Recul de l’inflation
Jusqu’à tout récemment, l’inflation non maîtrisée constituait le principal thème macroéconomique. Après un déclin bienvenu entre le milieu de 2022 et la fin de 2023, l’inflation a connu une reprise particulièrement préoccupante aux États-Unis de janvier à mars cette année. L’indice global et l’indice de base ont augmenté selon un taux annualisé de plus de 5 %, alors que la cible est de 2 %. Cette poussée d’inflation a provoqué une envolée des taux obligataires et une diminution des baisses de taux attendues pour cette année.
Heureusement, cette tendance inquiétante semble se renverser, d’après les données sur l’inflation du mois d’avril et d’autres signaux récents.
Inflation aux États-Unis
Aux États-Unis, l’indice global et l’indice de base ont ralenti, gagnant respectivement 0,31 % et 0,29 %. Même si la hausse des prix est encore trop rapide, on note un progrès (voir le graphique suivant).
L’inflation décélère aux États-Unis
Nota : Données en date d’avril 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : BLS, Macrobond, RBC GMA.
L’inflation des services demeure trop forte, aussi bien pour la portion de l’habitation que pour celle des autres services (voir le tableau suivant). Cela dit, elle est un peu moins élevée qu’auparavant.
L’inflation des services commence à fléchir
Nota : En avril 2024 pour les mesures de l’IPC et de l’IPP ; en mars 2024 pour les mesures des DPC. Sources : BEA, BLS, Réserve fédérale de Cleveland, Réserve fédérale de Dallas, Macrobond, RBC GMA.
Pour l’avenir, plusieurs forces devraient favoriser une décélération de l’inflation.
La flambée de l’indice des prix à la consommation (IPC) aux États-Unis au premier trimestre est peut-être en partie attribuable à des distorsions saisonnières qui ne se manifesteront pas au deuxième trimestre.
Même si l’inflation globale est demeurée tenace au premier trimestre, son ampleur s’est rétrécie (voir le graphique suivant).
L’étendue de l’inflation continue de rétrécir
Nota : Données en date d’avril 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : BLS, Federal Reserve Bank de Cleveland, Macrobond, RBC GMA.
Le prix du pétrole et, par conséquent, de l’essence a nettement baissé en mai. Or, il était largement responsable de la poussée de l’inflation globale en avril. En utilisant ce fait comme principale donnée d’entrée, les prévisions immédiates d’inflation de la Réserve fédérale de Cleveland tablent sur un ralentissement marqué de l’inflation globale aux États-Unis à seulement 0,1 % d’un mois sur l’autre en mai.
L’inflation continuera de baisser en mai aux États-Unis
Nota : Niveau réel en avril 2024 ; prévisions immédiates d’inflation de la Réserve fédérale de Cleveland au 15 mai 2024. Sources : BEA, Federal Reserve Bank de Cleveland, Macrobond, RBC GMA
Il est encore possible que la hausse des coûts de l’habitation, qui représente le plus important facteur d’inflation, ralentisse un peu (voir le graphique suivant). À notre avis, l’inflation effrénée de l’assurance devrait bientôt s’inverser, comme nous le soutenions dans le dernier #MacroMémo.
Aux États-Unis, l’inflation des coûts de l’habitation ne pourra ralentir que faiblement
IPC et indice Zillow en date d’avril 2024 ; indice S&P/Case-Shiller des prix des propriétés en date de mars 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : BLS des États-Unis, S&P Global, Zillow, Macrobond, RBC GMA
Le relâchement en cours du marché du travail aux États-Unis devrait également contribuer à freiner progressivement l’inflation, notamment pour ce qui est des coûts du secteur des services. La croissance des salaires s’essouffle, le taux de chômage monte et le nombre de postes vacants fléchit.
Étant donné que les consommateurs américains se montrent de plus en plus sélectifs dans leurs achats (nous y reviendrons), certains détaillants de premier plan, comme Walmart, Target et McDonald’s, annoncent des baisses de prix. Par conséquent, la part des entreprises américaines qui prévoient augmenter les prix pourrait s’amenuiser (voir le graphique suivant).
Le pourcentage d’entreprises américaines qui prévoient augmenter les prix demeure élevé
Données en date d’avril 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : Étude économique menée par la NFIB auprès des petites entreprises, Macrobond, RBC GMA
Dans l’ensemble, selon l’indice quotidien de l’inflation de PriceStats, le taux d’inflation continue de ralentir depuis la dernière publication mensuelle de l’IPC (voir le graphique suivant).
L’indice quotidien de l’inflation aux États-Unis de PriceStats signale un ralentissement
Indice de l’inflation de PriceStats au 3 mai 2024 ; IPC en date d’avril 2024. Sources : State Street Global Markets Research, RBC GMA
Inflation dans les pays développés
Dans les autres pays développés, la reprise de l’inflation au début de 2024 n’a pas été aussi forte qu’aux États-Unis. Toutefois, pendant quelques mois, les progrès ont été plus lents que ce qui aurait été idéal.
Heureusement, le relevé de l’inflation pour avril fait état d’une avancée dans la bonne direction :
L’IPC du Royaume-Uni a chuté de 3,2 % à seulement 2,3 % d’une année sur l’autre (bien que cette amélioration n’ait pas été aussi importante que prévu).
Dans la zone euro, l’inflation annuelle s’est établie à tout juste 2,4 % d’une année sur l’autre.
Certes, l’indice des prix de ces deux régions ne tient pas compte des coûts de l’habitation dans la même mesure qu’en Amérique du Nord. Pour une personne moyenne, ce fait a des répercussions notables. Par contre, pour les banques centrales, dont la mission est d’atteindre leurs cibles d’inflation, ce qui est inclus dans le panier de prix ou ce qui en est exclu est sans importance ; seul leur mandat compte.
Au Canada, l’IPC est passé de 2,9 % à 2,7 % d’une année sur l’autre en avril, de même que l’indice hors alimentation et énergie.
L’IPC médian a fléchi de 2,9 % à 2,6 %.
La moyenne tronquée de l’inflation a chuté de 3,2 % à 2,9 %.
Bref, l’inflation est de nouveau en baisse presque partout. Toutefois, elle est encore loin de sa cible et le chemin qui reste à parcourir sera vraisemblablement en dents de scie.
Les banques centrales se mettent en branle
Le cycle d’assouplissement tant attendu est enfin amorcé. Un assez grand nombre de banques centrales des marchés émergents ont déjà abaissé leurs taux. Du côté des pays développés, celles de la Suisse et de la Suède ont fait de même.
La Banque centrale européenne (BCE) décrétera fort probablement une première réduction le 6 juin. Le marché évalue maintenant à 93 % la probabilité d’une baisse de 25 pb par rapport au niveau de départ de 4,50 %. Autrement dit, il faudrait qu’un événement important se produise dans l’économie, sur le marché ou sur la scène géopolitique pour que la BCE s’abstienne d’abaisser les taux.
La Banque d’Angleterre (BdA) semblait prête à opérer une première réduction des taux à la fin de juin, avant que le ralentissement de l’inflation déçoive les attentes et que les élections soient déclenchées, le scrutin étant prévu pour le 4 juillet. La BdA a depuis annulé tous les communiqués non essentiels d’ici les élections, si bien qu’il y a peu de chances qu’un assouplissement ait lieu le 20 juin. Par conséquent, le marché a revu ses attentes : le 20 mai, la probabilité d’une réduction des taux en juin s’établissait à 55 % ; elle n’est plus que de 8 % actuellement. Une telle décision n’est donc pas complètement impossible, mais elle est peu probable.
Le marché vise maintenant les réunions du 1er août et du 19 septembre, sans savoir laquelle est la plus probable. Nous penchons plutôt pour la réunion du 1er août, surtout si la BCE réduit ses taux et que le marché réagit favorablement.
Banque du Canada
Les attentes du marché à l’égard d’une baisse des taux de la Banque du Canada sont partagées, la probabilité qu’elle se produise le 5 juin étant estimée à 61 %, le solde allant à une baisse décrétée le 24 juillet. Autrement dit, le marché est absolument convaincu qu’une baisse de 25 pb sera annoncée cet été, mais hésite entre juin et juillet pour la date précise.
Pour anticiper le moment exact auquel la banque centrale prendra sa décision, la situation économique est moins importante que les indications de la banque centrale et ce que son comportement passé signale. Aucun modèle économique ne peut dire qu’une baisse de taux de 25 pb s’avérera désastreuse si elle est décidée en juin, mais bénéfique si elle survient en juillet. Les effets seront presque identiques dans les deux cas, soit des variations de l’ordre de 0,1 point de pourcentage, tant pour la croissance du produit intérieur brut (PIB) que pour l’IPC, et ce, pour un huitième de l’année.
Arguments en faveur d’une réduction des taux en juin au Canada :
Lors de sa dernière conférence de presse, la Banque du Canada a mentionné qu’il y avait une possibilité de baisse en juin précisément.
Compte tenu du degré élevé de sensibilité du pays aux taux d’intérêt, les difficultés liées aux prêts hypothécaires s’aggravent d’un mois à l’autre, et il serait bon de les atténuer avant qu’elles ne créent des problèmes économiques ou financiers plus vastes.
Les taux d’intérêt sont actuellement très restrictifs, et cela devient de moins en moins approprié.
L’inflation ralentit ; les données des quatre derniers mois se situent dans la fourchette large de 1 à 3 % de la banque centrale.
De façon assez unique, l’inflation canadienne est fortement influencée par les charges d’intérêts hypothécaires qui, par définition, deviennent moins problématiques lorsque les taux sont inférieurs.
Comme l’économie canadienne fonctionne légèrement en deçà de son potentiel, la Banque du Canada devrait vouloir soutenir la croissance.
Les marchés financiers ont déjà largement anticipé une réduction des taux en juin ; par conséquent, la banque centrale peut procéder sans provoquer de turbulences sur ceux-ci.
Arguments en faveur d’une réduction des taux en juillet au Canada :
La Banque du Canada n’a abandonné que récemment sa politique de resserrement et n’a pas encore affirmé de penchant explicite pour l’assouplissement. Or, la plupart des banques centrales homologues l’ont déjà fait (la Réserve fédérale américaine [Fed] dans ses graphiques à points, la Banque centrale européenne dans un communiqué et la Banque d’Angleterre par l’intermédiaire de votes dissidents pour l’assouplissement). Il est possible que la Banque du Canada veuille signaler ses intentions avant de passer à l’acte.
La réunion de juillet est intéressante, car c’est aussi à ce moment que la Banque du Canada publiera son rapport trimestriel sur la politique monétaire. Un cycle d’assouplissement se faisant à peu près toutes les deux réunions s’harmoniserait avec la publication de ces rapports.
Si l’on attend jusqu’en juillet, on connaîtra les données sur l’IPC de mai. On sera alors davantage en mesure de confirmer les progrès sur le plan de l’inflation et on disposera d’un plus long délai pour analyser les indicateurs d’inflation en temps réel de juin et de juillet. L’inflation a reculé, mais elle est encore trop élevée.
Les derniers chiffres sur l’embauche au Canada sont extrêmement bons. Un mois supplémentaire de données permettrait de déterminer si l’économie s’accélère ou si elle a simplement connu quatre semaines exceptionnelles.
Le fait d’attendre jusqu’en juillet éviterait à la Banque du Canada de prendre trop d’avance sur la Réserve fédérale américaine, en supposant que cette dernière commence à baisser les taux en septembre. Cela réduirait le risque d’une fluctuation importante de la monnaie.
La Banque du Canada est notoirement indifférente aux attentes des marchés. Elle n’hésite pas à les surprendre. Ici, il n’y a pas de règle comme aux États-Unis, où la Fed intervient « toujours » si les marchés sont en concordance avec sa décision.
Ce serait une bonne chose que le Canada commence son assouplissement après l’Europe, mais avant les États-Unis, compte tenu de l’état relatif de l’inflation et de l’activité économique dans ces trois territoires ; une réduction des taux en juillet s’inscrirait dans cette logique.
Tout bien considéré, selon nous, les arguments en faveur de juillet sont légèrement plus convaincants, même si la Banque du Canada pourrait facilement aller dans un sens ou dans l’autre. Soit dit en passant, les marchés pensent le contraire. Pour tous les investisseurs sauf ceux qui négocient des titres à revenu fixe, ce qu’il faut sans doute retenir, c’est que le taux du financement à un jour du Canada devrait passer de 5,00 à 4,75 % d’ici la fin de juillet. Les baisses ultérieures seront vraisemblablement graduelles et dépendront grandement des perturbations de l’économie, de l’inflation et de la politique monétaire américaine.
La Fed est bien entendu dans une position légèrement différente de celle des autres banques centrales. En effet, elle a plus de chemin à parcourir pour faire redescendre l’inflation. Elle ne pourra donc pas réduire les taux avant septembre.
Pour tous les pays, la première baisse devrait être petite et la progression, lente. Il pourrait y avoir de longues pauses, mais nous croyons qu’un taux directeur « normal » se situe plusieurs points de pourcentage en dessous du niveau actuel, ce qui implique un assouplissement considérable au cours des prochaines années.
Convergence économique
Après 18 mois d’exceptionnalisme économique aux États-Unis, au cours desquels ces derniers ont surpassé le reste du monde développé, une tendance opposée s’est récemment dessinée. On constate une certaine convergence, les États-Unis revenant à la normale alors que d’autres pays continuent d’offrir des surprises positives (voir le graphique suivant).
L’écart des surprises de l’économie mondiale s’inverse
Au 24 mai 2024. Sources : Citigroup, Bloomberg, RBC GMA
Parmi les signes de décélération de l’économie américaine, mentionnons :
un taux de croissance du PIB moins soutenu (+1,6 % en rythme annualisé au premier trimestre) ;
un taux d’embauche plus modéré (+175 000) ;
des ventes au détail stables ;
des résultats sous le seuil de 50 pour les indices PMI du secteur manufacturier et du secteur des services de l’Institute for Supply Management.
Dans l’ensemble, les surprises économiques aux États-Unis sont passées de positives à négatives.
En revanche, celles de l’économie mondiale sont encore positives. La composante des prévisions de l’indice allemand ZEW (Zentrum für Europäische Wirtschaftsforschung) a connu une forte amélioration en mai. Tant au Royaume-Uni que dans la zone euro, le PIB est ressuscité au premier trimestre. Au Canada, 90 000 postes ont été créés en mai. Et au Japon, les résultats de l’enquête Tankan continuent d’augmenter.
Les États-Unis se portent quand même bien
Malgré son récent ralentissement, l’économie américaine n’est pas en péril. Jusqu’à présent, sa décélération ressemble davantage à un atterrissage en douceur qu’à un atterrissage brutal (bien qu’il ne faille pas prétendre que les deux scénarios se manifestent de manière si différente au début).
Alors, qu’est-ce qui nous fait penser que les États-Unis se portent quand même bien ? Plusieurs facteurs.
Pour le deuxième trimestre, la croissance du PIB devrait s’établir à plus de 3 % en rythme annualisé, ce qui semble indiquer que le gain anémique de 1,6 % enregistré au premier trimestre était une valeur aberrante.
À la suite d’un bond inquiétant il y a quelques semaines (principalement à cause de quelques distorsions, notamment une augmentation saisonnière des mises à pied liées aux écoles dans l’État de New York), les demandes de prestations d’assurance-emploi ont repris une trajectoire basse et plutôt stable (voir le graphique suivant).
Les demandes de prestations d’assurance-emploi demeurent faibles aux États-Unis
Données pour la semaine se terminant le 18 mai 2024. Sources : Département américain du Travail, Macrobond, RBC GMA
Après avoir chuté en mars, les commandes de biens d’équipement de base sont reparties à la hausse en avril.
La demande sur le marché du fret recommence à augmenter après une période de léthargie (voir le graphique suivant).
La demande de transport de marchandises aux États-Unis augmente depuis la fin de 2023
Données pour la semaine se terminant le 17 mai 2024. L’indice de la demande du marché correspond au ratio entre les charges comptabilisées et les camions comptabilisés par type d’équipement. Le tarif par véhicule exclut les suppléments pour le carburant. Sources : Truckstop.com, Bloomberg, RBC GMA
Bien que le volume de crédit commercial et industriel fourni par les banques soit encore relativement faible, il n’est pas question d’effondrement, et il pourrait même s’être légèrement accru ces derniers mois (voir le graphique suivant).
La croissance du crédit a-t-elle touché le creux aux États-Unis ?
Données pour la semaine se terminant le 15 mai 2024. Sources: Réserve fédérale américaine, Macrobond, RBC GMA
Le ton des entreprises ne signale pas de problèmes imminents. On voit de moins en moins les termes « récession » et « licenciement » dans les transcriptions des sociétés du S&P 500. Au deuxième trimestre, leur fréquence a atteint son niveau le plus bas depuis plusieurs années (voir les deux tableaux suivants).
Le nombre de fois où le mot « récession » est mentionné dans les communications des sociétés du S&P 500 a diminué régulièrement
Au deuxième trimestre de 2024 (données partielles utilisées pour le trimestre). Comprend les transcriptions de toutes les téléconférences pour les investisseurs, les journées des investisseurs et les journées des marchés des capitaux organisées par les sociétés du S&P 500. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Le nombre de fois où le mot « licenciement » est mentionné dans les communications des sociétés du S&P 500 suit une tendance baissière
Au deuxième trimestre de 2024 (données partielles utilisées pour le trimestre). Comprend les transcriptions de toutes les téléconférences pour les investisseurs, les journées des investisseurs et les journées des marchés des capitaux organisées par les sociétés du S&P 500. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Craintes relatives à la consommation aux États-Unis
Cela étant dit, il est normal d’être préoccupé au sujet des perspectives actuelles de la consommation, en particulier compte tenu du ralentissement des ventes au détail observé récemment. Ces craintes s’expliquent par quatre raisons principales.
1. La hausse des taux d’intérêt commence à nuire à la consommation, comme en témoigne le nombre croissant de prêts aux ménages en souffrance (voir le graphique suivant). Le taux d’utilisation des cartes de crédit commence également à progresser moins rapidement, ce qui limite les dépenses (voir le deuxième graphique).
Le taux de défaillance sur les prêts à la consommation aux États-Unis est actuellement en hausse
Données au premier trimestre 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : FRBNY, Macrobond, RBC GMA
La croissance des soldes des cartes de crédit aux États-Unis ralentit
Données au premier trimestre 2024. Sources : Réserve fédérale de New York, Macrobond, RBC GMA
Les ménages américains ont désormais dépensé toute leur épargne excédentaire accumulée durant la pandémie, selon la Réserve fédérale de San Francisco (voir le graphique suivant).
L’épargne excédentaire accumulée aux États-Unis pendant la pandémie a-t-elle disparu ?
En date de mars 2024. Épargne excédentaire accumulée depuis février 2020. Épargne excédentaire par rapport à la tendance observée avant la pandémie, soit au cours des 48 mois précédant mars 2020. Source : Réserve fédérale de San Francisco, Macrobond, RBC GMA
Aux États-Unis, le taux d’épargne personnelle ne s’élève aujourd’hui qu’à 3,2 %. Ce taux est nettement inférieur à la moyenne d’avant la pandémie et un chiffre qui se situe seulement 1,8 point de pourcentage au-dessus de son creux historique de 2005 (voir le graphique suivant). Ce taux ne laisse pas une grande marge d’erreur et ne permettra certainement pas d’observer à l’avenir une croissance des dépenses supérieure à celle des revenus.
Le taux d’épargne des particuliers aux États-Unis est faible
En date de mars 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : BEA, Macrobond, RBC GMA
La confiance des consommateurs a légèrement diminué, ce qui indique que ceux-ci seraient peu enclins à dépenser (voir le graphique suivant).
La confiance des consommateurs américains est minée par la hausse des prix et des taux d’intérêt
Indice de confiance des consommateurs de l’Université du Michigan en date de mai 2024 ; indice de confiance des consommateurs du Conference Board en date d’avril 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : Macrobond, RBC GMA
Compte tenu de ces freins, comment la consommation évoluera-t-elle par la suite ? Nous convenons qu’il est effectivement probable que la croissance des dépenses sera plus modérée pour le reste de 2024 et en 2025. Cependant, nous rejetons l’idée selon laquelle une récession de la consommation (voire une récession économique générale provoquée par la diminution de la consommation) est nécessaire ou probable.
Commençons par dédramatiser les problèmes susmentionnés.
Certains ménages souffrent en effet de la hausse des taux d’intérêt, mais la plupart d’entre eux s’en sortent relativement bien, comme en témoigne le maintien du remboursement de la grande majorité des prêts et l’évolution du coût du service de la dette des ménages qui représente toujours une part des revenus conforme à la moyenne d’avant la pandémie (voir la ligne bleue sur le graphique suivant).
Le coût du service de la dette des ménages américains est conforme à la moyenne d’avant la pandémie
Ratio d’endettement au T4 2023 ; versements d’intérêts en date de mars 2024. Sources : Réserve fédérale, BEA, Macrobond, RBC GMA
Pour remettre les choses en perspective, plus de 40 % des dépenses des ménages proviennent du quintile des personnes aux revenus les plus élevés. Il est peu probable que ce groupe soit sévèrement touché par la remontée des taux d’intérêt.
Quant à la question de savoir si la totalité de l’épargne accumulée durant la pandémie a réellement disparu, les estimations divergent. La réponse dépend principalement de la façon dont le taux « normal » d’épargne avant la pandémie a été défini. Ainsi, des variations même mineures des hypothèses retenues peuvent donner l’impression qu’il reste encore des centaines de milliards de dollars à dépenser.
Néanmoins, la réponse ne nous est pas d’une grande utilité, car ce mode de raisonnement est purement artificiel. Les ménages n’ont jamais cessé d’épargner tout au long de la pandémie. Au cours des dernières années, la surabondance d’épargne constituée durant la pandémie a en théorie diminué. Toutefois, la réalité est que les ménages ont continué à accumuler des actifs, à un rythme simplement plus lent que la normale. Les ménages n’ont cessé de s’enrichir chaque jour et ne se sont pas appauvris.
De plus, il existe plusieurs façons d’accumuler du patrimoine. Même si les ménages épargnent moins qu’auparavant, ils continuent à accroître leur patrimoine grâce à l’envolée des cours boursiers et à la flambée des prix des maisons qui sont nettement plus élevés qu’il y a cinq ans (voir le graphique suivant). Cela signifie que les ménages sont toujours en mesure de dépenser, s’ils le souhaitent.
La valeur nette des ménages américains est élevée et augmente (abstraction faite des distorsions attribuables à la pandémie)
Données au T4 2023. La zone ombrée représente une récession. Sources : Réserve fédérale, Haver Analytics, RBC GMA
La baisse de la confiance des consommateurs n’est pas une situation idéale, mais l’importance de cet indicateur reste discutable. D’après l’indice de confiance des consommateurs en temps réel qui a été construit à partir de publications sur Twitter (ou désormais X), la confiance resterait à un niveau plutôt normal. Cet indice se montre donc plus optimiste que les sondages traditionnels (voir le graphique suivant).
L’indice Twitter de la confiance envers l’économie est normal
Indice GS Twitter de la confiance envers l’économie en date du 15 mai 2024 ; indice de confiance des consommateurs de l’Université du Michigan en date de mai 2024. Sources : Goldman Sachs Investment Research, Université du Michigan, Macrobond, RBC GMA
Mais plus important encore, la confiance des consommateurs s’est avérée être un indicateur plutôt inutile pour prédire l’évolution des dépenses au cours des dernières années. Alors que les consommateurs envisageaient de réduire fortement leurs gros achats sur la majeure partie de la période qui a suivi la pandémie, ils ont dépensé sans retenue. Aujourd’hui, les intentions d’achats importants progressent (voir le graphique suivant), bien que la confiance s’érode. Lequel de ces indicateurs faut-il retenir ? Nul ne le sait. À notre avis, il est préférable de se concentrer sur d’autres variables.
Les conditions d’achat pour les biens ménagers durables de grande taille s’améliorent-elles ?
Données en date d’avril 2024. Sources : Université du Michigan, Macrobond, RBC GMA
Comment expliquer que les mesures de confiance ne fournissent pas d’informations utiles ? D’importants clivages partisans influencent actuellement l’opinion des ménages sur l’économie pourraient. Aux États-Unis, les démocrates se montrent plutôt optimistes au sujet de l’économie avec Joe Biden actuellement au pouvoir, tandis que les républicains brossent un tableau quasi apocalyptique. Lorsque Donald Trump était au pouvoir, c’était précisément le contraire. Si les gens laissent leurs convictions politiques altérer aussi fortement leur évaluation de la situation économique, la seule conclusion raisonnable est que ces évaluations ont perdu presque toute signification.
Il peut aussi y avoir des idées fausses sur la rapidité de la croissance des ventes au détail des dernières années et aussi sur son ralentissement, ou sur la mesure dans laquelle cette même croissance pourrait encore décliner. Certes, en montant nominal, les ventes au détail ont connu une robuste croissance au cours des dernières années. Cependant, la majeure partie de cette augmentation est due à la hausse des prix. Les consommateurs ont juste payé plus cher sans pour autant obtenir beaucoup plus.
Il est plus pertinent d’examiner les ventes au détail réelles, qui montrent que les consommateurs se sont retranchés lorsque l’inflation est devenue particulièrement problématique. Depuis peu, les ventes au détail réelles se redressent modestement (voir le graphique suivant).
La croissance tendancielle des ventes au détail réelles aux États-Unis est repartie
Ventes au détail réelles en date de mars 2024 ; ventes au détail nominales en date d’avril 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : BEA, Macrobond, RBC GMA
Nous suivons deux mesures reflétant les dépenses de consommation en temps réel aux États-Unis, et aucune ne montre de grand changement (et encore moins de décélération) au cours des dernières semaines ou des derniers mois (voir les deux graphiques suivants). C’est toujours pareil.
Les dépenses quotidiennes globales par cartes demeurent stables aux États-Unis
Au 18 mai 2024. Le total des dépenses par carte comprend l’ensemble des opérations par cartes de la BAC, qui tient compte des ventes au détail et des services payés par cartes. Il exclut les paiements traités par une chambre de compensation automatisée. Sources : BofA Global Research, RBC GAM
Les dépenses quotidiennes globales par cartes font également bonne figure aux États-Unis
Données pour la semaine se terminant le 7 mai 2024 (semaine partielle). Selon les données recueillies par Fiserv sur les opérations par cartes dans les magasins traditionnels (à l’exception des stations-service). Sources : BEA, Macrobond, RBC GMA
Malgré les rapports ponctuels faisant état d’une baisse des dépenses consacrées aux vacances, aux États-Unis les taux d’occupation des hôtels semblent rebondir normalement à l’approche de la saison estivale (voir le graphique suivant).
L’occupation des hôtels aux États-Unis remonte
Données pour la semaine se terminant le 18 mai 2024. Sources : STR (CoStar Group), Wall Street Journal, RBC GMA
Le repli de l’inflation pourrait encourager à effectuer les dépenses restées en attente (sur une base corrigée de l’inflation). Les secteurs du détail et du tourisme ressentent maintenant des pressions pour réduire les prix. Cela pourrait entraîner une reprise des dépenses.
Mais le principal n’est pas là. La meilleure mesure des dépenses de consommation n’est pas le niveau des taux d’intérêt, de l’inflation ou de la confiance, mais le revenu des ménages. Et le revenu des ménages dépend de la création d’emplois et de la croissance des salaires. La création d’emplois demeure saine et la croissance des salaires, même si elle ralentit, demeure rapide. Ces deux forces pointent vers un maintien des dépenses de consommation. Notre modèle économétrique à grande échelle, fondé sur un vaste éventail de variables économiques et de marché, indique que la bonne santé du marché de l’emploi, des salaires et de la richesse devrait compenser les coûts plus élevés liés au service de la dette. Par conséquent, il existe une possibilité de croissance modeste ou modérée des dépenses de consommation au cours des prochaines années.
C’est probablement le scénario idéal. Nous aurions besoin d’une croissance économique légèrement moins rapide aux États-Unis pour pouvoir à la fois modérer l’inflation et réduire les taux d’intérêt.
Nous pouvons également penser que les dépenses en immobilisations soutiendront particulièrement la croissance économique au cours des prochaines années, dans le contexte des politiques industrielles du gouvernement, du rapatriement des activités, des investissements climatiques et de la rapidité des progrès techniques. Cela pourrait aider à compenser des dépenses de consommation plus contenues.
Que se passe-t-il vraiment en Chine ?
Le PIB officiel de la Chine est sur la voie d’une croissance d’un peu plus de 5 % cette année. L’économie chinoise ne se porte pas bien, mais les annonces de son effondrement sont largement exagérées.
L’objection la plus fréquente à cette affirmation est que les statistiques économiques officielles de la Chine sont souvent douteuses, et que l’économie pourrait être plus affaiblie qu’elle ne paraît. Il y a beaucoup de raisons d’être sceptiques, compte tenu des antécédents de falsification des données économiques à l’échelle locale pour répondre aux objectifs gouvernementaux, et au vu du rendement anormalement morose de l’économie chinoise par rapport aux autres pays.
Ces doutes ont donné naissance à des méthodes alternatives empiriques pour estimer le rendement économique de la Chine. La plupart de ces méthodes reposent sur des données moins sujettes à la manipulation, comme les données du commerce international (qui peuvent être recoupées avec celles des partenaires commerciaux de la Chine) et d’autres indicateurs « fermes » comme la consommation en électricité et les statistiques sur le transport ferroviaire.
Si nous regardons les trois méthodes alternatives utilisées pour mesurer l’économie de la Chine, deux affirment que l’économie croît en réalité plus rapidement qu’il n’y paraît. Une seule affirme que l’économie se développe plus lentement (voir le graphique suivant).
Nous ne pouvons donc pas prétendre que la Chine surestime actuellement son taux de croissance économique – ou du moins plus qu’elle ne l’a fait au cours des deux dernières décennies. Il est vrai que les trois indicateurs alternatifs sont un peu flous : le premier montre que l’économie chinoise s’accélère, le deuxième qu’elle a touché le fonds, et le troisième qu’elle ralentit. Ce ne sont pas des instruments précis, et en raison de leur conception ils passent à côté d’une grande partie du secteur des services. Cependant, il semble raisonnable de conclure que l’économie chinoise croît à un rythme qui ne diffère pas radicalement des estimations officielles.
Le PIB de la Chine semble concorder avec d’autres indicateurs
Nota : Indice Li Keqiang en date d’avril 2024 ; PIB au T1 de 2024 ; outil de suivi des activités cycliques en Chine (SACC) au T4 de 2023. Indice d’activité économique (avril 2024) établi à l’aide de huit indicateurs indirects de l’activité économique. Sources : Clark, Pinkovskiy et Sala-i-Martin, Is Chinese Growth Overstated ; Réserve fédérale de New York, Liberty Street Economics, 2017 ; Réserve fédérale de San Francisco, Haver Analytics, Macrobond, RBC GMA
Notre indice des activités de consommation en Chine, établi à l’aide de 11 indicateurs des activités de consommation en Chine, indique une faiblesse de la consommation chinoise (voir le prochain graphique – nota : le niveau « normal » est zéro). Ce n’est pour autant pas surprenant, vu la fragilité du marché immobilier à laquelle sont exposés les ménages chinois. Les ventes au détail chinoises continuent d’afficher une légère hausse dans ce contexte.
La consommation est inférieure à la normale en Chine
Données en date d’avril 2024. Indice établi à l’aide de 11 indicateurs des activités de consommation en Chine. Sources : CNBS, CAAM, Banque populaire de Chine, SouFun-CREIS, Haver Analytics, Macrobond, RBC GMA
Mesures de relance liées au marché du logement en Chine
Les excès passés qui ont empiré l’accessibilité à la propriété, la baisse des demandes de propriétés additionnelles et l’insolvabilité de constructeurs ont mis à mal le marché du logement de la Chine et ont entraîné la chute des ventes et des prix des maisons.
Le gouvernement central s’attaque au problème depuis un certain temps. Elle a notamment réduit les taux d’intérêt, diminué les mises de fonds requises et demandé aux banques d’accorder des prêts pour certains projets de construction.
Aujourd’hui, le gouvernement aborde le problème du logement sous un angle tout à fait nouveau. Il a mis en place une grande politique pour permettre d’absorber le grand nombre de logements achevés, mais invendus dans le pays. Au total, 500 milliards de yuans ont été alloués aux gouvernements locaux pour l’achat de ces unités pour permettre d’écouler les stocks et aider les constructeurs à rétablir leurs bilans. On s’attend à ce que les gouvernements locaux déploient des appartements et les offrent comme des logements abordables. Toutefois, cette somme ne suffit évidemment pas à éponger à elle seule le stock excessif des logements. Selon une estimation, la valeur du stock des logements chinois disponibles est 27 fois supérieure à celle du nouveau plan de relance !
D’autres nouvelles initiatives prévoient une facilité de prêt de 500 milliards de yuans supplémentaires pour le réaménagement de vieux logements.
Le meilleur pari reste que la Chine parvienne à stabiliser son marché du logement au cours de l’année à venir, mais que la croissance du secteur reste modeste pendant plusieurs années, les problèmes structurels sous-jacents étant progressivement résolus.
Le seuil symbolique du Japon
Le taux des obligations japonaises à 10 ans dépasse 1,00 % pour la première fois en onze ans. Cette hausse s’explique par les facteurs suivants :
le taux d’inflation positif du pays et les perspectives économiques raisonnables ;
les mesures prises par la Banque du Japon en mars ;
la perspective d’une hausse des taux de 10 pb lors de la prochaine réunion du 31 juillet ;
la possibilité d’une réduction du programme d’achat d’obligations de la banque centrale.
Il convient de noter que les taux obligataires à long terme japonais étaient déjà supérieurs à 1,00 % et que l’obligation à 30 ans du pays dépassait déjà 2 %.
Les implications de cette évolution sont diverses.
Du point de vue des titres à revenu fixe, cela signifie que les investisseurs en obligations japonaises peuvent de plus en plus recevoir un coupon approprié pour leurs efforts.
D’un point de vue économique, la hausse des taux est un signe prometteur de reprise qui vient après une période d’hibernation de plusieurs décennies du Japon.
Du point de vue des risques, le Japon a une énorme dette publique qui génère d’importants intérêts, ce qui constitue un danger pour la stabilité financière.
Du point de vue des placements, essentiellement ceux directement liés au taux des obligations à dix ans, nous sommes optimistes quant au marché boursier japonais, dont les entreprises semblent enfin privilégier la maximisation des profits, ce qui n’a étrangement pas été le cas pendant plusieurs décennies.
Taux d’inclusion des gains en capital au Canada
Le récent budget du Canada propose d’augmenter le taux d’inclusion des gains en capital réalisés par certains contribuables canadiens. Pour ceux qui ne connaissent pas le système canadien, ce n’est pas le taux d’imposition des gains en capital qui a directement augmenté, mais plutôt la fraction des gains en capital qui est assujettie à l’impôt. Le taux d’inclusion des gains en capital a été de 50 %, au cours des deux dernières décennies. Cela signifie que seule la moitié des gains en capital était imposée au taux marginal d’imposition d’un particulier. En fait, le taux d’imposition des gains en capital était égal à la moitié du taux d’imposition des revenus.
Le projet de loi fera passer le taux d’inclusion des gains en capital de 50 % à 66,7 % pour toutes les sociétés et fiducies canadiennes, et pour les particuliers dont les gains en capital dépassent 250 000 $ par an.
Selon le budget, cette augmentation d’impôt devrait s’appliquer à seulement 0,13 % de tous les déclarants en 2025, compte tenu du seuil de revenu élevé. Ce pourcentage sous-estime toutefois la partie de la population qui se fera probablement piéger par le nouvel impôt au fil du temps, car nombreux sont les ménages de la classe moyenne qui réalisent une fois d’importants gains en capital à la suite de la vente d’un chalet ou d’un immeuble de placement, ou de la liquidation d’une succession. Jack Mintz, expert en politiques de l’Université de Calgary, estime qu’environ 3 % des Canadiens seront assujettis à un taux d’inclusion plus élevé tôt ou tard. Le pourcentage n’est pas énorme, quoique non négligeable.
De plus, de nombreux médecins, avocats et petites entreprises exercent leur métier au sein d’une structure d’entreprise et relèvent ainsi des changements proposés, même si leurs gains en capital annuels sont loin d’atteindre un quart de million de dollars.
Bien que l’impôt envisagé augmente manifestement les revenus et semble donc renforcer la situation budgétaire du pays, il se peut que ses répercussions secondaires aient en fin de compte l’effet inverse, principalement par une réduction des placements :
Les investissements des entreprises pourraient s’affaiblir progressivement, puisque les bénéfices de celles-ci subiront une imposition un peu plus lourde (environ 8 % des bénéfices des entreprises canadiennes provenant des gains en capital), ce qui réduira la capacité de réinvestir de l’argent de façon productive dans l’économie.
À la suite du taux d’imposition effectif plus élevé des sociétés, le Canada pourrait perdre de son attrait pour les flux d’investissement en provenance de l’étranger.
Le taux d’imposition effectif plus élevé risque de légèrement entraver la création de petites entreprises et le rythme d’expansion de celles-ci.
Au Canada, les personnes à revenu élevé seront peut-être légèrement moins portées à prolonger leur carrière si leur taux d’imposition effectif augmente à mesure que leur épargne s’accumule. Elles seront aussi peut-être moins susceptibles d’épargner et de faire des placements risqués (plutôt que des placements productifs d’intérêts ou de dividendes) – ce qui réduira l’assiette fiscale et la réserve de fonds pour des placements qui améliorent la productivité canadienne.
La pénurie de professionnels de la santé au Canada pourrait s’aggraver légèrement du fait de la perte de revenu après impôts des médecins.
Il est vrai que les dommages nets provoqués par chacune de ces forces ne pèsent pas grandement sur l’économie globale. Il suffit toutefois de perdre 0,2 % de la capacité économique du Canada pour plus que contrebalancer l’augmentation prévue de quatre milliards de dollars de revenus par an.
Par ailleurs, une augmentation du taux d’inclusion des gains en capital a de fortes répercussions symboliques. Certains considèrent déjà le Canada comme un pays où il est difficile de faire des affaires, vu les obstacles rencontrés par les entreprises pour mettre en œuvre de grands projets d’infrastructure, un taux d’imposition marginal de plus de 50 % sur les particuliers (qui s’applique à un seuil de revenu relativement faible) et le sentiment que le gouvernement saisit toute occasion de percevoir de nouveaux impôts sur les industries florissantes. La dernière proposition ne fait qu’allonger cette liste.
Alors que la productivité stagne depuis près de huit ans, le Canada devrait dans l’idéal adopter des politiques économiques allant à l’encontre de cette évolution : encourager la croissance des dépenses en immobilisations, de la recherche et du développement, des prêts bancaires favorables aux entreprises et du secteur du capital-risque. En effet, en tant que petite économie ouverte attenante à l’économie dominante du monde entier, on peut avancer qu’il ne suffit pas de reproduire les politiques économiques américaines. Le Canada pourrait être obligé de se montrer beaucoup plus accueillant que les États-Unis envers les entreprises et les capitaux pour bien affronter la concurrence et prospérer.
– Avec la contribution de Vivien Lee, de Vanita Maharaj et d’Aaron Ma
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