Dans cet épisode, Jeff Roberts, gestionnaire de portefeuille institutionnel, s’entretient avec Mark Dowding, premier directeur général et chef des placements de l’équipe Titres à revenu fixe BlueBay de RBC Global Asset Management (UK) Limited. M. Dowding nous parle de la reprise des marchés financiers qui s’est produite au cours du mois qui a suivi les annonces du président américain Trump sur le « Jour de la libération », nous dit s’il s’agit d’un élément indicatif de ce qui se passera, ou si nous devons nous attendre à une plus grande volatilité.
Voici quelques-uns des sujets abordés dans cet épisode :
L’effet des marchés des titres du Trésor sur la politique économique américaine
Situation délicate pour la Réserve fédérale américaine
Perspectives des marchés mondiaux du crédit
Risques liés au déficit budgétaire des États-Unis
Occasions de gestion active dans un contexte de désintégration du marché
Cet épisode de balado a été enregistré le 7 mai 2025.
Temps d'écoute : 27 minutes, 41 secondes
Transcription
Bonjour et bienvenue à ce nouveau balado Le pouls du secteur institutionnel, dans lequel nous abordons des sujets intéressants et pertinents pour les investisseurs institutionnels. Je m’appelle Jeff Roberts. Je suis gestionnaire de portefeuille institutionnel à PH&N Institutionnel, et animateur de l’épisode d’aujourd’hui. À mon avis, notre sujet d’aujourd’hui n’a pas besoin de présentation. Il est presque impossible d’ignorer l’actualité du mois dernier, depuis que Donald Trump a annoncé l’imposition d’importants droits de douane à la quasi-totalité de ses partenaires commerciaux mondiaux.
Et dire que les jours qui ont suivi cette annonce ont été tumultueux serait un euphémisme. Les marchés boursiers ont dégringolé, surtout aux États-Unis. Sur les marchés obligataires, les obligations du Trésor se sont emballées, le rendement en revenu de l’obligation à 10 ans connaissant sa plus forte hausse hebdomadaire depuis près d’un quart de siècle. D’autres actifs ont également fait montre d’une grande volatilité, même si elle n’a pas été aussi spectaculaire que celle des actions et des obligations du Trésor.
Puis aujourd’hui, à peine un mois plus tard, de nombreux actifs financiers sont retournés à des niveaux proches de ceux du début de la crise. Je pense que cela a probablement laissé beaucoup d’entre nous perplexes. Notre invité d’aujourd’hui, Mark Dowding, est donc là pour tenter de donner un sens à tout cela. Mark est premier directeur général et chef des placements de l’équipe Titres à revenu fixe BlueBay à RBC Global Asset Management (UK) Limited. Pour ceux qui ne le savent pas, l’équipe de Mark, BlueBay, est composée des spécialistes des titres à revenu fixe et des titres de créance mondiaux de RBC Gestion mondiale d’actifs, et elle supervise environ le quart des actifs sous gestion de RBC GMA.
Mark s’est forgé une solide réputation dans les milieux financiers grâce à ses observations sur l’économie et les marchés mondiaux, qu’il rattache avec perspicacité aux titres à revenu fixe mondiaux, qui composent son quotidien. Et c’est exactement ce que je vous demande de faire aujourd’hui, Mark : essayer de nous aider à comprendre ce qui se passe et ce que cela signifie pour notre portefeuille de titres à revenu fixe plus précisément.
Bienvenue, Mark. Merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd’hui.
C’est un plaisir, Jeff. Merci pour l’invitation.
Comme je viens de le dire, un peu plus d’un mois s’est écoulé depuis l’annonce faite par Donald Trump à Washington, à l’occasion du « jour de la libération ». Mark, ce n’est pas une coïncidence si vous revenez d’une visite dans cette même ville. Après votre passage à Washington, quelles sont vos réflexions sur l’économie mondiale ? Avec le recul, avez-vous appris quelque chose de particulier pendant votre séjour, qui a influencé vos perspectives pour le reste de l’année ?
YOui. En gros, j’ai l’impression que nous vivons une période assez mouvementée sur le plan de l’économie mondiale et de ce qui se passe aux États-Unis, en bonne partie en raison de la politique américaine.
En somme, après ce qui semble avoir été un revirement de Trump à la mi-avril – alors qu’il a suspendu les droits de douane supplémentaires pendant 90 jours, puis formulé des commentaires sur le remplacement du président de la Fed, sur lesquels il est évidemment revenu assez rapidement –, on s’est demandé s’il signifiait que le pire était maintenant derrière nous. Je pense que cela explique en partie l’évolution des cours sur les marchés et le fait que les actifs se sont redressés. Je me suis donc rendu à Washington la semaine dernière, désireux de tester cette thèse intégrée aux marchés.
D’après ce que je vois et ce que j’entends, je me demande si les marchés ne sont pas revenus à une position plus complaisante. J’ai le sentiment qu’au cours du mois dernier, ce que nous avons vu de la part de Trump était plutôt un recul temporaire, et certainement pas une capitulation face à la pression du marché.
Le fait que les marchés se soient redressés depuis incite à certains égards l’administration à poursuivre certains de ses projets. On sent qu’il y a manifestement une idée profondément ancrée de faire évoluer l’économie américaine d’une manière que de nombreux acteurs des marchés financiers n’ont peut-être pas encore pleinement comprise à ce stade-ci.
Je pense donc que cette période mouvementée qui nous attend pourrait bien se traduire par une volatilité persistante du cours des actifs financiers mondiaux dans les semaines et les mois à venir.
Merci. Et si nous essayons d’établir un lien entre tout cela et les marchés des titres à revenu fixe ou peut-être de nous concentrer sur le marché obligataire, pourriez-vous résumer la réaction des marchés mondiaux des titres à revenu fixe aux annonces de droits de douane le jour de la libération et la volatilité qui s’en est suivie le mois dernier, et peut-être nous dire ce que vous avez appris de cette période ?
Si l’on se reporte au début du mois d’avril, je pense qu’initialement, un certain nombre d’acteurs du marché étaient sous le choc que l’administration mette à exécution sa menace d’imposer des droits de douane. En outre, les taux vraiment élevés de ces droits de douane imposés à de nombreux partenaires commerciaux et la manière dont ils ont été communiqués ont rapidement fait naître une réelle inquiétude d’une perturbation économique majeure et d’une éventuelle récession de l’économie américaine.
Au début de l’année, l’économie américaine connaissait certes un momentum économique raisonnable. On aurait pu croire que, si Donald Trump avait passé tout son temps à jouer au golf à Mar-a-Lago le lendemain de son investiture, l’économie aurait été en passe de connaître une croissance de deux points de pourcentage et demi cette année.
Mais, bien sûr, nous ne sommes plus sur cette trajectoire. Cette inquiétude de voir les droits de douane entraîner d’importantes perturbations ont suscité des craintes de récession, qui ont d’abord entraîné une baisse sensible des taux obligataires, l’idée étant qu’une correction des marchés boursiers puisse illustrer le fonctionnement normal des corrélations.
Mais ce mouvement du marché a rapidement soulevé la crainte que le contexte signalait plutôt une stagflation, car si les droits de douane ont des répercussions sur la croissance, ils exercent aussi des pressions à la hausse sur les prix. De ce point de vue, l’idée d’un choc d’offre négatif – un choc qui exerce simultanément des pressions à la hausse sur l’inflation et à la baisse sur la croissance – a fini par provoquer une vente massive sur le marché des obligations du Trésor. Après un repli initial, les taux des obligations du Trésor ont donc perdu le terrain précédemment gagné, puis nous avons observé une importante accentuation de la courbe de rendement, les titres à long terme étant soumis à une pression accrue.
Tandis que la vente massive prenait de l’ampleur, elle s’est en quelque sorte concentrée sur la « liquidation des États-Unis » sur les marchés financiers. En effet, la crédibilité politique de l’administration américaine a été remise en question, et je pense que c’est cette réaction du marché obligataire qui a amené l’administration à prendre un pas de recul et à annoncer une pause.
Les décideurs étaient alors probablement plus sensibles à ce qui se passait sur le marché obligataire que sur le marché boursier en tant que tel. Mais à bien des égards, c’est l’évolution des cours sur les marchés qui a provoqué un certain revirement. Évidemment, dans les jours qui ont suivi, les marchés se sont redressés, les écarts de crédit, qui s’étaient creusés, se sont un peu resserrés et les rendements en revenu se sont stabilisés. J’ai l’impression qu’au sein de l’administration, on croit que les marchés financiers feront toujours ce qu’ils veulent, qu’il y aura toujours des périodes de volatilité, mais le fait qu’ils soient revenus à un niveau semblable à celui de la fin mars, signifie peut-être que l’administration peut reprendre ses projets.
Il y a donc lieu de s’inquiéter de ce que le proche avenir nous réserve. Il sera intéressant de voir si l’inquiétude se manifestera de nouveau sur le marché obligataire. Je pense que la seule autre chose à couvrir pour cette question est ce qui se passe au sein de la Fed. N’oublions pas ce qu’il advient de la politique monétaire.
Nous réalisons cet enregistrement juste avant une réunion du FOMC, et je peux prédire avec certitude qu’elle ne débouchera sur rien de nouveau lorsque Jerome Powell publiera sa déclaration plus tard dans la journée (7 mai 2025). En ce qui concerne la politique monétaire, nous pensons que la Fed se trouve dans une situation quelque peu délicate.
Elle subit de la pression de la Maison-Blanche. Mais la vérité est qu’il est très difficile pour la Fed d’envisager une réduction des taux d’intérêt tandis que l’inflation évolue dans le mauvais sens. En outre, à très court terme, et c’est une chose intéressante que j’ai en quelque sorte retenue de mon passage à Washington, il semble que les entreprises disent essentiellement à leurs clients qu’elles veulent continuer à mener leurs activités comme à l’habitude.
Elles essaient de rassurer et de calmer les gens. Elles ne se précipitent pas encore pour augmenter les prix à la suite du rajustement des droits de douane, dans l’espoir de réduire leurs stocks, et elles espèrent qu’au moment de se réapprovisionner, les droits de douane seront plus bas qu’ils ne le sont aujourd’hui. Toutefois, dans la mesure où les nouvelles économiques ne sont pas si mauvaises pour le moment et où les marchés financiers ne se sont pas trop mal comportés, certains membres de l’administration pourraient croire qu’ils n’ont pas tant besoin de s’inquiéter des répercussions des droits de douane. La probabilité d’une plus grande perturbation économique pourrait donc augmenter. Je parle d’ici un mois ou six semaines.
Voilà donc quelques-uns des facteurs auxquels nous sommes confrontés sur le marché des obligations du Trésor. Je peux sûrement poursuivre sur les cours des marchés des titres de créance dans quelques instants. Mais revenons à vous, Jeff.
Ce recul au chapitre des droits de douane vous semble donc plus une mesure temporaire qu’un signe avant-coureur. Et il semble qu’après votre visite à Washington, vous soyez encore plus convaincu que l’administration ira de nouveau de l’avant, ce qui pourrait ébranler un peu les marchés. Et si nous revenons aux marchés des titres à revenu fixe en particulier, pourriez-vous résumer la réaction des marchés obligataires mondiaux aux annonces de droits de douane le jour de la libération et la volatilité que nous avons observée par la suite, et peut-être nous dire ce que vous avez appris de cette période ?
Oui. En ce qui concerne les obligations du Trésor, je pense que si les taux d’intérêt évoluent de manière latérale, les taux obligataires évolueront de la même manière. La courbe de rendement risque de s’accentuer et les actifs à long terme pourraient produire des rendements en revenu un peu plus élevés au fil du temps. Le contexte semble donc favorable aux obligations du Trésor, mais il ne m’apparaît pas particulièrement excitant. En ce qui concerne les marchés des titres de créance, je dirais que les perspectives du marché américain sont bonnes si une récession peut être évitée. Comme l’économie était initialement très solide et qu’elle aurait pu gagner de 2,5 % à 3 %, qu’il n’y avait pas d’accumulation excessive de levier au sein de l’économie ou de grosse bulle sur le marché du logement ni d’endettement excessif au sein des bilans des consommateurs ou des entreprises, malgré ce choc économique négatif, la croissance de l’économie devrait selon moi se situer entre 0,5 % et 1 % cette année, en l’absence de tout autre événement susceptible d’aggraver les perspectives. Un contexte de faible croissance, mais sans récession, peut être plus difficile pour les marchés boursiers, parce que les bénéfices peuvent subir davantage de pression.
En ce qui concerne les marchés des titres de créance toutefois, même si des émetteurs de certains secteurs commencent à observer plus de tensions et qu’il peut y avoir une certaine dépréciation du crédit des sociétés fortement endettées, en général, les écarts de crédit se maintiennent. De ce point de vue, les titres de créance s’en sortent probablement mieux que les actions. Si je devais mettre l’accent sur un aspect plus préoccupant, ce serait en fait là où l’effet de levier est le plus important, ce qui est bien sûr plus le cas de segments, comme les marchés privés et les prêts directs, que pour celui des obligations à rendement élevé. Je pense donc que les titres de créance peuvent s’en sortir pour le moment. Au sein des marchés des titres de créance toutefois, les secteurs et les titres se comporteront différemment.
La volatilité qui y prévaut offre certainement des occasions aux gestionnaires d’actifs qui utilisent une approche active. Par ailleurs, je dirais que, dans le contexte de marché actuel, les rendements à l’échelle mondiale peuvent grandement différer de ceux que nous observons sur le marché américain des titres de créance. Les cycles économiques sont très différents à l’étranger. De ce point de vue, je pense qu’il pourrait y avoir des occasions plus claires en dehors du marché américain. Par exemple, en ce qui a trait aux banques européennes, que nous considérons en bonne santé, nous aimons bien les obligations à conversion conditionnelle.
L’Europe assouplit sa politique budgétaire. Cela permettra de soutenir considérablement la croissance. Les États-Unis ne sont pas en mesure de faire de même. C’est pourquoi les banques européennes me semblent certainement plus intéressantes que les banques régionales américaines, par exemple. Et je dis cela pour souligner le fait que certains segments des marchés mondiaux des titres de créance offriront des valorisations attrayantes et de la valeur. Ce sont les actifs que vous devez souscrire et détenir et que vous devez chercher à étoffer en période de faiblesse, alors que d’autres segments peuvent être à éviter.
Excellent. Ce que vous avez dit me semble très important : si nous observons une faible croissance, sans récession, les marchés des titres de créance pourraient faire mieux que d’autres catégories d’actif. Je pense que vous avez abordé un autre point très important. L’avantage de considérer les placements à l’échelle mondiale.
Vous pouvez ainsi simplement investir dans différentes régions plutôt qu’à un seul endroit. Certaines régions peuvent paraître plus attrayantes que d’autres, et il semble que vous recherchez de la valeur pour vos portefeuilles à l’extérieur des États-Unis. J’aimerais revenir sur ce point et l’approfondir un peu, pour voir quelles stratégies de BlueBay retiennent plus votre attention.
Mais avant, j’aimerais que vous nous disiez quels autres risques vous envisagez pour le reste de l’année. Je sais qu’il est difficile de faire abstraction de cette guerre des droits de douane, puisqu’elle occupe une grande partie de l’actualité. Mais y a-t-il d’autres risques importants pour l’économie et les marchés sur lesquels vous et votre équipe vous concentrez en ce moment, Mark ?
Je pense que l’autre grande question aux États-Unis, et dont nous entendons probablement plus parler à Washington, est celle du budget et de l’état du déficit américain. Je pense qu’il s’agit clairement d’un sujet de préoccupation, sachant que normalement, à ce stade du cycle économique, on s’attend à ce que l’économie américaine dégage un excédent budgétaire.
Au lieu de cela, nous constatons un déficit de 6,5 % du PIB. Et en cas de récession – je ne dis pas que ce sera le cas –, mais en général, en cas de récession, ce taux gagne quatre points de pourcentage. Vous voyez donc qu’il y a même un risque que le déficit des États-Unis dépasse les 10 %, ce qui, à mon avis, serait vraiment inquiétant.
Ces craintes concernant le budget et la viabilité de la dette attireront certainement l’attention des marchés obligataires et, malgré l’agitation autour d’Elon Musk et du DOGE (Department of Government Efficiency), il semble que les efforts de gains d’efficacité gouvernementale risquent davantage d’aggraver le déficit que de le réduire. Ironiquement, il a licencié un grand nombre de percepteurs d’impôt de l’IRS, et il semble que le recouvrement de l’impôt en pâtisse. Cela illustre bien la maladresse de l’administration dans l’exécution de ses décisions. Alors, bien sûr, il y a des préoccupations à ce sujet. Il y en aura concernant la géopolitique. Je pense que nous nous trouvons dans une période de grandes turbulences, et je pourrais continuer longtemps et donner l’impression que le ciel nous tombe sur la tête.
Comme je ne veux pas trop déprimer les gens, je dirais qu’au milieu de tout cela, il ne faut pas perdre de vue que la volatilité offre aussi des occasions.
Absolument. Et en tant que gestionnaire actif, il semble y avoir un peu plus d’occasions d’ajouter de la valeur lorsque les temps sont un peu plus volatils. Une autre question sur les risques, Mark, que nous avons entendue de plusieurs de nos clients est que se passe-t-il avec le président de la Fed, Jerome Powell, et plus particulièrement avec Donald Trump et les efforts de l’administration américaine pour, disons, influencer ou mettre de la pression sur les décisions de la Fed en ce qui concerne les taux d’intérêt.
Avez-vous des observations et des points de vue sur ce qui se passe à ce sujet ?
Je pense qu’il est très peu probable que Trump démette Powell. D’une certaine manière, il est préférable de le maintenir en poste, de le maltraiter régulièrement et de le rendre responsable de tous les maux auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, plutôt que de le remplacer. En outre, je ne pense pas que les marchés américains verraient d’un bon œil que l’on s’en prenne à Powell de cette manière.
Cela dit, je pense que l’attention se tournera vers le prochain président de la Fed, pour l’instant. Je pense que Kevin Warsh serait le candidat le plus en vue. Assurément, lorsque nous reviendrons de vacances en septembre, nous entendrons davantage parler du prochain président de la Fed. Pour ce qui est de Powell lui-même, tout ce que je sais de la Fed, c’est qu’il se concentre désormais plus sur son héritage.
Il ne veut pas être l’Arthur Burns des temps modernes, celui qui a perdu le contrôle de l’inflation à deux reprises pendant son mandat. Ainsi, bien que la croissance ralentisse, je pense qu’il veillera à contenir l’inflation. Il devra également s’assurer que la Fed est en mesure de maintenir et de démontrer son indépendance.
Ainsi, le fait que Trump réclame une baisse des taux d’intérêt empêche un peu la Fed de les réduire. Non pas que je pense que c’est ce qu’elle souhaiterait faire pour le moment, mais on peut voir que d’une certaine manière, les actions, les déclarations de Trump peuvent s’avérer assez contre-productives.
Oui, je suppose qu’il est toujours bon d’avoir un bouc émissaire sur qui rejeter la faute. En tant qu’amateur de hockey au Canada, je ne dirai pas quelle équipe je soutiens, mais qu’il s’agisse des propriétaires, de la direction ou des joueurs sous-performants, vous avez besoin d’un bouc émissaire.
Et il semble que l’administration américaine pourrait en avoir un en la personne de Jerome Powell pour les mois à venir. Si je peux faire un lien avec les stratégies que vous et votre équipe gérez, vous avez fait allusion au fait que la gestion active est une excellente approche ou un excellent levier pour vous dans des marchés comme celui-ci.
Si nous pensons simplement à vos perspectives, comme vous l’avez mentionné, il se peut que la période actuelle soit volatile et incertaine. Y a-t-il à BlueBay des types de stratégies qui vous paraissent particulièrement adaptés à l’environnement auquel vous croyez que nous serons confrontés ?
À mon avis, dans de nombreuses régions du monde, les investisseurs auxquels je parle ont fini par surpondérer les actifs en dollars américains et les titres américains. Si l’on considère la part des États-Unis dans les indices de référence mondiaux, il est évident qu’elle n’a cessé d’augmenter au cours des dernières années en raison du surrendement des États-Unis.
Mais, à bien des égards, on nous a répété qu’il n’y avait pas de solution de rechange aux actions américaines, aux actions des sept magnifiques, etc. Dans l’ensemble, le moment me semble bien choisi pour envisager une répartition de l’actif plus large, pas seulement aux États-Unis.
Je sais qu’une grande partie de cet appel a porté sur les États-Unis, difficile de les ignorer pour le moment, mais je pense que les titres intéressants aujourd’hui se situent en dehors des États-Unis. En ce qui concerne les stratégies de titres à revenu fixe qui me semblent intéressantes et pertinentes, je pense à notre stratégie de titres de créance en actifs multiples, qui consiste à investir dans nos meilleures idées de différents secteurs du marché mondial.
Ainsi, comme il s’agit d’une stratégie à gestion active, nous pouvons orienter les placements vers les segments du marché des titres de créance qui offrent selon nous les meilleurs rendements ajustés au risque. Cette stratégie est donc intéressante. Par ailleurs, l’autre chose que je dis aux investisseurs est de rechercher des stratégies qui offrent un certain degré de non-corrélation ; des stratégies de type fonds de couverture qui ne dépendent pas trop des titres qui surpassent les marchés sous-jacents.
En tant qu’investisseurs, nous pensons aux obligations et aux actions. Il est évident que cette répartition de l’actif entre obligations et actions fonctionne lorsqu’il y a une corrélation inverse, ce qui est le cas dans un contexte reposant uniquement sur les chocs de croissance économique. Mais en cas de chocs d’inflation, il peut y avoir des périodes où les obligations et les actions baissent en même temps.
Il est donc nécessaire de rechercher des résultats non corrélés. C’est pourquoi je pense qu’il est intéressant d’avoir des stratégies qui permettent d’investir davantage en fonction d’un rendement absolu. Je mettrais l’accent sur une stratégie événementielle sur crédit européen, en partie parce qu’elle investit dans des sociétés du marché intermédiaire européen qui nous semblent prometteuses.
Mais le bilan de certaines de ces sociétés est trop endetté, en partie à cause de la COVID-19 et autres, et elles ont dû restructurer leur dette. Nous avons donc assisté à une période de perturbation des marchés et, puisque l’Europe a connu une période de croissance un peu difficile pendant quelques années, on trouve en fait une abondance d’occasions sur le marché intermédiaire européen dans ce segment en particulier.
Il me paraît particulièrement intéressant et devrait donner lieu à des idées très intéressantes et à des occasions de rendement très attrayantes. Ce sont donc deux segments que j’apprécie particulièrement sur notre marché, mais le monde est incertain, nous vivons une période instable. Dans ce contexte, je pense qu’être actif et agile, ouvert d’esprit et pas trop dogmatique, sont autant d’éléments que nous devons garder à l’esprit lorsque nous essayons de naviguer dans ces eaux troubles.
Entendu. Donc, oui, il est possible d’opter pour une stratégie dynamique et sans restrictions régionales ou pour une stratégie un peu plus ciblée, mais moins corrélée, cela a beaucoup de sens. Merci beaucoup de nous avoir fait profiter de votre expertise et de nous avoir fait part non seulement de votre point de vue sur l’économie et sur les titres à revenu fixe en particulier, mais aussi sur les types de stratégies qui, selon vous, sont les plus intéressantes à l’heure actuelle.
Mark, c’est toujours un plaisir. Nous apprécions vraiment le temps que vous nous accordez. Merci également à tous nos auditeurs. Nous espérons que cette conversation vous a été utile et que vous pourrez aussi vous joindre à nous la prochaine fois.
Merci, au revoir.
Conférencier invité :
Mark Dowding, premier directeur général, premier gestionnaire de portefeuille et chef des placements, Titres à revenu fixe BlueBay, RBC Global Asset Management (UK) Limited
Animatrice :
Jeff Roberts, gestionnaire de portefeuille institutionnel, PH&N Institutionnel
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