La COVID-19 recule
Les cas de COVID-19 et les hospitalisations sont en repli dans une grande partie du monde (voir le graphique suivant). Même au Japon, les infections qui avaient récemment atteint des niveaux record connaissent un rapide déclin (voir le graphique suivant).
Les cas de COVID-19 reculent
Au 12 septembre 2022. L’évolution du nombre de cas est calculée d’après la variation sur sept jours de la moyenne mobile sur sept jours du nombre quotidien de nouvelles infections. Sources : Organisation mondiale de la Santé, Macrobond, RBC GMA
Au Japon, les cas de COVID-19 et les décès causés par la COVID-19 sont en baisse après avoir atteint des niveaux record
Au 11 septembre 2022. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et décès. Sources : Our World in Data, Macrobond, RBC GMA
Heureusement, deux vaccins destinés à contrer Omicron ont été approuvés ou sont en voie d’être approuvés, selon les territoires. Ces vaccins devraient être déployés à grande échelle au cours des prochains mois afin de renforcer la protection contre le virus et, espérons-le, prévenir les dommages éventuels liés à une vague hivernale.
De plus, il est encourageant de constater qu’aucun nouveau variant n’ait encore pris la place du sous-variant BA5 d’Omicron. Bien que la prudence nous engage à prévoir de futures vagues causées par de nouveaux variants plus contagieux (ou même un affaiblissement de l’immunité face au BA.5), le BA.5 est prédominant depuis déjà un certain temps, et aucun variant ne semble venir le remplacer. D’un autre côté, les vagues de grippe espagnole ont pris fin.
La Chine demeure une exception dans cette évolution positive de la COVID-19. Récemment, sa politique de tolérance zéro a asphyxié Chengdu, une ville de 21 millions d’habitants placée sous confinement pour une durée indéterminée. Selon CNN, plus de 70 villes chinoises ont été fermées partiellement ou en totalité depuis fin août, avec plus de 300 millions de personnes touchées. Il s’agit peut-être d’une initiative particulièrement zélée en vue du Congrès national prévu le 16 octobre. Il est plausible que les restrictions s’assouplissent par la suite, mais ce n’est qu’une spéculation.
L’Ukraine contre-attaque
Bien que l’Ukraine ait repoussé l’assaut initial de la Russie à la fin de février, les forces russes ont par la suite gagné du terrain. Cette tendance semble s’être inversée la semaine dernière, alors que l’Ukraine a récupéré une partie de son territoire à l’est du pays, près de la ville de Kharkiv.
Bien qu’il soit encore raisonnable de présumer que l’Ukraine prendra peu à peu l’avantage, grâce à l’approvisionnement continu en armes occidentales alors que les stocks russes s’amenuisent progressivement, ce dénouement est loin d’être garanti. La guerre persistera probablement un certain temps. Quant aux sanctions, elles devraient perdurer encore plus longtemps, et ce facteur est celui qui a le plus de poids sur l’économie et l’inflation.
La Russie se sanctionne maintenant toute seule, en ce qui concerne la vente de gaz naturel, après avoir régulièrement réduit la fourniture de cette ressource à l’Europe puis l’avoir complètement coupée début septembre. Les prix du gaz naturel ont bondi de 30 % de plus à l’annonce de cette nouvelle. Sur la base des prix actuels, l’Union européenne est en passe de dépenser sept fois plus en électricité et en gaz au cours de l’année à venir, par rapport à son budget habituel.
Compte tenu de la transformation du paysage énergétique, à savoir l’incertitude entourant l’approvisionnement russe combinée à la nécessité d’assurer la sécurité énergétique du pays, le Japon a annoncé son retour à l’énergie nucléaire, après avoir banni cette technologie pendant 11 ans à la suite de la catastrophe nucléaire de Fukushima. Le gouvernement entend remettre en marche 17 de ses 33 réacteurs nucléaires exploitables d’ici l’été prochain.
Scénarios d’inflation
Nous commencerons par un rappel des principaux points de vue sur l’inflation, avant d’aborder différents scénarios plus détaillés.
L’inflation en Amérique du Nord semble avoir atteint un sommet en juin et cédé du terrain en juillet, et elle devrait encore s’atténuer lorsque les données d’août seront publiées. Bien qu’il soit peu probable que les variations de prix mensuelles restent aussi léthargiques, de manière générale nous attendons une baisse des tensions inflationnistes, étant donné que les quatre principaux facteurs à l’origine de l’inflation élevée se sont renversés :
- La stimulation monétaire s’est transformée en resserrement monétaire.
- La relance budgétaire est également devenue un resserrement budgétaire, malgré les dernières initiatives.
- Les perturbations de chaîne logistique sont en grande partie résorbées (nous développerons ce sujet plus loin).
- La crise des marchandises est globalement résolue, à l’exception du gaz naturel.
Inflation – Les différents scénarios
Le scénario le plus probable est que l’inflation diminuera au cours des six prochains mois pour approcher, voire atteindre un taux de variation mensuel conforme aux normes historiques. Cette prévision, aussi raisonnable soit-elle, n’est pourtant pas le seul scénario envisageable (voir le graphique suivant).
Les scénarios d’inflation aux États-Unis laissent entrevoir un retour à la normale
Au 8 septembre 2022. Source : RBC GMA
Nous attribuons une probabilité de 55 % à ce scénario de base. En même temps, nous estimons à 20 % la probabilité que l’inflation reste trop élevée (cette probabilité est divisée en 10 % de probabilité que l’inflation demeure à son niveau actuel, et 10 % de probabilité qu’elle augmente), et à 25 % la probabilité que l’inflation tombe au-dessous de la normale.
L’existence d’un scénario de faible inflation peut surprendre, d’autant plus que sa probabilité dépasse celle du scénario dans lequel l’inflation resterait trop élevée. Mais l’apaisement de la crise des marchandises et des perturbations de chaîne logistique pourrait entraîner non seulement un recul des pressions sur les prix, mais aussi un renversement pur et simple, si la baisse du coût sous-jacent lié au transport et à la fourniture des biens compense en partie les augmentations subies jusque-là. D’autre part, les récessions constituent habituellement de puissantes forces désinflationnistes.
L’un des principaux objectifs de cette élaboration de scénarios est de faire ressortir le scénario de faible inflation, souvent négligé.
Comme le montre le graphique, nous examinons également les perspectives d’inflation à moyen terme, c’est-à-dire dans un an ou deux. Nous estimons à 80 % la probabilité que l’inflation finisse par se stabiliser à un niveau largement normal (dans la mesure où une inflation normale peut aller jusqu’à 3 % environ). Il reste donc 10 % de chances que l’inflation se maintienne durablement à un niveau trop élevé et 10 % de chances qu’elle demeure durablement trop faible. Le premier scénario serait attribuable à l’échec des banques centrales ou à d’autres chocs inflationnistes. Le deuxième pourrait se matérialiser si la récession s’avérait plus profonde ou si la tendance des prix touchés par les distorsions à revenir à leurs niveaux antérieurs s’accentuait.
Subventions européennes pour le gaz
Les gouvernements européens reconnaissent qu’ils ne peuvent pas mettre tout le poids de la flambée des prix du gaz naturel et de l’électricité sur les épaules des ménages, des entreprises et de certaines compagnies d’électricité. Une série de mesures ont donc été prises pour transférer ce fardeau au secteur public :
- Pour faire face à la crise énergétique, l’Allemagne a créé trois programmes d’aide financière, dont le montant global s’élève à 95 milliards d’euros.
- La France a adopté un plan similaire, estimé à 64 milliards d’euros.
- L’Italie aurait déjà dépensé 52 milliards d’euros.
- Enfin, le Royaume-Uni, dirigé par la nouvelle première ministre Liz Truss, a promis de geler les coûts de l’énergie pendant deux ans, ce qui représente 100 milliards de livres.
Ces mesures entraînent plusieurs répercussions importantes.
- Elles limitent la hausse des prix à la consommation, puisque ceux-ci sont maintenant artificiellement plafonnés dans plusieurs pays. Au Royaume-Uni, par exemple, l’indice des prix à la consommation (IPC) sur un an ne semble plus susceptible de dépasser 15 %, bien qu’à court terme, ce pays et l’Europe devraient encore souffrir d’une inflation plus forte qu’en Amérique du Nord.
- Certains gouvernements envisagent d’assujettir temporairement les sociétés énergétiques qui profitent de l’envolée des prix à un impôt extraordinaire. Un tel impôt découragerait les investissements dans les capacités futures, mais contribuerait au paiement des subventions.
- Ces initiatives auront pour effet de creuser les déficits budgétaires, au moment même où les opérations d’assouplissement quantitatif prenaient fin. Toutes choses étant égales par ailleurs, on peut s’attendre à une montée des taux obligataires.
- Les subventions directes ne constituent pas une vraie solution dans la mesure où elles n’incitent pas les gens à consommer moins d’énergie. Et sans baisse de la consommation, la pénurie d’énergie pourrait se révéler très grave cet hiver. Une meilleure solution consisterait à accorder des remises qui ne seraient pas liées à la consommation d’énergie réelle ou qui seraient plafonnées à un niveau limité de consommation, afin de récompenser ceux qui ont réduit leur utilisation.
- D’autres plans d’aide seront probablement adoptés au cours des années à venir. Comme plusieurs hivers s’écouleront peut-être avant l’Europe puisse se passer complètement du gaz naturel russe, des pressions s’exerceront pour que ces programmes soient prolongés ; d’ailleurs, le Royaume-Uni a déjà promis un soutien pour les deux prochains hivers. Par conséquent, la facture s’alourdira.
- La plupart des pays européens restent résolus à maintenir les sanctions, du moins jusqu’à présent, malgré les pressions de la Russie. La Bulgarie fait exception, puisqu’elle pourrait conclure un accord avec la Russie.
Inflation des prix du logement
Bien que les marchés du logement commencent à ralentir, cette composante de l’inflation demeure survoltée. Le phénomène n’est pas nouveau : la part du logement au sein de l’IPC affiche toujours un retard par rapport aux marchés.
Selon un récent rapport de la Maison-Blanche, il s’écoule 16 mois entre le moment où les prix des propriétés changent de direction et celui où ce changement se reflète dans la part équivalente des loyers au sein de la composante du logement de l’IPC. Étant donné que l’indice des prix des propriétés Case-Shiller n’a pas encore amorcé de véritable repli aux États-Unis, le logement devrait continuer d’alimenter l’inflation pendant quelque temps. Il finira toutefois par se modérer et, à ce moment-là, il devrait exercer une pression désinflationniste pendant longtemps.
Au Canada, l’effet devrait se faire sentir un peu plus rapidement. D’une part, les prix des propriétés reculent déjà depuis six mois. D’autre part, l’IPC canadien réagit plus rapidement aux variations des prix, en raison de la façon dont les prix y sont intégrés. Néanmoins, le décalage reste important : la part des prix des propriétés dans la composante du logement n’a que légèrement ralenti jusqu’à maintenant.
Variations de l’inflation à l’échelle régionale aux États-Unis
L’inflation d’un pays varie selon les régions. Dans le cas des États-Unis, l’inflation la plus faible se trouve dans le Nord-Est et la plus élevée, dans le Sud, ce qui paraît logique. En gros, cela correspond au flux migratoire des Américains pendant la pandémie. Lorsque la population augmente, les prix du logement grimpent davantage, l’économie surchauffe et l’offre de produits diminue. Tous ces facteurs ont un effet inflationniste dans le Sud.
En fait, un élément structurel non lié à la pandémie pourrait aussi être en jeu puisque la population du Nord-Est baisse au profit des États du Sud et de l’Ouest depuis de nombreuses années.
Dans les États du Nord-est, l’inflation est inférieure de 1,2 point de pourcentage à la moyenne nationale, tandis qu’elle dépasse la moyenne de 0,9 point de pourcentage dans le Sud. Les États de l’Ouest et du Midwest se situent entre les deux.
Analyse de la réduflation
La réduflation est sournoise : au lieu que le prix d’un produit monte, c’est la taille du produit qui diminue. Évidemment, ce phénomène est plus fréquent en période de forte inflation, quand les entreprises cherchent désespérément des moyens de répercuter la hausse des coûts des intrants.
Voici quelques exemples récents : la bouteille de Gatorade est passée de 32 à 28 onces (ce qui équivaut à une augmentation du prix de 14 %) et Domino’s Pizza a réduit sa portion d’ailes de poulet de 10 à 8 morceaux (une augmentation de prix de 25 %). Ce type de changement est plus courant dans le secteur des aliments et des boissons.
La réduflation est indubitablement insidieuse et a pour corollaire que l’inflation est plus élevée qu’elle ne le paraît pour le commun des mortels. Toutefois, contrairement à ce que l’on pourrait croire, elle est adéquatement prise en compte dans les indices des prix à la consommation (IPC). Dans la mesure du possible, l’IPC est déjà mesuré par part, de sorte que les estimations officielles reflètent cette inflation supplémentaire.
En temps normal, la réduflation a peu d’incidence sur l’inflation. Selon une étude menée au Royaume-Uni avant la pandémie, son incidence n’était importante que pour la confiserie et représentait seulement 1,2 point de pourcentage au total sur cinq ans dans ce secteur. Pour l’indice global des prix à la consommation, la réduflation n’a ajouté que 0,03 point de pourcentage à l’inflation au cours de la période. À l’heure actuelle, l’effet est sans doute nettement plus important, même si le résultat final reste encore négligeable.
Pour compliquer les choses, certaines entreprises réduisent la taille de leur produit, mais affirment en avoir amélioré la qualité en contrepartie. C’est le cas de Folgers : sa boîte de café standard est passée de 51 à 44 onces, mais la société soutient que la qualité a augmenté proportionnellement, si bien qu’il est toujours possible de faire 400 tasses avec la boîte. Or, l’IPC ne rend pas compte de cet effet déflationniste.
Dans le secteur tertiaire, l’équivalent de la réduflation, appelée déqualiflation, est moins connu. Ainsi, depuis la pandémie, le ménage des chambres d’hôtel n’est plus fait quotidiennement. On pourrait aussi avancer que les services d’éducation et de soins de santé offerts en ligne pendant la pandémie étaient de moins bonne qualité que ceux fournis en personne avant la pandémie. Pourtant, leur coût n’a généralement pas baissé, ce qui accroît l’inflation. Contrairement à la réduflation, les organismes gouvernementaux de statistique n’ont pas de mécanisme permettant de rajuster leurs estimations en fonction de la déqualiflation. Par conséquent, le taux d’inflation de certaines composantes du secteur tertiaire dépasse probablement un peu le taux officiel.
Inflation causée par la chaîne logistique
L’inflation attribuable aux chaînes logistiques devrait retomber à mesure que les chaînes logistiques se rétablissent. Plusieurs éléments se sont nettement améliorés : les coûts d’expédition par conteneurs ont chuté (voir le graphique suivant), les coûts du transport maritime de vrac sec sont presque revenus à la normale (voir le deuxième graphique) et les directeurs des achats du secteur manufacturier sont beaucoup moins inquiets en ce qui concerne l’inflation et leurs chaînes logistiques (voir le troisième graphique).
Les frais d’expédition continuent de baisser
En date de la semaine se terminant le 1er septembre 2022. Sources : Drewry Supply Chain Advisors, RBC GMA
Les coûts d’expédition redescendent de leur dernier sommet
Au 9 septembre 2022. La zone ombrée représente une récession. Sources : Baltic Exchange, Macrobond, RBC GMA.
Les prix augmentent et les livraisons des fournisseurs retournent à la normale
En date de juillet 2022. La zone ombrée représente une récession. Sources : Institute for Supply Management, Macrobond, RBC GMA.
Pressions inflationnistes secondaires
Certes, les principaux moteurs de l’inflation fléchissent. Reste à savoir dans quelle mesure les pressions inflationnistes secondaires joueront leur rôle et continueront d’alimenter l’inflation. Les trois facteurs clés sont l’étendue de l’inflation, les pressions attribuables aux salaires et les attentes inflationnistes.
- En ce qui concerne l’étendue de l’inflation, c’est-à-dire la mesure dans laquelle un grand nombre de produits différents deviennent plus chers, la situation reste préoccupante. L’étendue de l’inflation élevée s’est encore (légèrement) accrue en juillet. L’inflation a décliné en juillet pour une seule raison : le fléchissement des prix de l’essence. L’étendue de l’inflation élevée risque cependant de faire en sorte que l’inflation se perpétue d’elle-même.
L’inflation aux États-Unis a pris une ampleur considérable
En date de juillet 2022. Part des composantes de l’IPC dont la variation d’une année sur l’autre en % correspond aux fourchettes indiquées. Sources : Haver Analytics, RBC GMA
- Les pressions attribuables aux salaires commencent peut-être à se relâcher. Globalement, la croissance des salaires aux États-Unis n’a que légèrement fléchi. Cependant, dans le secteur de la restauration à service limité (c’est-à-dire la restauration rapide, qui emploie des travailleurs peu qualifiés ; ceux-ci sont les derniers embauchés et les premiers à perdre leur pouvoir de négociation lorsque le marché du travail perd de sa vigueur), qui joue un rôle d’indicateur, la croissance des salaires a nettement ralenti (voir le graphique suivant).
Ralentissement de la croissance des salaires des travailleurs peu qualifiés aux États-Unis
Restaurants à service restreint en juillet 2022, total des entreprises non agricoles du secteur privé en août 2022. Sources : Bureau of Labour Statistics et RBC GMA.
- Les prévisions d’inflation continuent de s’estomper. Tandis que les marchés financiers ont revu leurs prévisions d’inflation à la baisse il y a quelque temps, les petits commerçants ont été beaucoup moins enclins à leur emboîter le pas. Pour que l’inflation baisse durablement, les entreprises et les ménages doivent aussi être convaincus. Par bonheur, les attentes des entreprises en matière d’inflation ont affiché une baisse visible quoique petite, et celles des consommateurs une légère diminution (voir le graphique suivant).
Aux États-Unis, on commence à observer une baisse du côté des anticipations d’inflation
Attentes du marché au 2 septembre 2022, attentes des consommateurs et des entreprises évaluées par des sondages, en date d’août 2022. Sources : Federal Reserve Bank d’Atlanta, conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale, sondages auprès des consommateurs de l’Université du Michigan, Haver Analytics, RBC GMA.
Un autre signe qui montre que les entreprises commencent à voir les perspectives d’inflation différemment réside dans la baisse du pourcentage, ayant alors atteint un sommet record, des entreprises américaines qui cherchent à augmenter les prix (voir graphique suivant).
Le pourcentage des entreprises qui envisagent d’augmenter leurs prix reste élevé, mais diminue
En date de juillet 2022. La zone ombrée représente une récession. Sources : Étude économique menée par la National Federation of Independant Business (NFIB) auprès des PME, Macrobond et RBC GMA.
Les évolutions économiques varient
Les récentes données sur l’économie américaine ne sont pas mauvaises.
- L’indice ISM du secteur manufacturier est resté stable pour le mois d’août, aux alentours d’un niveau modéré de 52,8 tandis que l’indice ISM du secteur des services est passé de 56,7 à un niveau vigoureux de 56,9.
- Sur le plan de l’emploi aux États-Unis, 315 000 emplois ont été créés en août, ce qui représente deux légers bémols : une révision à la baisse de -107 000 emplois par rapport aux mois précédents, et une légère augmentation du taux de chômage de 3,5 % à 3,7 %.
- Les inscriptions au chômage ont également diminué au cours des trois dernières semaines, faisant suite toutefois à une augmentation prolongée plus forte au cours des quelques derniers mois.
- Le PIB américain du 3e trimestre enregistre actuellement un gain annualisé de l’ordre de 2 à 3 %, ce qui laisse présager qu’une récession n’est pas encore amorcée.
Au Canada par contre, la situation est bien plus délicate :
- Le marché de l’emploi canadien a diminué pour le troisième mois de suite (voir le graphique suivant), enregistrant un recul de 39 000 postes au total et de 77 000 emplois à temps plein.
- Le taux de chômage a donc augmenté, en passant de 4,9 % à 5,4 %.
- Bien que l’on soupçonne certains facteurs saisonniers d’avoir une incidence sur certains secteurs – on peut difficilement imaginer que 50 000 travailleurs du secteur de l’éducation canadien aient véritablement perdu leurs emplois en août – il y a une pointe de vérité dans d’autres secteurs : l’emploi dans la construction a chuté de 28 000 avec l’affaiblissement du marché du logement canadien.
Le marché de l’emploi canadien affiche des signes d’affaiblissement
En date d’août 2022. Sources : Statistique Canada, Macrobond, RBC GMA
L’économie canadienne a également vacillé dernièrement. La production économique, après être restée inchangée en mai, a enregistré un gain modéré de 0,1 % en juin, et une baisse de -0,1 % en juillet. Dans les faits, ceci se traduit par un trimestre dépourvu de croissance économique.
Donnes subjectives et objectives
Les données économiques « subjectives » aux États-Unis – les enquêtes et données similaires – se sont fortement affaiblies, tandis que les données économiques « objectives » – qui évaluent les véritables dépenses et embauches – n’ont pas diminué dans la même mesure (voir le graphique suivant).
Tant les données économiques subjectives qu’objectives sont passées au rouge
Au 1er septembre 2022. Sources : Citigroup, Bloomberg, RBC GMA
Selon le scénario le plus probable, les données objectives finiront par emboîter le pas aux données subjectives, et réaliser ainsi la prophétie de la récession. On trouve en effet logique que la détérioration du moral et des attentes précède le recul réel de l’activité. Mais l’on ne peut toutefois pas écarter un scénario d’« atterrissage en douceur » au cours duquel la morosité n’entraîne pas une dégradation des dépenses et des embauches. L’activité économique en pleine pandémie a connu suffisamment de revirements pour nous indiquer que les découplages étranges restent possibles.
Les perspectives générales continuent d’être abaissées
Il n’est pas surprenant, mais toujours révélateur de constater que les perspectives économiques générales des États-Unis – et de la plupart des économies – continuent d’être abaissées. Dans le cas du pays de l’Oncle Sam, le repli s’est récemment accéléré, et les prévisions générales pour le PIB en 2022 et 2023 sont pratiquement en chute libre (voir le graphique suivant). Nos prévisions à cet égard restent inférieures à la moyenne. Signalons aussi que les prévisions générales pour 2022 sont moins élevées que celles de 2021, et que les perspectives pour 2023 sont moins favorables que pour 2022.
Les prévisions de croissance générales aux États-Unis continuent de baisser
En date de juillet 2022. Sources : Consensus Economics, Fonds monétaire international, RBC GMA.
Le débat concernant le marché de l’emploi
Le débat continue de faire rage en ce qui concerne les attentes à l’égard du marché de l’emploi, étant donné le ralentissement rapide de l’activité économique. Le débat porte en grande partie sur la forme de la courbe Beveridge, qui examine le rapport entre les postes à pourvoir et le taux de chômage (voir le graphique suivant).
Courbe Beveridge aux États-Unis – rapport entre les postes à pourvoir et le taux de chômage
En date de juin 2022. Sources : BLS, Job Opening and Labor Turnover Survey (JOLTS), Macrobond, RBC GMA.
Les optimistes font valoir que le nombre des postes à pourvoir est sensiblement supérieur à la normale en regard du taux de chômage actuel. Cette situation est probablement attribuable aux problèmes d’appariement travailleur-employeur au sein de l’économie, compte tenu de nombreuses perturbations causées par la pandémie. Dans la mesure où ces perturbations s’atténuent et que le temps passe, les déséquilibres devraient s’estomper graduellement. Nous espérons qu’à mesure que l’économie ralentira, les entreprises mettront de côté leurs plans d’embauche assez chers plutôt que de mettre à pied les travailleurs actuels. Cette situation serait inhabituelle, mais plausible, en partie parce qu’elle ferait simplement fléchir la courbe Beveridge, laquelle reviendrait à sa normale historique.
En revanche, les pessimistes signalent qu’on n’a jamais vu diminuer le nombre des postes à pourvoir sans constater aussi la perte d’un nombre considérable d’emplois. Ils avancent que le taux de chômage naturel semble avoir augmenté et que l’économie devrait éventuellement s’incliner devant cette réalité. Réduire l’effervescence de l’économie exigerait vraisemblablement la hausse de plusieurs points de pourcentage du taux de chômage. Par ailleurs, chaque fois que le taux de chômage a augmenté, même modestement, les États-Unis ont connu une récession.
Les deux camps ont de bons arguments, et la bonne réponse devrait se trouver au milieu. Nos opinions penchent quelque peu du côté des pessimistes. Autrement dit, le taux de chômage n’augmentera probablement pas autant que d’habitude, mais il faudra vraisemblablement une récession pour ralentir l’économie, ce qui provoquera la perte d’un nombre important d’emplois.
Le marché canadien du logement s’essouffle
Normalement, le marché canadien du logement génère plus de 20 % de la production économique du pays, lorsqu’on combine la production attribuable à la construction résidentielle, aux rénovations, aux courtiers, aux avocats du secteur immobilier, aux prêteurs hypothécaires, à l’achat d’appareils électroménagers et d’ameublement, ainsi que l’effet de richesse habituellement produit par la hausse des prix des logements.
Actuellement, les prix des logements au Canada n’augmentent certainement pas, mais il existe une certaine confusion en ce qui concerne précisément leur évolution récente.
Évidemment, les prix des logements ont baissé davantage dans les territoires où ils avaient le plus augmenté auparavant. Les différences entre les régions sont importantes.
Les estimations varient aussi énormément pour l’ensemble du pays. Selon la déclaration la plus stupéfiante, les prix des logements ont baissé de 17 % à l’échelle du pays, mais il s’agit d’une estimation inexacte, puisqu’elle est fondée sur un indicateur MLS sous-pondéré qui ne prend pas en compte la composition changeante des ventes de logements. Si davantage de maisons luxueuses sont vendues une année, puis davantage d’appartements en copropriété l’année suivante, les prix des logements donneront l’impression de s’être effondrés, même si les prix dans chacune de ces deux catégories (les maisons luxueuses et les appartements en copropriété) n’ont absolument pas changé.
À l’autre extrême se trouvent l’indice de prix de maison Teranet/Banque Nationale et l’indice des prix des maisons neuves ; selon le premier, les prix des logements ont à peine diminué (de 0,3 %), et selon le second, ils continuent de grimper. Ces indices comportent toutefois d’importantes lacunes.
L’indice Teranet prend uniquement en compte les paires de ventes de propriétés, soit les propriétés qui ont été vendues deux fois selon la base de données utilisée, ce qui limite grandement l’échantillon. Dans le passé, l’indice Teranet a présenté d’importants retards par rapport aux tournants signalés par des mesures plus utiles, ce qui représente un grave inconvénient pour qui tente de suivre l’évolution des prix des logements en temps opportun.
Quant à lui, l’indice des prix des maisons neuves exclut complètement un segment important du marché des logements (celui des appartements en copropriété), la composante de l’indice liée à la valeur des terrains est obtenue de façon peu rigoureuse (elle est estimée par les constructeurs d’habitations), et surtout, les nouveaux logements sont habituellement construits à la périphérie d’une zone urbaine : puisque chaque génération de nouveaux logements est construite plus loin du centre-ville, sa valeur est moins élevée. Il ne s’agit donc pas d’une véritable comparaison de données équivalentes. En outre, selon les données empiriques, il s’agit d’un indice extrêmement lissé, qui fait rarement ressortir les hausses et les baisses importantes (voir le graphique suivant).
Le marché du logement canadien est en voie de correction
En date de juillet 2022. L’indice IPP MLS et l’Indice de Prix de Maison Teranet – Banque Nationale mesurent la variation du prix de revente des maisons au fil du temps. Sources : Association canadienne de l’immeuble, Teranet/Banque Nationale du Canada, Statistique Canada, Macrobond, RBC GMA
La mesure que nous privilégions se situe entre ces deux estimations extrêmes. Il provient également de MLS, mais établit un prix de référence fondé sur le type et la dimension de l’habitation vendue. Il estime jusqu’à présent une baisse de 9,9 % du prix des maisons (voir le graphique suivant).
La hausse du prix des maisons freine le recul à l’heure actuelle
En date de juillet 2022. L’indice IPP MLS et l’Indice de Prix de Maison Teranet – Banque Nationale mesurent la variation du prix de revente des maisons au fil du temps. Sources : Association canadienne de l’immeuble, Teranet/Banque Nationale du Canada, Statistique Canada, Macrobond, RBC GMA
Il y a quelques mois, nous avons revu à la baisse nos prévisions du prix des maisons, et anticipons actuellement un repli cumulatif oscillant entre 20 et 25 % entre le sommet et le creux du prix des logements au Canada. Cela ramènerait presque le prix des maisons aux niveaux d’avant la pandémie. Jusqu’à maintenant, 30 % de la hausse du prix des maisons s’est résorbée.
Prêts étudiants aux États-Unis
Il y a plusieurs semaines, l’administration Biden a émis un décret présidentiel prévoyant un budget de 500 milliards de dollars pour éponger de 10 000 à 20 000 dollars du solde des prêts étudiants fédéraux des personnes qui gagnent un revenu inférieur à 125 000 dollars, et reportant le paiement des intérêts sur les prêts étudiants jusqu’à 2023.
Il s’agit là d’importantes dépenses budgétaires, quoiqu’échelonnées sur plusieurs années, puisque la radiation d’un prêt entraîne la perte des intérêts et du capital dont le remboursement est amorti sur plusieurs années.
Les opposants à cette proposition arguent qu’elle ne règle pas le problème des personnes croulant sous le poids des dettes d’études, qu’elle punit celles qui ont fait des sacrifices pour les rembourser plus rapidement, qu’elle entraîne un transfert d’argent au segment le plus éduqué de la société et qu’elle ne s’applique pas aux futurs diplômés. Elle néglige également la solution la plus durable qui consisterait à réduire les frais universitaires aux États-Unis qui connaissent une croissance exponentielle. Cependant, un décret présidentiel n’a pas force de loi et est limité quant à ce qu’il peut accomplir. L’adoption d’une loi est par ailleurs peu probable compte tenu du manque d’appui au Sénat.
Nous avons toutefois omis le plus important : il y a fort à parier que la Maison-Blanche ne pourra pas tenir cette promesse. Des difficultés juridiques de taille sont en effet attendues, et certains juristes estiment que le décret présidentiel va trop loin. Il s’agit d’un gain politique pour la Maison-Blanche, peu importe l’issue du décret : la politique sera mise en place ou, si elle est bloquée, pourra servir à rallier les électeurs lors des élections de mi-mandat.
Un élément important qui aura des répercussions, quelle que soit l’issue des contestations judiciaires, concerne le gel des intérêts applicable aux prêts d’études pendant la pandémie. Les paiements reprendront d’ici janvier. Avec des prêts d’études équivalant à 1,6 billion de dollars US et un taux d’intérêt de 5 %, assez conservateur, ce sont 80 milliards de dollars US en paiements d’intérêts additionnels qui seront réduits des dépenses de consommation et pourraient générer des difficultés financières dans certains ménages en période de hausse de taux et d’inflation élevée.
Le risque de récession demeure élevé
Nous continuons d’estimer à 70 % la probabilité qu’une récession survienne aux États-Unis ou au Canada d’ici la fin de 2023, le risque étant bien plus élevé en Europe et au Royaume-Uni. Il convient de souligner les récents indicateurs d’inflation.
Aux États-Unis, il y a longtemps que l’écart de taux entre les obligations américaines à deux ans et à dix ans s’est inversé, et maintenant celui corrigé de l’inflation s’est aussi inversé (voir le graphique suivant). Ce fait n’est généralement pas utilisé comme une mesure du risque de récession, mais transmet sans doute plus d’information que d’habitude, puisqu’il permet de faire abstraction des distorsions qui pourraient découler des attentes de baisse d’inflation intégrées dans les taux obligataires nominaux.
La courbe des taux réels s’est inversée après avoir atteint un sommet pluriannuel
Au 22 août 2022. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Dans le même temps, un autre indicateur traditionnel annonciateur d’une récession – la pente des taux de 3 mois à 10 ans – est très près de s’inverser. En fait, il ne s’agit probablement que d’une question de semaines en raison des hausses de taux de la Réserve fédérale qui feront grimper le taux de 3 mois au fil du temps. L’inversion de la courbe des taux des obligations à deux et à dix ans se produit 18 mois avant le début d’une récession, et 15 mois avant le sommet de l’indice S&P 500, tandis que celle de la courbe des taux de 3 mois à 10 ans se produit plus près du début de la récession (11 mois et 10 mois plus tôt, respectivement). Nous devons admettre que nous nous attendons, nous, à ce qu’une récession se produise dans un avenir rapproché, et le sommet du S&P 500 est probablement déjà passé.
Les demandes de prestations d’assurance-emploi ont reculé au cours des dernières semaines, mais leur hausse du creux au sommet récent était juste assez pour déclencher un autre signal de récession historique et retenir notre attention (voir le graphique suivant). Le recul des demandes de prestations d’assurance-emploi n’invalide pas le signal, si nous nous fions aux événements du début des années 1990 et des années 2000. Curieusement, la hausse des demandes de prestations d’assurance-emploi est toujours survenue en période de récession, alors qu’actuellement la récession ne fait l’objet que d’une prévision.
La hausse des demandes d’assurance-emploi aux États-Unis est annonciatrice d’une récession
En date de la semaine du 15 août 2022 (semaine 33). Sources : Department of Labor des États-Unis, Macrobond, RBC GMA
À ce propos, nous restons d’avis que la récession qui pourrait frapper le Canada sera pire que celle aux États-Unis. En effet, notre récent scénario de hausse des taux d’intérêt réalisé au moyen de notre modèle économétrique à grande échelle indique que, comme prévu, l’économie et le marché du logement du Canada sont plus sensibles aux taux que ceux des États-Unis.
Le resserrement monétaire se poursuit
Les mesures musclées de resserrement monétaire se poursuivent. La Banque du Canada a augmenté les taux de 75 points de base (pb) supplémentaires, la Banque centrale européenne, de 75 pb, et la Reserve Bank of Australia, de 50 pb. De son côté, la Réserve fédérale américaine devrait relever les taux des fonds fédéraux de 75 pb le 21 septembre.
Deux thèmes importants ressortent de la décision de la banque centrale canadienne.
- La Banque du Canada a refusé de crier victoire malgré le recul de l’inflation en juillet. Celui-ci s’explique tout simplement par la baisse des prix du pétrole, ce qui signifie que l’inflation ne s’essouffle guère. Il s’agit d’un fait, mais on peut également affirmer que les données indiqueront probablement un affaiblissement de l’inflation en août et que certains des principaux facteurs d’inflation font actuellement marche arrière. Quoi qu’il en soit, les banques centrales ne peuvent se permettre de perdre leur crédibilité en matière de lutte contre l’inflation et de présenter de telles données ni même de revendiquer ne serait-ce qu’un soupçon de succès tant et aussi longtemps que la victoire totale sur l’inflation ne sera pas assurée. Les banques centrales devraient donc être portées à privilégier un resserrement trop sévère plutôt que trop faible.
- La Banque du Canada n’a certainement pas terminé de relever les taux d’intérêt, mais les prochaines hausses seront probablement moins élevées. La première étape est donc franchie. La banque centrale a relevé les taux de 100 pb en juillet et de 75 pb en septembre. Ses sous-propos ont incité les marchés à anticiper une hausse de 50 pb en octobre, suivie d’une hausse de 25 pb en décembre. Cette décélération constante ferait culminer le taux directeur à 4 % vers le début de l’an prochain.
Les marchés anticipent également un sommet d’environ 4 % aux États-Unis (voir le graphique suivant).
Les prévisions concernant le taux plafond des fonds fédéraux ont fortement augmenté
Au 30 août 2022. Sources : Bloomberg, RBC GMA
– Avec la contribution de Vivien Lee, de Vanessa Adamset et d’Aaron Ma
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