Le contexte économique est très instable alors que le président Trump négocie des accords commerciaux avec de nombreux pays. Des progrès sont toutefois accomplis à bien des égards, et les plus grandes craintes liées aux droits de douane sont probablement désormais derrière nous. Les États-Unis ont conclu des accords commerciaux avec le Royaume-Uni et la Chine, et les droits de douane réciproques ont été reportés au moins jusqu’en juillet ou août. Cela dit, certains droits de douane restent en vigueur et on ne connaît pas encore les répercussions économiques ultimes de la taxation accrue des échanges mondiaux. Jusqu’à présent, la confiance des entreprises et des consommateurs s’est effritée, mais les données économiques réelles ont bien résisté et les indicateurs avancés laissent toujours entrevoir une croissance modeste (figures 1 et 2). Dans l’ensemble, nous prévoyons une croissance économique lente, mais positive en 2025 et nous reconnaissons que les risques de récession, bien que non négligeables, ont diminué en raison de la volonté de Trump de modérer ses menaces de droits de douane extrêmes. À plus long terme, nous nous attendons à ce que la croissance s’accélère légèrement en 2026, lorsque l’incertitude liée aux droits de douane finira par diminuer et que la stimulation budgétaire apportera un soutien.
Figure 1 : Confiance des consommateurs et des petites entreprises aux É.-U.
Nota : Au 30 mai 2025. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 2 : Indices mondiaux des directeurs d’achats
Sources : Macrobond, RBC GMA
Outre les droits de douane, plusieurs autres risques viennent compliquer les perspectives. Les investisseurs sont de plus en plus préoccupés par l’accroissement de l’endettement des gouvernements, comme en témoigne la hausse des coûts d’emprunt à long terme qui, si elle s’aggrave, menace de déstabiliser les marchés financiers. Par ailleurs, les tensions géopolitiques restent élevées et l’activité militaire est intense au Moyen-Orient ainsi qu’en Russie et en Ukraine. Ces risques sont susceptibles de générer de l’incertitude et de la volatilité pour l’économie et les prix des actifs.
Le repli du dollar américain traduit une baisse de l’intérêt des investisseurs pour les actifs américains
Les fluctuations des marchés des changes pourraient signaler une évolution des préférences des investisseurs, au détriment des actifs américains. L’indice du dollar américain a fléchi de 10 % depuis janvier, malgré l’extrême volatilité des marchés financiers et les fortes inquiétudes des investisseurs, qui ont historiquement été favorables au billet vert (figure 3). Le moment et l’ampleur du repli semblent indiquer que les investisseurs remettent peut-être en question l’exceptionnalisme américain et le statut de valeur refuge du dollar américain. Étant donné que la monnaie demeure excessivement surévaluée, même après le récent recul, nous pensons qu’un affaiblissement beaucoup plus important reste à venir. Pour les investisseurs mondiaux, ces mouvements de change sont déterminants lors de la comparaison des actifs dans une même devise. De fait, jusqu’à présent cette année, la dépréciation du dollar a freiné le rendement des actions et des obligations américaines par rapport aux actifs internationaux.
Figure 3 : Indice du dollar américain (DXY)
Nota : Au 30 mai 2025. Sources : Bloomberg, RBC GMA
La Réserve fédérale devrait reprendre ses baisses de taux plus tard cette année compte tenu du ralentissement de la croissance
Dans ce contexte, de nombreuses banques centrales des pays développés ont continué de réduire leurs taux d’intérêt pour soutenir l’activité économique, mais un nouvel assouplissement des taux pourrait être limité si l’inflation s’avère tenace. Aux États-Unis, la Réserve fédérale (Fed) s’est abstenue d’intervenir jusqu’à maintenant cette année, étant donné que le marché du travail est vigoureux et que l’inflation demeure légèrement au-dessus de la cible de 2,0 %. En raison des droits de douane, la baisse de l’inflation pourrait être temporairement retardée jusqu’en 2026. Toutefois, il est important que la Fed évite de réagir de façon excessive à une pression inflationniste soutenue à court terme, puisque l’effet haussier des droits de douane sur les prix a peu de chances de se reproduire. Nous nous attendons à ce que le ralentissement de la croissance pousse la Fed à procéder à trois baisses de taux de 25 points de base au cours de l’année à venir, conformément à ce que le marché a pris en compte (figure 4). Et nous reconnaissons que, si l’économie devait s’affaiblir davantage, la Fed disposerait d’une marge de manœuvre suffisante pour abaisser les taux d’intérêt par rapport à leur niveau actuellement restrictif. En fin de compte, la trajectoire des taux dépendra des données réelles et de l’évolution de la politique commerciale.
Figure 4 : Taux implicite des fonds fédéraux
Contrats à terme sur 12 mois au 30 mai 2025
Sources : Bloomberg, Réserve fédérale américaine, RBC GMA
Les obligations d’État présentent un potentiel de rendement intéressant et un risque de valorisation modeste
Les taux des obligations d’État ont fluctué dans une large fourchette, les investisseurs évaluant la croissance, l’inflation et les préoccupations budgétaires. Le taux des obligations américaines à 10 ans est descendu à 3,86 % peu après l’annonce, début avril, par Trump de droits de douane réciproques, un obstacle majeur à la croissance. Il a ensuite grimpé brièvement à plus de 4,60 % en mai, dans la foulée de l’abaissement de la cote de crédit des États-Unis par Moody’s et des inquiétudes concernant la viabilité de la situation budgétaire du pays, exacerbées par le projet de loi « One Big Beautiful Bill ». Actuellement autour de 4,40 %, le taux des obligations américaines à 10 ans dépasse le point d’équilibre estimé par nos modèles. Cela sous-entend que les obligations d’État offrent un potentiel de rendement raisonnable tout en ne présentant qu’un risque de valorisation modéré (figure 5).
Figure 5 : Taux des obligations du Trésor américain à 10 ans
Fourchette d’équilibre
Nota : Au 31 mai 2025. Source : RBC GMA
Les actions se redressent après une forte liquidation, portées par les régions hors des États-Unis
Les actions mondiales ont subi une extrême volatilité au cours du dernier trimestre, certains grands indices ayant enregistré des baisses de plus de 20 %, ce qui correspond à un marché baissier. Les actions américaines ont mené le repli, en raison de l’escalade des menaces de droits de douane ; l’indice NASDAQ, à forte teneur technologique, a chuté de 24 % par rapport à son sommet de décembre 2024 et l’indice Russell 2000 Small Cap, de 28 % par rapport à son sommet de novembre. Le S&P 500 a cédé 19 % du sommet au creux, frôlant ainsi le seuil qui définit un marché baissier. En revanche, les marchés boursiers internationaux ont fait belle figure, surtout si l’on tient compte de l’affaiblissement récent du dollar américain (figure 6). Cependant, après l’annonce par Trump d’une suspension des droits de douane réciproques pendant 90 jours, les actions ont connu une forte reprise, renforcée par l’accord commercial conclu avec la Chine. En conséquence, la plupart des principaux indices ont entièrement effacé leurs pertes antérieures et de nombreux marchés hors des États-Unis ont atteint de nouveaux records. La dernière remontée a toutefois ramené les actions américaines à grande capitalisation à des niveaux excessifs, limitant ainsi leur potentiel de rendement. Nos modèles indiquent néanmoins que les actions mondiales, dans leur ensemble, ne sont pas chères et que les marchés boursiers hors Amérique du Nord se négocient avec des écarts attrayants en deçà de leur juste valeur (figure 7).
Figure 6 : Variations des cours des principaux indices en USD
Cumul annuel 2025
Nota : Au 30 mai 2025. Les sept magnifiques sont Apple, Microsoft, Alphabet, Amazon, Nvidia, Meta et Tesla. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 7 : Indice composite des marchés boursiers mondiaux
Indices des marchés boursiers par rapport au point d’équilibre
Nota : Au 30 mai 2025. Source : RBC GMA
Une forte croissance des bénéfices et le maintien d’un haut niveau de confiance des investisseurs seront essentiels pour que le S&P 500 poursuive sa progression
Étant donné les valorisations élevées des actions américaines à grande capitalisation, la poursuite des gains dépendra désormais essentiellement du maintien d’un fort niveau de confiance des investisseurs et d’une croissance robuste des bénéfices. Les analystes prévoient une croissance des bénéfices de 8,5 % en 2025, suivie d’une croissance de 13,5 % en 2026. Si le S&P 500 devait se négocier entre 0,5 et 1 écart type au-dessus du niveau d’équilibre, il pourrait générer des rendements annualisés compris entre 1 % et 9 % d’ici la fin de 2026, à condition que les estimations générales des bénéfices soient atteintes (figure 8). Cela dit, la croissance des bénéfices pourrait faire face à des vents contraires, en particulier si les marges bénéficiaires s’affaiblissent du fait des droits de douane et du rapatriement de la production aux États-Unis, ce qui pourrait alourdir les coûts des intrants et réduire l’efficacité opérationnelle. En cas de bénéfices décevants, les actions américaines seraient vulnérables compte tenu de leurs valorisations élevées et de l’enthousiasme accru des investisseurs.
Figure 8 : Prévisions de bénéfices et autres scénarios de valorisations et de résultats de l’indice S&P 500
Nota : Au 30 mai 2025. Les rendements globaux pour 2026 sont annualisés. Sources : LSEG I/B/E/S, RBC GMA
Dans ce contexte, nous nous attendons à ce que les obligations d’État génèrent des rendements d’environ 5 % au cours de l’année à venir, pourvu que l’inflation continue de baisser vers les cibles des banques centrales, avec la possibilité de rendements plus élevés si l’économie subit un ralentissement important. Bien que les actions aient déjà connu une reprise impressionnante, nous continuons de nous attendre à ce qu’elles surpassent les obligations. En outre, la liquidation survenue sur le marché boursier en mars et en avril a donné lieu à des niveaux de survente extrêmes, généralement associés par le passé à des creux de marché durables.