Dans les prochaines semaines, les dirigeants de plusieurs nations se réuniront aux Émirats arabes unis (EAU) pour faire le bilan des progrès réalisés par rapport à leurs objectifs climatiques collectifs. La Conférence des Parties (COP) rassemble plus de 70 000 délégués de plus de 190 pays à la Conférence des Nations Unies sur le climat. Il s’agira de la 28e édition cette année (COP28). Chaque année, une foule de sujets importants sont à l’ordre du jour et font l’objet de négociations et de délibérations. Voici les grandes questions que nous surveillerons de près lors de la COP28, qui se déroulera du 30 novembre au 12 décembre 2023.
Les grandes questions à surveiller lors de la COP28
1. Le bilan des progrès
En 2015, 196 pays ont signé l’Accord de Paris, dans lequel ils se sont donné l’ambition de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C d’ici la fin du siècle, par rapport aux niveaux préindustriels1. Ils ont depuis établi des cibles de réduction des émissions et des plans d’action qui décrivent leur contribution à la réalisation de cet objectif. Pour la première fois depuis la signature de l’Accord, un bilan mondial sera publié lors de la conférence annuelle. Il s’agira d’un inventaire des progrès réalisés collectivement dans l’atteinte des objectifs liés au climat, ainsi que des lacunes ou des domaines nécessitant plus d’attention. D’après un examen préliminaire des principales conclusions, il est évident que les pouvoirs publics doivent en faire davantage pour appuyer les mesures d’atténuation des changements climatiques et d’adaptation à ceux-ci2. Ces conclusions sont conformes à celles des rapports récents de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), qui indiquent que les politiques gouvernementales actuelles devraient se solder par une augmentation de la température de 2,4 °C d’ici 2100, dépassant ainsi le maximum visé dans l’Accord de Paris3. Tandis que les pays se réuniront à la COP28, le bilan mondial fournira aux gouvernements une feuille de route précieuse concernant les mesures à prendre pour atténuer les effets des changements climatiques et s’y adapter.
2. L’accélération de la transition énergétique
S’il veut atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, le monde doit être capable de passer d’une économie à forte intensité de carbone à une économie à faibles émissions pour la production d’énergie, le transport et les processus industriels. Cette transition énergétique est en cours, mais l’une des grandes priorités de la COP28 sera d’accélérer le pas. On y parlera notamment des moyens d’accroître la production d’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique, et de réduire (ou d’éliminer) progressivement la production de combustibles fossiles. On mettra l’accent sur les mesures capables de faire tripler la production d’énergie renouvelable et doubler l’efficacité énergétique d’ici 2030, grâce à l’expansion des infrastructures, à une gestion axée sur la demande, à des chaînes logistiques résilientes, au renforcement des compétences et des capacités, et à l’augmentation du financement public et privé4. Les combustibles fossiles, qui sont la forme de production d’énergie à la plus forte intensité carbonique, seront sous les projecteurs : la question est de savoir si les pays accepteront de les réduire ou de les éliminer progressivement. On s’intéressera particulièrement à la portée et au rôle des technologies de captage et de stockage du carbone (CCS) et d’élimination du dioxyde de carbone (CDR) comme piste de solution.
3. La contribution importante du méthane aux changements climatiques
Le méthane est un important gaz à effet de serre qui est responsable d’environ 16 % des émissions mondiales. En matière de réchauffement climatique, il est 28 fois plus puissant que le dioxyde de carbone5. La réduction du méthane a été un thème central de la conférence sur le climat de 2021, amenant 150 pays à signer un engagement mondial visant à réduire les émissions de 30 % d’ici la fin de la décennie par rapport aux niveaux de 20206. Bien qu’elle ne fasse pas partie des signataires, la Chine a annoncé un nouveau plan de réduction du méthane en prévision de la conférence de cette année, dans lequel elle énonce également ses attentes concernant des engagements supplémentaires de la part d’autres pays7. Le rôle que jouera le secteur pétrolier et gazier dans la réduction des émissions de méthane provenant du torchage, de l’éventage et des fuites sera également au cœur des discussions. D’ailleurs, le président et hôte de la COP28 a invité le secteur à « atteindre zéro émission de méthane et éliminer le torchage systématique d’ici 2030 »8. Bien qu’on ignore encore la façon dont ces appels à l’action et ces engagements seront mis en pratique par les pays ou les entreprises, la réduction des émissions de méthane, dans le cadre de toute discussion sur le climat, sera d’une grande importance.
4. Le financement climatique aux fins d’atténuation et d’adaptation
Le financement climatique englobe toutes les formes de financement fournies par une entité publique ou privée ou autrement en vue de faciliter les mesures d’atténuation des changements climatiques ou d’adaptation à ceux-ci. En 2015, les économies avancées se sont engagées à mobiliser 100 milliards de dollars américains par an jusqu’à 2020 pour les pays en développement, principalement par des subventions et des prêts9. Bien que cette somme n’ait pas été réunie dans les délais prévus, le financement climatique prend toujours de l’ampleur. D’ailleurs, plusieurs ont demandé que cet engagement soit renouvelé à la COP28 et qu’un nouvel objectif soit fixé pour 2025. Lors de la conférence de cette année, on se penchera également sur la création et la mise en œuvre d’un fonds pour les pertes et les dommages en vue d’aider les pays vulnérables aux effets physiques des changements climatiques, comme l’élévation du niveau des mers, les sécheresses et les phénomènes météorologiques extrêmes. Il sera essentiel de définir et de mettre en place de tels engagements pour permettre aux pays en développement de réduire les émissions liées à la production et à la consommation et de faire face à la hausse des coûts entraînés par les changements climatiques. Le résultat de ces discussions sera crucial pour les marchés émergents, où l’on estime qu’un financement de 2 000 milliards de dollars américains sera nécessaire d’ici 2030 pour respecter l’Accord de Paris10.
5. La nature et les gens au cœur de la lutte contre les changements climatiques
L’un des principes fondamentaux de l’Accord de Paris est la « transition juste ». Il vise à faire en sorte que la transition vers une économie à zéro émission nette soit ordonnée et inclusive et à favoriser une distribution plus équitable de la prospérité économique11, en tenant compte d’aspects tels que la sécurité et la résilience énergétiques, l’emploi et le renouvellement des compétences, la santé des collectivités, la réduction de la pauvreté, et l’égalité. Ce principe est de plus en plus reconnu et, pour la première fois, la conférence inclura un programme de travail à cet effet qui mettra l’accent sur les thèmes de la santé, de l’inclusion, des moyens de subsistance et de la transition juste pour l’énergie. Le rôle de l’humain sera mis de l’avant cette année, tout comme celui de la nature. La COP28 est la première conférence sur le climat à avoir lieu depuis la signature du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, en décembre 2022. On s’intéressa donc particulièrement à la production et aux systèmes alimentaires, de même qu’aux solutions fondées sur la nature, comme la conservation des terres ou des forêts et l’agriculture durable, pouvant favoriser l’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à ceux-ci. Les marchés volontaires du carbone seront particulièrement importants pour mobiliser des fonds pour ce genre de solutions. Les règles qui régissent leur fonctionnement devraient être mises au point à la conférence de cette année. Après deux ans de discussions, les pays devraient réviser et terminer les lignes directrices visant l’établissement d’un marché mondial du carbone et les critères d’admissibilité des projets aux crédits d’émission de carbone. En cas de succès, il s’agira d’un grand pas en avant pour les solutions climatiques et naturelles.
Les incidences pour RBC GMA et les investisseurs
Les changements climatiques représentent un risque systémique mondial de taille et ont des répercussions sur les entreprises, les gouvernements et les collectivités12. Les engagements et les mesures que prendront les gouvernements dans le cadre des négociations de la COP28 seront de bons indicateurs quant à l’orientation future des politiques et aux risques et occasions pour les émetteurs souverains et les sociétés émettrices. Des investissements considérables seront nécessaires pour mettre en œuvre des solutions permettant de réduire les émissions, en particulier dans les secteurs où il est difficile de le faire, offrant ainsi des occasions aux investisseurs. La manière dont la transition énergétique aura lieu, tout comme son ampleur et le temps qu’il faudra pour la réaliser, sont décisifs pour le respect des objectifs de l’Accord de Paris. Ils sont également significatifs pour les investisseurs qui évaluent l’incidence de la transition sur les émetteurs des secteurs clés et les mesures que ceux-ci prennent pour y faire face. Alors que les délégués de différents pays se réuniront à la COP28 dans les jours et les semaines à venir, nous surveillerons les actions et les annonces des gouvernements et des entreprises pour éclairer notre réflexion.
RBC Gestion mondiale d’actifs (RBC GMA) reconnaît l’importance d’atteindre l’objectif mondial de zéro émission nette d’ici 2050 afin d’atténuer les risques climatiques. Nous reconnaissons aussi la nécessité d’assurer une transition juste et ordonnée vers une économie à zéro émission nette afin de mieux répartir la prospérité économique. Cet engagement et les mesures que nous prenons sont décrits dans le document Notre ambition de carboneutralité. Notamment, nous prenons en compte les facteurs climatiques importants dans le cadre de nos décisions de placement13, nous employons une démarche de gérance active visant à promouvoir nos points de vue sur les changements climatiques14, et nous offrons des renseignements et des solutions aux clients afin de répondre à leurs besoins liés au climat.