L’économie mondiale est toujours au ralenti, elle qui avait connu une reprise soutenue l’an dernier. La croissance décevante de la Chine, que l’on doit à la problématique des chaînes logistiques, aux difficultés du marché immobilier et au durcissement de la réglementation des sociétés technologiques, est particulièrement préoccupante. Les effets d’un ralentissement important en Chine pourraient se répercuter ailleurs, puisque le pays est la deuxième économie en importance au monde et le plus grand catalyseur de la croissance mondiale. Cela dit, il se peut que certains des plus gros obstacles économiques aient commencé à s’estomper. Les cas de COVID-19 chutent partout dans le monde, et les chaînes logistiques pourraient enfin se débloquer. Les prix demeurent cependant sous pression et, contrairement à ce que l’on pensait au départ, l’inflation pourrait ne pas être que temporaire. Ainsi, les économistes ont progressivement revu à la baisse leurs prévisions de croissance et révisé à la hausse leurs estimations de l’inflation (figures 1 et 2). Nos propres prévisions ont suivi une trajectoire similaire et restent inférieures à la moyenne pour la croissance, mais supérieures pour l’inflation.
Figure 1 : PIB réel moyen pondéré, selon les prévisions générales
Prévisions de croissance des principaux pays développés
Nota : Au 25 octobre 2021. Source : Consensus Economics
Figure 2 : IPC moyen pondéré selon les prévisions générales
Prévisions d’inflation pour les principaux pays de l’OCDE
Nota : Au 25 octobre 2021. Source : Consensus Economics
Frais d’expédition, arriérés de commandes et salaires en hausse
Divers facteurs contribuent à faire croître l’inflation à court terme. Les frais d’expédition ont atteint un sommet sur plus de 10 ans d’après l’indice Baltic Dry Freight, tandis que l’indice ISM du secteur manufacturier américain montre que les retards dans les carnets de commandes ont touché leur plus haut niveau en 25 ans (figures 3 et 4). Ces indicateurs sont toutefois redescendus, si bien qu’on pourrait croire que le pire est derrière nous. Reste que nous sommes encore loin des normes historiques. La croissance des salaires fulgurante aux États-Unis est un autre facteur inflationniste. À la figure 5, qui montre la variation annuelle du salaire horaire moyen des travailleurs américains, on peut voir que le rythme de croissance observé récemment n’a jamais été aussi élevé en 35 ans.
Figure 3 : Indice Baltic Dry du fret
Nota : Données en date du 22 octobre 2021. Source : Bloomberg
Figure 4 : Industrie manufacturière ISM États-Unis
Commandes en attente
Note: Au 31 août, 2021. Sources : RBC GMA, RBC MC
Figure 5 : Salaire horaire moyen aux É.-U.
Nota : Données en date du 30 septembre 2021. Sources : Bureau of Labor Statistics, Haver Analytics, RBC GMA
Banques centrales : resserrement en vue
Maintenant que les dommages économiques causés par la pandémie sont presque tous réparés et que l’inflation est assez élevée, les banques centrales sont prêtes à réduire les mesures de stimulation monétaire. Par exemple, rien que cette semaine, la Banque du Canada a mis fin à son programme d’achats d’obligations et a indiqué qu’elle pourrait commencer à relever les taux vers le milieu de 2022. Aux États-Unis, la Réserve fédérale américaine (Fed) a évoqué une possible réduction des achats d’obligations (qui se chiffrent actuellement à 120 milliards de dollars américains par mois) d’ici quelques mois. Toutefois, il n’y aurait pas de hausse de taux avant que cette ronde d’assouplissement quantitatif (AQ) ne soit terminée, ce qui pourrait se produire vers le milieu de 2022. Ce que les investisseurs veulent savoir, c’est ce qui arrivera après la fin de l’AQ et à quel point la Fed relèvera les taux. Les investisseurs modifient leurs attentes constamment en fonction de l’actualité. Cependant, si l’on se fie au marché des contrats à terme, les investisseurs s’attendent actuellement à deux hausses de taux par la Fed en 2022 et à deux ou trois autres en 2023 (figure 6).
Figure 6 : Taux implicite des fonds fédéraux
Contrats à terme sur 12 mois
Sources : Bloomberg, RBC GMA
Augmentation des taux obligataires, en particulier pour les titres à court terme
Les taux des obligations à court terme ont augmenté en prévision d’un resserrement imminent des mesures des banques centrales, mais la portion à long terme de la courbe a été soit plate, soit légèrement descendante dans les dernières semaines. Le taux des obligations américaines à deux ans a grimpé à 47 points de base, ce qui est presque deux fois plus que les 21 points de base de septembre, alors que les investisseurs ont révisé leurs prévisions d’augmentation des taux (figure 7). Le taux des obligations américaines à 10 ans a progressé lui aussi pour s’élever à 1,69 % en octobre, ce qui est près du sommet qu’il avait atteint au printemps, quoique bien en deçà du point d’équilibre estimé par notre modèle (figure 8). Les taux des titres à long terme n’ont cependant pas augmenté, et ont même baissé, récemment. Résultat, l’écart entre les obligations du Trésor à 10 et à 30 ans s’est rétréci (figure 9). La croissance des taux des titres à court terme est le reflet des attentes du marché, qui est d’avis que la Fed est sur le point de commencer un cycle de resserrement, tandis que l’aplanissement de la portion à long terme de la courbe pourrait indiquer que les investisseurs ont peu confiance en la croissance économique à long terme. C’est donc dire que le marché obligataire envoie des signaux contradictoires quant aux perspectives économiques.
Figure 7 : Taux des obligations d’État américaines à deux ans
Nota : Données en date du 26 octobre 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 8 : Taux des obligations du Trésor américain à dix ans
Fourchette d’équilibre
Nota : Données en date du 25 octobre 2021. Sources : RBC GMA, RBC MC
Figure 9 : Courbe de taux des États-Unis
Taux des obligations d’État à 30 ans moins taux des obligations d’État à 10 ans
Nota : Données en date du 26 octobre 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Peu de tensions sur les marchés du crédit
Les marchés du crédit sont restés relativement stables malgré la volatilité que connaissent les marchés financiers depuis septembre. Les écarts n’ont augmenté que légèrement dans les dernières semaines, et les petits épisodes de dégagement ont été vus comme des occasions d’achat par les investisseurs en quête de revenu dans un contexte de faibles rendements. Les écarts entre les obligations américaines à 10 ans et les obligations de sociétés de catégorie investissement et à rendement élevé avoisinent toujours leurs plus bas niveaux depuis une décennie (figure 10). Avec des écarts aussi minces par rapport à la norme, cependant, les marchés du crédit ont peu de marge de manœuvre pour absorber une hausse des taux des obligations d’État. À partir d’un certain point, toute augmentation supplémentaire du taux des titres du Trésor fera pression sur les prix des obligations à rendement élevé.
Figure 10 : Écarts de taux des obligations de sociétés américaines
Écart avec le taux des obligations du Trésor américain à dix ans
Nota : Données en date du 25 octobre 2021. Sources : Barclays Capital, Bloomberg et RBC GMA
Rebond sur les marchés boursiers
Les actions se sont appréciées considérablement en octobre tandis que se poursuivait la reprise économique, malgré un ralentissement. Qui plus est, la situation entourant Evergrande en Chine semble gérable, et les bénéfices ont surpassé les attentes. Les titres cycliques se sont particulièrement bien comportés, portant l’indice composé TSX vers un nouveau sommet avec une hausse de presque 26 % qui a fait du Canada le plus performant des principaux marchés boursiers depuis le début de l’année, en dollars américains (figure 11). Les actions asiatiques et des marchés émergents ont considérablement tiré de l’arrière, ce que l’on doit en grande partie aux difficultés de la Chine qui ont miné la confiance des investisseurs dans ces régions. Aux États-Unis, l’indice S&P 500 a lui aussi franchi un nouveau record, propulsé par la vigueur des bénéfices et le redressement des titres de sociétés technologiques à mégacapitalisation. Comme le S&P 500 se situe à plus d’un écart type au-dessus de la juste valeur estimée par notre modèle, nous reconnaissons que les actions sont chères et que les valorisations sont exagérées (figure 12).
Figure 11 : Principaux indices boursiers
Indices de l’appréciation cumulative des titres en USD
Nota : Données en date du 25 octobre 2021. Appréciation des titres en USD. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 12 : Fourchette d’équilibre de l’indice S&P 500
Bénéfices et valorisations normalisés
Nota : Les estimations de la juste valeur sont présentées à titre indicatif seulement. Des corrections sont toujours possibles et les valorisations ne limiteront pas le risque de dommages résultant de chocs systémiques. Il est impossible d’investir directement dans un indice non géré. Source : RBC GMA
Bénéfices : résultats meilleurs que prévu, stabilisation des estimations
Si les investisseurs continuent de payer les actions au prix fort, c’est peut-être parce que les bénéfices des sociétés dépassent continuellement les estimations des analystes. En effet, la vaste majorité des sociétés du S&P 500 ont encore une fois battu les attentes, selon 82 % des résultats rapportés jusqu’à maintenant pour le troisième trimestre de 2021 (figure 13). L’un des thèmes récurrents depuis le début de la pandémie est que les estimations ne sont pas assez élevées et que les analystes doivent constamment les réviser pour rattraper la réalité. On commence toutefois à observer un changement de tendance. Nombre d’entreprises ont dit craindre pour la croissance de leurs bénéfices en raison de l’augmentation des coûts et des problèmes liés aux chaînes logistiques. Ainsi, les prévisions de bénéfices ont arrêté d’augmenter, si bien qu’après presque un an de révisions à la hausse persistantes, un équilibre s’est installé entre révisions à la hausse et à la baisse (figure 14). Notons également que la croissance des bénéfices pourrait être menacée par une éventuelle augmentation des impôts.
Figure 13 : Sociétés qui ont déclaré des résultats supérieurs aux prévisions générales
Nota : Données en date du 27 octobre 2021. Source : Refinitiv
Figure 14 : Actions américaines
Sociétés dont les bénéfices ont été revus à la hausse
Nota : Données en date du 25 octobre 2021. Sources : Citi, RBC GMA
Composition de l’actif : maintien d’une surpondération des actions et d’une sous-pondération des obligations
Selon notre scénario de base, l’économie poursuivra son expansion, mais à un rythme qui ralentira, et l’inflation demeurera importante à moyen terme, ce qui incitera les banques centrales à réduire le degré de détente monétaire graduellement. Dans ce contexte, les taux obligataires devraient continuer de grimper, ce qui devrait nuire aux titres à revenu fixe. Nous prévoyons que les rendements de ceux-ci seront faibles, voire légèrement négatifs, au cours de l’année à venir. Par conséquent, nous maintenons la sous-pondération des titres à revenu fixe dans notre composition d’actif. À notre avis, le potentiel de hausse des actions demeure supérieur à celui des titres à revenu fixe. Nous reconnaissons que les valorisations sont élevées et laissent peu de place à l’erreur ; toutefois, il est possible que les bénéfices des sociétés continuent de profiter de la croissance solide du PIB nominal, ce qui devrait faire durer le marché haussier. Compte tenu du rapport risques-occasions, nous maintenons la surpondération des actions, mais nous conserverons également une petite part de liquidités pour protéger les portefeuilles contre la volatilité. Nous pourrions aussi les utiliser de façon tactique si de nouvelles occasions se présentent. Nos recommandations actuelles de répartition de l’actif d’un portefeuille équilibré mondial sont les suivantes : 64,0 % en actions (pondération stratégique « neutre » de 60 %), 33,5 % en obligations (pondération stratégique « neutre » de 38 %) et 2,5 % en liquidités.
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