’une certaine faiblesse peut être observée dans une partie du monde, cela a généralement une incidence quelconque sur le reste du monde. Cependant, il demeure moins probable que la majorité des pays émergents se contractent. Tout cela témoigne d’un scénario anticipé pour 2024 qui devrait donner lieu à une croissance légèrement inférieure à la normale.
Le taux de croissance économique de ces pays est généralement un peu plus élevé. Lorsque nous pensons à certains des principaux marchés émergents, manifestement, la Chine nous vient tout de suite à l’esprit. Il y a fort à parier que l’économie chinoise poursuivra une forme de reprise en 2024. Elle suit son propre parcours après avoir été confinée en 2022 et elle a amorcé ce qui pourrait constituer une forme de reprise cette année. Nous sommes d’avis que demeure une marge de manœuvre à l’égard de la reprise et que les mesures de relance sont suffisantes pour que la Chine soit plutôt une source de bonnes nouvelles que de mauvaises nouvelles, à tout le moins à court terme.
Vient ensuite l’Inde, qui s’est véritablement imposée et qui a connu une forte croissance : il s’agit désormais du pays le plus peuplé du monde, qui vient à peine de dépasser la Chine à cet égard. Et l’Inde devrait connaître selon nous une relance lente mais relativement progressive en 2024. Pour ma part, j’estime que l’aspect le plus intéressant en ce qui concerne l’Inde, si nous prenons peut-être la peine de prendre du recul par rapport aux perspectives sur un an et que nous nous attardons aux perspectives sur cinq ans, en nous demandant d’où proviendra la croissance mondiale au cours des cinq prochaines années, est que la Chine se classera encore au premier rang.
Elle devrait vraisemblablement représenter environ le quart de la croissance mondiale, ce qui, soit dit en passant, est inférieur à la proportion qui était la sienne au cours de la dernière décennie, bien que cette proportion demeure énorme. Et au deuxième rang, il y a fort à parier qu’on ne retrouvera pas les États-Unis, mais plutôt l’Inde. L’Inde pourrait devenir le deuxième moteur de la croissance mondiale au cours des cinq prochaines années. L’Inde devient donc une région vraiment importante et il s’agit là d’une réalité dont les investisseurs commencent à prendre conscience.
Si nous poursuivons sur ce thème, et simplement pour conclure, je dirais, et cela est difficile à croire, que les pays émergents devraient générer plus de 80 % de la croissance mondiale au cours des cinq prochaines années. Si nous parlons énormément de pays tels que les États-Unis, le Canada et d’une région comme l’Europe, nous devons également accorder énormément d’importance au reste du monde, puisque c’est de là que proviendra la croissance, c’est de là que proviendront les bénéfices et c’est là où se trouveront également les possibilités en termes de marché.
L’économie américaine évitera-t-elle une récession ?
L’économie américaine a certainement fait preuve d’une plus grande résilience en 2023 que pratiquement n’importe quel autre pays développé du monde. Les États-Unis sont parvenus à maintenir un taux de croissance annualisé de 5 % au troisième trimestre, ce qui est bien meilleur que n’importe quel autre pays. Jusqu’à présent, les États-Unis ont plutôt bien fait face à la situation. Cependant, je pense que ce que nous devons noter est que nous commençons là aussi à relever des indices d’incertitude.
Ainsi, à titre d’exemple, les attentes des entreprises sont plutôt sombres et les dépenses de consommation, bien que ce secteur eût constitué une source de vigueur au cours des dernières années, commencent à montrer des signes inquiétants. Nous observons qu’une grande partie des dépenses sont effectuées au moyen de cartes de crédit. Nous notons également que le taux de délinquance des cartes de crédit commence à augmenter. Les consommateurs disposent d’un peu moins de marge de manœuvre pour continuer à dépenser, et la situation est tout à fait similaire du côté du marché du travail alors que, bien que l’embauche se poursuive, elle connaît indiscutablement un certain ralentissement.
Et certains des indicateurs connexes, comme l’emploi temporaire et le chômage des jeunes, pour citer des facteurs de ce genre, commencent à se détériorer d’une manière qui nous laisse entrevoir que se profilent probablement à l’horizon certains signes de faiblesse. Les mesures de stimulation budgétaire ont constitué l’une des grâces salvatrices de l’économie américaine en 2023. Et, alors que nous établissons un lien avec 2024, nous commençons à observer certains indices de freinage fiscal.
Je pense que ce qu’il y a lieu de retenir en ce qui concerne les États-Unis est qu’il y a fort à parier que ce pays sombrera tout de même dans la récession, réalité dont nous pensons qu’elle devrait être celle d’une multitude de pays développés, bien que cette récession pourrait, dans ce cas-ci, être légèrement moins forte qu’elle ne le sera dans d’autres pays, du simple fait que l’économie américaine est actuellement moins sensible aux taux d’intérêt à cause de pratiques prévoyant notamment des prêts hypothécaires sur 30 ans et un endettement des ménages moindre, pour ne citer que ce genre de facteurs.
Mais cela ne permettra probablement pas d’éviter un tel dénouement. Du reste, certains des aspects qui sont venus à la rescousse des États-Unis en 2023 pourraient être un peu moins utiles en 2024.
Le marché immobilier canadien se redressera-t-il en 2024 ?
Le marché immobilier canadien a connu de véritables montagnes russes au cours de ces dernières années. Il y a bien évidemment eu le boom de la pandémie, alors que les taux étaient très bas et que chacun passait énormément de temps chez lui. Une véritable crise est survenue en 2022 alors que les taux d’intérêt ont commencé à augmenter, selon ce qui constitue en quelque sorte le scénario classique.
Un étrange redressement est ensuite survenu au premier trimestre de 2023, dont j’estime qu’il s’explique en partie du fait de facteurs saisonniers et en partie du fait que les propriétaires ne mettaient pas en vente leur propriété. A donc été observée une pénurie sur le plan de l’offre pendant un certain temps. Cet environnement a commencé à se corriger et nous en sommes revenus à une situation de faiblesse. Nous observons actuellement un certain ralentissement et les ventes de maisons existantes reculent quelque peu.
Le prix des maisons est en légère baisse. Nous nous appuyons sur l’hypothèse selon laquelle le marché immobilier canadien devrait encore connaître quelques années de difficultés, notamment en ce qui concerne le prix des maisons. Nous ne prévoyons cependant pas pour autant que le prix des maisons chutera au rythme de la chute observée en 2022. En effet, cette chute a été relativement prononcée. Nous tenons pour acquis qu’une période de stagnation sera suivie d’une période de baisse au cours des prochaines années.
Et la principale raison tient au fait que l’accessibilité continue toujours à laisser à désirer. La situation est bien pire que ce qu’elle n’était avant la pandémie. Et elle n’était pas formidable avant la pandémie. Sur ce plan, nous observons toujours un écart marqué. Bien évidemment, les taux hypothécaires constituent une partie de la réponse et, même si les taux hypothécaires, j’entends par cela les taux affichés, ne devaient pas augmenter encore ou devaient commencer à baisser, la réalité est que beaucoup de gens renouvelleront leur hypothèque au cours des prochaines années.
Et les cohortes de 2025 et de 2026 sont en soi très intéressantes. Il est utile d’y porter attention puisqu’il s’agit là de gens qui ont bénéficié de taux hypothécaires extrêmement bas lorsqu’ils ont bloqué leur taux la dernière fois, et que ces mêmes gens devraient être confrontés à des taux beaucoup plus élevés au moment de leur renouvellement. Ce qui signifie que les prochaines années devraient demeurer difficiles.
Nous savons que la croissance démographique est rapide et que l’immigration est forte. Si l’on souhaite adopter une approche optimiste à l’égard du marché immobilier canadien, on pourrait considérer qu’il s’agit là du meilleur investissement que l’on puisse faire. J’aimerais simplement dire que, lorsqu’on s’intéresse à l’impact de la croissance démographique sur le prix de l’immobilier, si cet aspect est utile, il est néanmoins moins marqué que ce que l’on croit généralement.
Nous continuons néanmoins de croire que l’accessibilité et les taux d’intérêt suffisent probablement pour maintenir la situation à un niveau acceptable. Et en effet, traditionnellement, dans les pays développés, les crises immobilières moyennes durent quelques années. Il ne s’agit pas là généralement d’un phénomène qui ne dure qu’un an. Nous tenons donc pour acquis que les prix des maisons seront à la baisse. La situation sur le plan de la construction est un peu plus nuancée dans la mesure où ce pays connaît en effet une forte croissance démographique.
Il faut plus de construction. Certaines contraintes en termes de zonage et d’autres restrictions doivent être prises en compte, sans compter le fait qu’il est extrêmement onéreux à l’heure actuelle de construire, compte tenu du coût du financement et de la disponibilité de la main-d’œuvre. Mais nous estimons que nous observerons tout de même un niveau de construction acceptable et que peut-être même ce niveau sera-t-il tout à fait approprié au cours des prochaines années.
De sorte qu’entre la situation des prix et celle de l’offre, on observe un contraste relativement marqué.
L’économie chinoise va-t-elle se redresser, au vu des défis touchant le marché immobilier et le ralentissement de la croissance ?
Nous estimons que l’économie chinoise pourrait connaître une forme de reprise en 2024 mais que celle-ci pourrait être plutôt modérée. Et la raison pour laquelle nous employons le qualificatif « modéré » s’explique en partie du fait qu’une bonne partie du reste du monde pourrait en effet se retrouver dans une situation plus délicate. La Chine ne pourra pas véritablement compter sur de l’aide provenant de la demande étrangère.
Mais nous pouvons aussi évoquer le marché immobilier chinois, qui a été un pôle important de stabilité au cours des dernières décennies, ce qu’il n’est tout simplement pas actuellement. Les prix de l’immobilier chinois sont stables, si ce n’est inférieurs. Un certain nombre de constructeurs sont techniquement insolvables et ne sont tout simplement pas en mesure de poursuivre leurs activités. Le logement compte pour beaucoup en Chine et ce secteur représente environ un quart de l’économie.
Cette proportion est beaucoup plus importante que dans la plupart des économies, et représente près de 80 % de la richesse des ménages. C’est là que les ménages investissent leur argent. Lorsque le prix de l’immobilier stagne et qu’il n’y a pas énormément de confiance envers ce marché, cela jette un froid plus généralisé. De sorte, encore une fois, que si nous sommes d’avis que pointe à l’horizon une reprise du simple fait que la Chine a été confinée pendant un certain temps, cette reprise devrait être modérée car la situation du logement n’aidera pas autant que d’habitude.
Je pense qu’il est utile de développer cet aspect et de faire porter notre regard au-delà de la prochaine année, en soulignant que, dans une perspective à moyen terme, la Chine se retrouve dans une situation différente de celle qui a été la sienne au cours des dernières décennies. La Chine a longtemps été un pays qui pouvait connaître une croissance annuelle de 6 %, 8 %, voire 10 %, ce qui était en soi tout à fait remarquable. Et la Chine ayant mûri et s’étant enrichie, il n’est simplement plus possible d’envisager de tels taux de croissance.
Nous tenons pour acquis qu’un taux de croissance annuel de 3 % à 4 % constituera la nouvelle normalité pour la Chine. Voilà qui représente un recul important. Cette réalité s’explique en partie par des raisons bénignes, comme le simple fait que la Chine est devenue plus riche et que les pays riches ne connaissent pas une croissance aussi rapide que les pays moins riches. La situation s’explique également en partie du fait que la Chine a connu une bulle immobilière qui s’est échelonnée sur une période de plusieurs décennies et dont je dirais qu’elle est en voie de prendre fin, ce qui constitue en soi une bonne chose, bien qu’elle prenne fin d’une façon qui n’appuie plus autant la croissance.
La réalité tient également à certaines données démographiques difficiles, peut-être aussi à une baisse de la croissance de la productivité, au vu de la préférence avouée pour l’État en lieu et place du secteur privé, et du fait de certaines frictions géopolitiques. Nous nous attendons donc à une croissance annuelle de 3 % à 4 %, qui sera décevante par rapport aux normes chinoises, mais qui demeurera néanmoins bien meilleure que celle de la majeure partie du monde développé et qui suffira pour générer environ le quart de la croissance mondiale. La Chine demeure donc un joueur actif et qui occupe une place importante, mais qui pourrait ne pas croître aussi rapidement que nous y sommes habitués.
Quel est l’impact des déficits budgétaires importants des gouvernements ?
De nombreux pays du monde connaissent actuellement des déficits budgétaires très importants, et ce, dans une mesure inhabituelle, puisqu’il s’agit du genre de déficits que l’on pourrait normalement associer au pire trimestre d’une récession. Cependant, ces gouvernements enregistrent ces déficits budgétaires à un moment où l’économie demeure encore bien vivante, à tout le moins pour le moment. Ceci n’est pas normal.
À certains égards, on pourrait considérer que ce phénomène résulte de la pandémie. On pourrait aussi considérer que les gouvernements se sont mis à dépenser de plus en plus et qu’ils se sont par ailleurs montrés réticents à hausser les impôts. Telle n’est pas actuellement la principale préoccupation des marchés, dans la mesure où ces derniers se demandent présentement si une récession surviendra, à quel niveau se retrouvera l’inflation et ce qu’est un taux d’intérêt normal. Voilà ce qui se retrouve actuellement au centre des préoccupations.
Cependant, à mesure que nous émergeons et que nous commençons à trouver des réponses à ces questions, il me semble que nous pourrions fort bien voir l’attention se tourner davantage vers les affaires budgétaires en reconnaissant qu’une telle proposition n’est tout simplement pas viable. Et les pays vont devoir recourir à une certaine forme d’austérité pour rétablir la situation. Du reste, le marché obligataire est plus sensible aux enjeux budgétaires, et ce, d’une manière qui ne semblait tout simplement pas pertinente durant la dernière décennie.
Il s’agit là d’une chose qui sera très difficile pour ces pays, en partie du fait qu’en résulteront notamment certaines difficultés économiques et en partie parce que les demandes en matière de fonds publics sont actuellement très nombreuses. Sans doute plus nombreuses qu’à l’habitude. De telle sorte que nous nous retrouvons dans un monde de populations vieillissantes qui coûtent cher. Dans un monde où énormément d’argent est consacré aux efforts d’atténuation du changement climatique et à ce genre d’initiatives.
La politique industrielle revient à la mode et elle est très onéreuse. Les dépenses militaires augmentent et on s’attend à ce qu’elles augmentent encore. Nous vivons dans un monde dangereux. Et le coût du service de la dette a bien évidemment augmenté en raison de la hausse des taux d’intérêt. La situation est manifestement délicate. Il sera difficile de réduire ces déficits. Je pense néanmoins qu’il faudra s’y attaquer et que, pour y parvenir, les pays qui ont peut-être enregistré les déficits les plus importants devront réduire quelque peu leur croissance.
Énormément de pays sont touchés. Les États-Unis font partie de ce groupe. Une bonne partie des pays européens se retrouvent dans cette position, de même que certains pays émergents. Je pense que tel pourrait être le prochain sujet de préoccupation du marché une fois que nous aurons répondu à cette question qui touche la survenue ou non d’une récession.
Les risques d’inflation ont-ils diminué ?
La bonne nouvelle en ce qui concerne l’inflation est qu’elle a en soi considérablement reculé au cours de la dernière année, voire depuis un peu plus longtemps. Des risques subsistent cependant et je dirais en effet que les risques sont davantage à la hausse qu’à la baisse. Subsistent encore des scénarios en vertu desquels nous nous retrouverions coincés à un niveau plus élevé que nous le souhaiterions.
Nous sommes très attentifs à cette situation. Simplement en ce qui concerne les prévisions à long terme concernant l’inflation, pour autant que nous estimions que l’objectif de 2 % est tout à fait atteignable à long terme, je reconnais que nous avons fait état de l’existence d’un risque distinct en vertu duquel le niveau d’inflation serait un peu plus élevé que cela. Et nous estimons que le changement climatique constitue un déterminant à long terme d’une inflation un peu plus élevée, tandis que la démondialisation qui semble se produire actuellement présente également un caractère légèrement inflationniste. On pourrait aussi avancer que même le fait que les travailleurs acquièrent actuellement un léger avantage sur les entreprises, après que l’inverse eut été le cas si longtemps, pourrait également présenter un caractère légèrement inflationniste.
Il existe indiscutablement de nombreux risques à la hausse qu’il convient de reconnaître. Cependant, je tiens à souligner que nous estimons également qu’il se pourrait fort bien que l’inflation recule encore un peu plus à l’avenir. Nous avons fait preuve d’un léger optimisme en ce qui concerne l’inflation et sa trajectoire descendante. Et nous sommes d’avis que les quatre principaux catalyseurs d’une inflation élevée se sont inversés. En effet, le choc au niveau des matières premières s’est inversé, les problèmes liés aux chaînes d’approvisionnement se sont largement estompés, tandis que les banques centrales ont multiplié les mesures de relance et qu’elles font désormais preuve de retenue.
Et il faut aussi parler des politiques budgétaires, qui sont un peu difficiles à saisir ou qui ne sont pas aussi généreuses qu’elles l’étaient. Il nous semblerait donc logique que l’inflation recule. Nous observons aussi que la masse monétaire se contracte actuellement, ce qui constitue un excellent indice d’un recul de l’inflation. L’ampleur de l’inflation s’est considérablement réduite. Au pire de la situation, 30 % du panier des prix augmentait à un taux à deux chiffres.
Aux États-Unis, la situation concerne actuellement 1 % du panier des prix, le niveau n’étant pas beaucoup plus élevé au Canada. À cet égard, nous avons noté d’importantes améliorations. Nous pensons donc qu’il y a d’autres gains à réaliser, bien que nous ne puissions pas, à tout le moins à court terme, retrouver un niveau de 2 %. Ce processus déjà engagé se poursuit. Certains mois seront agités. Enfin, la croissance des salaires continue d’évoluer d’une manière qui complique cet effort.
Nous tenons pour acquis que quelques cicatrices subsistent. Le simple traumatisme lié à une inflation élevée fait en sorte qu’il faudra compter un peu plus de temps pour revenir à la situation antérieure. De sorte qu’en vérité les perspectives économiques et liées à l’inflation sont probablement un peu plus incertaines que d’habitude. Enfin, nous devons reconnaître que nous n’avons pas en l’espèce toutes les réponses. Nous pourrions rester coincés à un niveau plus élevé en vertu de divers scénarios bien qu’il y ait fort à parier que nous puissions observer l’inflation continuer à baisser, à tout le moins au cours de l’année prochaine.
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