À quoi faut-il s’attendre de la Fed ? Dagmara Fijalkowski, chef, Titres mondiaux à revenu fixe et devises, se penche sur la durée possible de ce cycle de hausse des taux. Dan Mitchell, gestionnaire de portefeuille, analyse les effets que pourraient avoir ces hausses sur la vigueur du dollar américain.
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Combien de temps durera ce cycle de hausse des taux ?
Comme les banques centrales ont déjà relevé leurs taux quelques fois, la question est maintenant de savoir combien de hausses subséquentes il y aura durant ce cycle. La Fed augmentera son taux directeur jusqu’à atteindre, au minimum, ce qui est considéré comme un taux neutre pour les fonds fédéraux. Cela dit, il arrive souvent que les banques centrales s’aventurent au-delà, c’est-à-dire en territoire restrictif. On appelle le taux plafond d’un cycle le « taux final ». Le taux final est donc plus élevé que le point neutre, mais on ne le sait qu’après coup. Plus précisément, une fois que la Fed aura atteint son taux final, elle aura retiré trop de liquidités de l’économie ou cette dernière ralentira jusqu’à sombrer dans une récession. La banque centrale devra ensuite faire marche arrière et procéder à des réductions.
En 2019, sept mois après la dernière hausse, la Fed a baissé son taux de 25 points de base à trois reprises. Il faut toutefois noter que le taux neutre des fonds fédéraux ne constitue qu’une estimation. Ces données accompagnent la publication des autres prévisions de la Fed. C’est ce que j’examine en premier. Le taux a récemment été abaissé à 2,375 % après avoir été de 2,5 % pendant près de trois ans.
De son côté, le taux neutre de la Banque du Canada se situe entre 2 % et 3 %, mais tend vers 3 %. Le taux final et le taux neutre des fonds fédéraux constituent des indicateurs importants pour déterminer à quel moment la liquidation des obligations est allée trop loin. Lorsque les taux à dix ans atteindront le niveau neutre des fonds fédéraux selon nos estimations, il sera temps de racheter, au minimum, les positions vendeur. D’ici à ce que les fonds fédéraux atteignent leur taux final, c’est sans contredit le moment de prendre des positions acheteur.
À la fin d’un cycle de hausse, les taux des obligations à dix ans demeurent peu de temps à des niveaux supérieurs au taux neutre des fonds fédéraux. Historiquement parlant, il s’agit d’une excellente occasion pour acheter des obligations. On estime actuellement que le sommet des fonds fédéraux sera supérieur à 3,5 % au cours des 12 prochains mois et que les taux diminueront dans l’année qui suit. Nous surveillons de près les taux sur deux ans afin de déterminer rapidement si ce sommet prévu est déjà pris en compte. Ce ne sera pas le cas tant que les taux sur deux ans continueront à monter. À la suite de la publication décevante de l’IPC aux États-Unis, les taux sur deux ans ont progressé davantage vers 3 %, ce qui est se rapproche beaucoup du taux neutre des fonds fédéraux.
Le dollar américain a-t-il atteint un sommet ?
Le dollar américain a-t-il atteint un sommet ? C’est la controverse qui règne sur les marchés des changes. Il est vraiment intéressant de remarquer que ce débat se déroule sur les marchés, car les devises ont fluctué davantage cette année qu’en 2021. Et pendant la majeure partie de cette année, le dollar américain a été vigoureux. Il a profité de la hausse des rendements et de l’action de la banque centrale, qui devrait augmenter ses taux plus souvent que bon nombre de ses pairs, notamment celles du Japon et de l’Europe.
À la mi-mai, cependant, une série de facteurs combinés a affaibli le billet vert et a véritablement lancé le débat sur la faiblesse durable du dollar américain. D’abord, les marchés commençaient à prendre en compte les risques accrus de récession l’année prochaine et, par conséquent, le ralentissement du rythme des hausses de taux de la Réserve fédérale. Ce facteur a miné le soutien par les taux à la monnaie.
Ensuite, les investisseurs se sont tournés vers l’euro. Il a rebondi par rapport à ses creux de 2017 après que la BCE a déclaré pouvoir relever ses taux d’intérêt cet été.
Troisièmement, la situation en Chine. Les mesures de confinement à Shanghai ont été levées. Et je pense que cela a grandement contribué à réduire le pessimisme à l’égard de la Chine et la préférence des investisseurs pour les actifs américains.
Lorsque nous enregistrons cette vidéo au début de juin, le dollar américain s’est redressé et se porte plutôt bien. Il est donc clair que ce débat n’a pas encore été tranché. Nous pensons toutefois que l’écart de taux entre les États-Unis et les autres pays tend à être excessif. Et le dollar américain est arrivé au moment où il devrait s’affaiblir, compte tenu de sa surévaluation extrême.
Ainsi, nous pensons que cette devise est susceptible de se déprécier sensiblement au cours des deux ou trois prochaines années. Toutefois, tant que ce débat à court terme ne sera pas réglé, le marché des changes demeurera probablement volatil.
À propos d’autres monnaies, nous aimons le dollar canadien. L’économie canadienne se porte bien. Les taux d’intérêt au Canada demeurent élevés, même plus élevés que ceux aux États-Unis. Nous avons constaté une forte demande d’actifs canadiens de la part des investisseurs étrangers. Bien entendu, cette monnaie tire profit de la montée des prix des marchandises.
Par conséquent, nous pensons que le huard peut s’apprécier encore de 6 % de plus et atteindre un taux de change de 1,19 $ CA = 1 $ US. Ce serait suffisant pour montrer sa supériorité par rapport aux devises des marchés émergents et des marchés développés.